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Repenser l’action publique ?

Pour « repenser » l’action publique, encore faudrait-il qu’elle ait été préalablement pensée, ce qui est tout sauf certain. Bien peu d’écrits, en effet, tant scientifiques que pédagogiques, révèlent la nature d’une action dont ils se contentent, généralement, de présenter le régime.

En ces temps d’essor du « droit processuel », pourtant, c’est-à-dire de comparaison des différentes procédures, il serait opportun de déterminer enfin ce qui particularise l’action publique des autres actions en justice. Cela serait d’autant plus pertinent que, nul ne l’ignore, ladite action a connu nombre de bouleversements au cours de ces dernières années : essor des pouvoirs de la victime, évolution de l’application des peines, développement des procédures alternatives, remise en cause de l’instruction, etc.

Précisément, qu’est-ce, au juste, que l’action publique ? Une action « pour l’application des peines », pose l’article 1er du Code de procédure pénale. Si sa mise en œuvre ne conduit pas inéluctablement à une peine, tel n’en demeure pas moins l’objet, son déclenchement ayant bien ce seul et unique but. À une infraction commise doit, en principe, répondre la punition de son auteur. Et c’est parce qu’il existe des soupçons à l’encontre d’une personne d’avoir agi de la sorte qu’une juridiction va être saisie pour en juger.

À ce but doit, néanmoins, pour le moment, être rattaché un autre, qui lui est indissociable et qui justifie l’éventuelle dérivation de l’action publique devant un juge préalable – ou préparatoire ou de mise en état : c’est la recherche de la vérité. Il ne devrait effectivement pas exister de peine sans vérité, puisque le doute, autrement dit l’incertitude, profite à l’accusé, en vertu de la présomption d’innocence.

Faute de trouver la vérité où on la cherchait, des faits vers les personnes qu’on « examine », en bien comme en mal – « à charge et à décharge » –, l’action publique sommeillera puis s’éteindra. Demain, peut-être, lorsque ce mal-aimé de juge d’instruction disparaîtra à son tour, il y aura encore un juge de l’enquête ? des libertés ? de l’enquête et des libertés ?  pour contrôler la régularité de la recherche de la vérité et autoriser les actes coercitifs et intrusifs que cela suppose ; mais d’action publique, point, du moins à ce stade. 

De là deux questions : l’action publique ne deviendra-t-elle pas une pure action pour l’application des peines ? Quelle action fondera la saisine de ce juge de l’enquête ?

Il reste que les parties à ces actions demeureront les mêmes : ministère public en demande, mis en cause en défense, victime énigmatiquement et épisodiquement présente. C’est, d’ailleurs, à travers les premières que l’on étudie généralement les secondes. Pourtant, le droit de punir, que l’action publique réalise, n’appartient qu’à la société, le ministère public ne faisant alors, au nom de cette dernière, c’est-à-dire comme représentant, que la déclencher et l’exercer. Il le fait, au surplus, en suivant un chemin tracé par le législateur et qui le conduira au juge. Quoi de plus sécurisant que cette association des autorités les plus légitimes ? La procédure pénale qui fait peur est toujours celle qui s’en écarte, en reléguant le juge à des autorisations et des contrôles.

À la victime qui, après tout, est une composante inévitable de la plupart des situations pénales, on concède, pour cette raison, quelques prérogatives, la plus importante étant, bien entendu, celle d’obtenir le déclenchement de l’action publique.

Quant au mis en cause, il n’est plus seulement présumé innocent: bénéficiant de l’essor du principe du contradictoire, pilier du procès équitable à l’européenne, il est, aujourd’hui, une partie au sens fort du procès pénal au sens strict. Ses armes juridiques sont similaires à celles dont dispose le ministère public.

Toutefois, c’est surtout en amont et en aval du procès de la peine que les choses ont le plus évolué.

En amont du procès, la politique pénale, à laquelle le ministère public est soumis, mais qu’il participe également à déterminer – paradoxe hiérarchique –, s’est étoffée à un point tel qu’il apparaît difficile d’affirmer encore que, dans ce cadre, il n’a pas la disposition de l’action publique. L’opportunité dont il dispose pour recourir à telle ou telle réponse pénale, d’autant plus étendue que ces réponses sont de plus en plus nombreuses, démontre que l’action publique ne représente plus qu’un élément au sein de cette politique ; l’élément principal, sans doute, car même si elle n’est pas la voie la plus empruntée, c’est sa menace qui garantit l’efficacité de la plupart des autres.

Ceci précisé, l’opportunité du déclenchement de l’action publique ne diffère guère de celle du déclenchement d’une action privée, l’éthique gouvernant alors, pour celle-ci, ce que le droit autorise où, comme on vient de le dire pour celle-là, la politique le fait en vertu de cette même autorisation. En revanche, une fois exercée, l’action publique, contrairement à l’action privée, devient proprement indisponible: point d’abandon, de transaction, de désistement ou d’acquiescement. Quel que soit l’avis du ministère public, qui peut ne pas ou ne plus l’assumer, elle doit parvenir à son terme, le juge saisi étant le seul à décider s’il s’agira de faire appliquer une peine.

N’est-il question, pour autant, que de faire appliquer la loi, comme semble le dire l’article 31 du Code de procédure pénale ? L’action serait, en ce sens, « objective », au moins du point de vue de son demandeur, ce qui se conçoit mieux depuis que le législateur a ajouté, à la fin de ce texte, que le ministère public agit « dans le respect du principe d’impartialité auquel il est tenu ». Est- il d’objectivité sans impartialité ? Il n’empêche : l’affirmation a peu d’incidence tant que le statut des magistrats concernés, qui ne sont, en réalité, ni indépendants ni impartiaux, n’est pas réformé. Dans l’attente, on ne saurait donc affirmer que l’action publique soit plus objective qu’une autre. Tout au plus est- elle portée par l’intérêt général plutôt que par un intérêt particulier ; elle n’est donc pas « désintéressée » !


En conséquence, la réforme du ministère public est urgente, car c’est bien lui qui a été le principal destinataire des grandes évolutions procédurales de ces dernières années. Il s’est, on le sait, opéré une contractualisation de la justice pénale, ce qui ne signifie pas que cette dernière s’est, par là même, privatisée, comme on l’affirme si souvent. Le contrat, en effet, n’est ni privé ni public ; c’est un outil qui, en l’occurrence, est à la disposition du seul ministère public, dont le rôle s’est accru au fur et à mesure des années. De plus, si sont effectivement en question des contrats, ce ne sont alors que des contrats d’adhésion. C’est dire que, en vérité, le procès pénal n’a peut-être jamais été aussi public que depuis qu’il est devenu la chose du ministère public. Là est peut-être la seule et véritable révolution !

L’autorité de la chose jugée bénéficie assurément à celui qui, pour des raisons de droit, n’est pas condamné. Mais, à l’inverse, quelle action fonde les demandes en révision et en réexamen régies par les articles 622 et suivants du Code de procédure pénale ? Est-on alors confronté à la renaissance de l’action publique ou au déclenchement d’une nouvelle action ?

La première réponse signifierait que l’impératif de vérité est principalement et non accessoirement consubstantiel à l’action publique, qui ne se limiterait donc jamais à l’application des peines et rendrait, en droit pénal, l’autorité du jugement plus fragile que dans d’autres matières. En ce sens, pourrait-on faire un lien entre ces recours et l’article 6 du Code de procédure pénale, qui précise que « si des poursuites ayant entraîné condamnation ont révélé la fausseté du jugement ou de l’arrêt qui a déclaré l’action publique éteinte, l’action publique pourra être reprise ; la prescription doit alors être considérée comme suspendue depuis le jour où le jugement ou arrêt était devenu définitif jusqu’à celui de la condamnation du coupable de faux ou usage de faux ». Pourquoi, dès lors, ne pas considérer, par symétrie, que des poursuites ayant faussement entraîné condamnation et, partant, extinction de l’action publique, puissent également conduire à permettre une reprise de ladite action dans le simple but de rétablir la vérité ?

La seconde réponse, quant à elle, qui lierait donc les recours en révision et en réexamen à d’autres actions, ne contribuerait guère à rétablir une théorie générale du procès pénal, en faisant de ces recours des «procédures particulières » du livre IV davantage que des « voies de recours extraordinaires » du livre III. Alors que le pourvoi en cassation est une issue possible de l’action publique, ces recours ne seraient ainsi pas liés à elle. Il faudrait, mais qui en doute encore de nos jours ?  refaire le plan du Code de procédure pénale.

Surtout, lorsque la condamnation est assumée, c’est-à-dire lorsque la peine est mise à exécution, celle-ci demeure un objet litigieux qu’un magistrat spécialisé, le juge de l’application des peines, est compétent pour connaître. Le fondement de son intervention est-il encore l’action publique ? Une fois de plus, il existe deux façons de voir les choses.

L’action pour « l’application des peines », autrement dit l’action publique, ne prend-elle pas fin seulement lorsque la peine est exécutée ? Après tout, le processus punitif n’a vocation à s’achever qu’à l’issue de la punition du condamné ; ne serait-il alors pas logique que cela soit également le cas de l’action qui a conduit à la punition, à partir du moment où cette dernière ne se cristallise que lors de son achèvement ? En ce sens, rappelons que le passage d’un juge à l’autre, du juge qui instruit au juge qui condamne, n’apparaît pas comme un obstacle à la continuité de l’action publique. Pourquoi en irait-il différemment du passage du juge qui fait la condamnation au juge qui fait exécuter la condamnation ?

Le problème est que l’article 6 du Code de procédure pénale dispose que « l’action publique pour l’application de la peine s’éteint par (…) la chose jugée » et non par « la peine exécutée ». Là encore, on pourrait concevoir la décision du juge d’instruction, en l’occurrence de renvoi et non pas de non-lieu, comme la preuve de la relativité de cette règle : une chose est jugée, qui ne va pourtant pas conduire à la fin de l’action publique. C’est que la question de la peine, elle, n’est pas encore tranchée. Tel sera le rôle de la juridiction de jugement dont il est difficile de contester, lorsqu’elle a rendu sa décision, que quelque chose ne s’est pas achevé. Mais c’est alors plus de culpabilité et de condamnation dont il est question, celles-ci étant, en principe irrévocables, que d’une peine qui, à la fin, servira plus de référence pour la peine qui sera réellement exécutée…

 

En conclusion de cet état des lieux très et trop succinct, toutes ces questions et ces alternatives démontrent, au-delà de la nécessité évidente de penser et repenser l’action publique, un impératif plus ambitieux encore : celui de mieux construire la procédure pénale et le code qui l’accueille. On se prend à rêver, en effet, d’un ouvrage ambitieux qui lierait théorie et pratique avec élégance aussi bien qu’efficacité.

 

 

 

Guillaume BEAUSSONIE, Professeur à l’Université Toulouse 1-Capitole IEJUC (EA 1919)

La diffamation en droit ivoirien

La diffamation est une question délicate et complexe en droit ivoirien, tout comme dans d’autres systèmes juridiques. Elle soulève des problèmes liés à la liberté d’expression, aux limites de cette liberté, ainsi qu’à la protection de la réputation et de l’honneur des individus. Cet article vise à explorer la notion de diffamation en droit ivoirien, ses éléments constitutifs, les sanctions associées, et les considérations juridiques importantes.

 

La diffamation est tout propos, allégations fausses visant à ternir l’image ou la réputation d’un individu. Elle est également définie par l’article 78 de la loi No 2004-643 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la presse qui dispose : « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps social auquel le fait est imputé est une diffamation. »

En clair, la diffamation est une forme d’atteinte à l’honneur et à la réputation d’une personne. En Côte d’Ivoire, elle est définie comme le fait de tenir des propos injurieux, calomnieux ou outrageants à l’encontre d’un individu, que ce soit à l’écrit ou à l’oral. La diffamation peut également se produire via des médias ou des plateformes en ligne, amplifiant ainsi sa portée et son impact. Mais alors, comment reconnaître un cas de diffamation ? Quelles en sont ses éléments constitutifs ?

 

En droit ivoirien, pour qu’un acte soit qualifié de diffamation, les éléments suivants doivent être présents :

1. L’atteinte à l’honneur et à la réputation: Les propos tenus doivent porter atteinte à l’honneur et à la réputation de la personne visée. Ils doivent être offensants, humiliants ou dégradants.

2. L’identification du plaignant: Les propos diffamatoires doivent permettre d’identifier clairement la personne visée. Cela signifie que même si le nom n’est pas mentionné, s’il est possible d’identifier la personne, les critères de la diffamation sont remplis.

3. La publication ou la communication à des tiers: Les propos diffamatoires doivent être communiqués à des tiers, ce qui signifie qu’ils ne sont pas restés privés. Cette communication peut se faire par écrit, oralement ou à travers les médias.

4. Le caractère fautif: La diffamation ne s’applique que si les propos sont mensongers ou si leur auteur les a exprimés en toute connaissance de cause, c’est-à-dire qu’il savait qu’ils étaient faux ou qu’il ne s’est pas soucié de leur véracité.

Après identification des éléments constitutifs de la diffamation, nous sommes en droit de nous demander quelles sont les sanctions prévues par la loi pour un individu qui se rend coupable d’un tel acte.

 

L’article 229 du code pénal ivoirien prévoit des sanctions en cas de diffamation. Ce mot article stipule:  « La diffamation, l’injure ou la menace faite dans les conditions pr évues par l’article 184 envers un groupe de personnes qui appartiennent par leur origine à une race, à une ethnie ou à une religion déterminée, est punie d’un emprisonnement de cinq à dix ans et d’une amende de 500.000 à 5.000.000 de francs. 

Ces peines sont portées au double, si l’infraction a été commise par la voie de la presse, de la radio ou de la télévision. »

Également, la loi n° 2004-643 du 14 décembre 2004 relative à la liberté de la presse en Côte d’Ivoire encadre la liberté d’expression et la protection de la réputation de l’administration publique. Elle énonce des règles spécifiques pour les médias, les journalistes et les organes de presse en ce qui concerne la diffamation, notamment aux articles 79 à 81.

Article 79 « La diffamation commise envers les Cours, les Tribunaux, les Armées de terre, de mer ou de l’air, les Corps constitués et les Administrations publiques est punie d’une amende de 5.000.000 de francs à 15.000.000 de francs. »

Article 80

« Est punie des amendes prévues à l’article précédent, la diffamation commise en raison de leur fonction ou de leur qualité, envers un ou plusieurs membres du Gouvernement, un ou plusieurs membres de l’Assemblée Nationale, un citoyen chargé d’un service ou d’un mandat public, temporaire ou permanent, un juré ou un témoin en raison de sa déposition. »

Article 81

« La diffamation commise envers un groupe de personnes qui appartiennent par leur origine, à une race, à une ethnie, à une tribu, ou à une religion déterminée, ou à une catégorie de personnes, sera punie d’une amende de 5.000.000 de francs à 15.000.000 de francs.

La diffamation commise envers les particuliers est punie d’une amende de 5.000.000 de francs à 15.000.000 de francs. »

 

En somme, la liberté d’expression bien qu’étant un droit prévu par la constitution, ne doit pas être un moyen de porter atteinte à la réputation d’autrui. C’est pour cela que la diffamation est régie par un cadre juridique solide qui vise à protéger la réputation individuelle tout en permettant l’exercice de la liberté d’expression. La prudence et la responsabilité dans la communication sont fondamentales pour éviter les conséquences légales de la diffamation en Côte d’Ivoire.


Corinne THIO, juriste privatiste, rédactrice à LDJ

L’impact de « l’aliénation parentale » sur l’intérêt supérieur de l’enfant dans les cas de violence domestique

Dans les cas présumés de violence au sein de la famille, et où des enfants sont impliqués, il est important que les tribunaux priorisent l’intérêt supérieur de l’enfant. Lorsque ce n’est pas le cas, les tribunaux font courir aussi bien aux victimes de violence domestique qu’aux enfants le risque de traumatisme. Les tribunaux de la famille doivent cesser de se servir de l’«aliénation parentale» comme d’un prétexte idéal pour légitimer la priorisation des droits des personnes responsables d’actes de violences au sein des foyers, au détriment des droits fondamentaux des enfants (Birchall, Choudhry, Nicholson-Pallett, 2018). 

L’«aliénation parentale» désigne tout acte qui favorise chez l’enfant un rejet injustifié à l’égard de l’un de ses parents, le plus souvent le père (Assemblée générale des Nations Unies, 2023). Cette expression tient son origine de la psychologie et de la croyance archaïque selon laquelle il est fréquent que l’un des parents, très souvent la mère, persuade l’enfant, de manière injustifiée, de manifester de l’hostilité envers le père et de prendre de la distance envers celui-ci (Assemblée Générale des Nations Unies, 2023). Par conséquent, l’aliénation parentale est l’accusation selon laquelle un parent amène son enfant, de manière illégale, à manifester de l’hostilité envers l’autre parent. 

L’examen de ces problématiques sous le prisme de la question de la protection des enfants met en exergue un ensemble d’éléments particulièrement graves. Les décisions impliquant une allégation d’aliénation parentale non justifiée sont susceptibles d’exposer les enfants à des environnements violents d’un point de vue physique ou mental, mettant ainsi à mal leur capacité de résilience et entravant leur processus de développement (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, 2023). 

Les tribunaux n’arrivent souvent pas à comprendre à quel point les plaintes relatives aux violences domestiques qui ne sont pas prises en considération, peuvent contribuer à détériorer davantage la situation, obligeant les victimes et leurs enfants à rester en contact permanent avec leurs bourreaux (Assemblée Générale des Nations Unies, 2023). Les formes de violence familiale affectent souvent les enfants ; au Canada, plus de 40% des cas d’aliénation parentale étaient caractérisés par des situations de violences au sein des foyers ou de maltraitance infantile (Assemblée Générale des Nations Unies, 2023).

La partialité de la justice qui considère les mères comme étant des manipulatrices potentielles sous-estime également la capacité d’agir de l’enfant (Assemblée Générale des Nations Unies, 2023). Il n’est pas rare de voir des pères reconnus coupables de violence se voir accorder un droit de visite ou un droit de garde, même dans des cas avérés de violences physiques ou de violence sexuelle (Assemblée Générale des Nations Unies, 2023).

En outre, les tribunaux hésitent généralement à statuer en faveur des mères, dont les actions visent à protéger leurs enfants. En effet, les mères peuvent même faire l’objet de poursuites judiciaires suite à une violation du droit de garde en vue de protéger leurs enfants (Assemblée Générale des Nations Unies, 2023). 

Il arrive que les mères soient réticentes à partager les informations relatives à la maltraitance dont elles sont victimes, par crainte de se voir punies par les tribunaux sous le motif de l’aliénation parentale. Dans les cas extrêmes relevés dans différents pays répartis sur trois continents, des enfants ont été retirés à leur tuteur, et ont été obligés de retourner vivre avec le parent coupable de l’abus (Assemblée Générale des Nations Unies, 2023). Au Royaume-Uni, au cours des cinq dernières années, au moins quatre enfants ont été tués par leur parent maltraitant, à la suite des décisions de justice ayant donné à leurs assassins un accès direct à ceux-ci (Furst, 2019).  

Des préjugés sexistes et des normes culturelles omniprésents à l’échelle mondiale ont fait perdurer le concept d’aliénation parentale. Par conséquent, les systèmes relevant des tribunaux de la famille dans différentes juridictions continuent d’exposer les victimes de violences domestiques et leurs enfants à des préjudices supplémentaires en maintenant la garde conjointe dans les cas de maltraitance (Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations Unies, 2023).

Une enquête des Nations Unies a mis en évidence l’ignorance manifeste des tribunaux de la famille en ce qui concerne les preuves tangibles de violence au sein de la famille (Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations Unies, 2023). 

Plus particulièrement, les tribunaux négligent souvent les preuves tangibles en matière de contrôle coercitif, d’abus physiques et d’exploitation sexuelle, de violence dans le couple, ainsi que d’autres formes de préjudices enregistrés (Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations Unies, 2023). En général, les tribunaux de la famille privilégient l’idée d’une garde partagée, ce qui fait peser sur les victimes la lourde charge de prouver les sévices subis et le risque d’une double-victimisation.

Dans des pays tels que la Hongrie, les tribunaux ne sont pas obligés de prendre en compte les antécédents de violence dans les affaires de garde (Assemblée générale des Nations Unies, 2023). De même, en Italie, 96 % des cas de séparation pour cause de violence au sein de la famille ne considéraient pas la violence comme un élément déterminant pour la garde des enfants (Assemblée générale des Nations Unies, 2023).

Bien que le concept d’aliénation parentale soit intrinsèquement neutre, il est appliqué de manière disproportionnée. Les femmes sont en grande majorité les victimes des décisions prises en matière d’aliénation parentale, et cette situation est encore accentuée pour les minoritésqui sont également victimes de stéréotypes culturels et religieux négatifs (Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’Homme des Nations Unies, 2023).

De par leur nature, les femmes sont plus susceptibles d’être victimes de violences au sein de la famille et, dans le même temps, ont moins de chances d’accéder aux services mis en place pour les aider (Assemblée générale des Nations unies, 2023). 

Les statistiques des États-Unis d’Amériqueindiquent que 44 % des mères accusées de maltraitance par leur mari voient leur droit de garde révoqué, contre 28 % des pères dans la même situation (Assemblée générale des Nations unies, 2023). Selon des estimations, aux États-Unis, 58 000 enfants se retrouvent dans des environnements dangereux à la suite de telles décisions (Assemblée générale des Nations unies, 2023). Au Brésil, 66% des cas d’aliénation parentale sont imputés à des femmes qui ont tenté de convaincre injustement leur enfant de rejeter leur père (Assemblée générale des Nations Unies, 2023).

Les droits des enfants à ne pas subir de sévices et à ce que leur intérêt supérieur soit exprimé et protégé sont garantis par de nombreuses lois internationales. L’Article 12 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) oblige les États membres à veiller à ce que les enfants en âge d’avoir leur propre opinion puissent s’exprimer librement et que leur opinion soit dûment prise en compte dans le cadre des procédures judiciaires (Assemblée générale des Nations Unies, 2023).

L’Article 19 de la CIDE protège les enfants contre toutes les formes de violence physique ou mentale, ainsi que contre les diverses formes de blessures, d’abus, de négligence et de maltraitance (Assemblée générale des Nations Unies, 2023). 

Les violences faites aux femmes et aux enfants sont également proscrites par de nombreuses conventions régionales, notamment celles élaborées par le Conseil de l’Europe, l’Union européenne, la Cour interaméricaine des droits de l’Homme et l’Union africaine (Assemblée générale des Nations Unies, 2023). L’arène politique internationale regorge également des textes réglementant les cas de garde au niveau international afin de protéger l’intérêt supérieur de l’enfant et de prévenir les enlèvements d’enfants. On peut citer la Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants(Assemblée Générale des Nations Unies, 2023). 

Malheureusement, les principes qui sous-tendent l’application de l’aliénation parentale dans les tribunaux de la famille prévalent également en dehors de la salle d’audience. Les évaluateurs chargés de faire des rapports aux tribunaux de la famille peuvent observer les environnements familiaux à travers des perspectives biaisées, négligeant des signes évidents de maltraitance(Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’Homme des Nations Unies, 2023). Il en va de même pour les agences de protection chargées de défendre les droits des enfants et d’identifier les risques. 

Au Brésil, des avocats ont fait pression pour s’assurer que des mesures ne soient pas prises pour banaliser les actes de maltraitance axés sur la victime dans les cas de violence domestique(Assemblée Générale des Nations Unies, 2023). Cette crainte est partagée par les décideurs politiques et les gouvernements : la Chambre des Lords du Royaume-Uni a envisagé d’inclure l’expression « comportements aliénants » dans sa définition de la violence au sein de la famille, risquant ainsi de perpétuer l’idée non fondée selon laquelle les mères cherchent souvent à manipuler leurs enfants (Women’s Aid, 2021). 

Pour répondre aux problèmes d’aliénation parentale, il est essentiel de privilégier l’intérêt supérieur de l’enfant. Des exemples du monde entier indiquent des pistes possibles :

Des systèmes doivent être mis en place pour favoriser la participation des enfants aux procédures judiciaires. Le commissaire chargé de la lutte contre les violences domestiques en Angleterre et au Pays de Galles surveille les enfants sur la base des critères axés sur les traumatismes afin de mieux juger les cas de contrôle coercitif. Le système judiciaire de l’Écosse voisine donne au responsable des droits de l’enfant en matière de violence domestique la possibilité de fournir à un tribunal des informations sur la violence à l’égard des enfants, même sans en avoir reçu l’ordre. 

Tous les professionnels impliqués dans les cas relatifs à la garde d’enfants, aux violences domestiques et au bien-être familial doivent être mieux formés (Birchall, Choudhry, Nicholson-Pallett, 2018). Cette formation doit être multidimensionnelle : les professionnels qui interviennent dans les cas de violences au sein de la famille et les cas de garde d’enfants doivent recevoir une formation spécialisée, et le grand public doit être sensibilisé aux fins de susciter un changement de comportement. 

En outre, des systèmes doivent être mis en place pour définir l’approche à adopter en matière de garde d’enfants dans les cas de violences au sein de la famille, et pour réexaminer les mesures en vigueur. Un mécanisme de contrôle des systèmes judiciaires permettra de limiter les pouvoirs étendus des tribunaux et permettra aux juridictions de s’assurer que l’intérêt supérieur de l’enfant reste prioritaire (Birchall, Choudhry, Nicholson-Pallett, 2018).

Pour finir, des systèmes doivent être mis en place pour soutenir les victimes de violence au sein de la famille ainsi que leurs enfants, notamment des services spécialisés en matière de conseils, afin de donner aux victimes les moyens de porter des affaires solides devant les tribunaux et de contourner la probabilité que l’aliénation parentale ne soit utilisée (Birchall, Choudhry, Nicholson-Pallett, 2018).

Humanium s’engage à protéger les droits des enfants, notamment leurs droits à la protection et à la liberté contre toute forme de maltraitance. Humanium croit en la capacité des enfants à faire respecter leurs droits, notamment leur droit à la participation et leur droit à la protection contre la violence. Si vous souhaitez contribuer à la cause d’Humanium, vous pouvez envisager d’être bénévole, de devenir membre ou de faire un don

Rédigé par Vanessa Cezarita Cordeiro 

Traduit par Vianney Placide

Relu par Ania Beznia

et publié sur le site Humanium.org

La saisie conservatoire convertie en saisie exécutoire

La saisie-conservatoire est une procédure qui permet à un créancier de rendre indisponible les biens meubles, corporels ou incorporels, de son débiteur, entre ses mains ou celles d’un tiers.
Comme son nom l’indique, cette saisie est purement conservatoire et permet d’empêcher le débiteur de se rendre insolvable, en aliénant ses actifs.

Cela étant, pour obtenir le paiement de sa créance sur les biens objets de la saisie-conservatoire, il revient au créancier de convertir la saisie en saisie-exécutoire, à savoir, une saisie-vente ou une saisie-attribution (1).

L’Acte uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution prévoit deux types de conversion d’une saisie conservatoire en saisie exécutoire : la conversion de la saisie conservatoire des biens meubles en saisie-vente et la saisie conservatoire des créances en saisie-attribution (2).

Tout d’abord, concernant la conversion de la saisie conservatoire des biens meubles en saisie-vente, il faut rappeler que le siège de la matière se trouve aux articles 69 et suivants de l’AUPSRVE (3).

Le principe est qu’après avoir procédé à la saisie-conservatoire des biens meubles, le créancier, non muni d’un titre exécutoire, a l’obligation, dans un délai d’un (1) mois à compter de la saisie, d’introduire une procédure en vue d’obtenir ledit titre (4). Ensuite de quoi, le créancier procède à la conversion de la saisie en saisie-vente (5).

Pour ce faire, le créancier va signifier au débiteur, par l’intermédiaire d’un huissier de justice, un acte de conversion qui devra contenir un certain nombre de mentions sous peine de nullité.

A l’expiration d’un délai de huit (8) jours à compter de la date de l’acte de conversion, l’huissier procède à la vérification des biens saisis. Il est dressé procès-verbal des biens manquants ou dégradés.

Dans ce procès-verbal, il est donné connaissance au débiteur qu’il dispose d’un délai d’un (1) mois pour vendre à l’amiable les biens saisis.

Ainsi, à défaut de vente amiable dans le délai prévu, il est procédé à la vente forcée des biens saisis selon la procédure prévue pour la saisie-vente.

En ce qui concerne la conversion de la saisie-conservatoire des créances en saisie-attribution, le siège de la matière se trouve aux articles 82 et suivants de l’AUPSRVE (6). 

Il faut savoir qu’une fois obtenu un titre exécutoire constatant l’existence de sa créance, le créancier doit signifier au tiers saisi un acte de conversion qui doit contenir les mentions prescrites à l’article 82 AUPSRVE, et ce, à peine de nullité (7). À compter de cette signification, le débiteur dispose d’un délai de quinze jours pour contester l’acte de conversion devant la juridiction de son domicile ou du lieu où il demeure.

De plus, l’acte de conversion doit informer le tiers que la demande entraîne attribution immédiate de la créance saisie au profit du créancier. Là aussi, la conversion de la saisie conservatoire des créances en saisie-attribution fait intervenir un huissier de justice qui est responsable de cette conversion (8).

En l’absence de contestation du débiteur, le tiers effectue le paiement au créancier ou à son mandataire, en présentant un certificat du greffe attestant l’absence de contestation.

A l’heure actuelle, deux risques existent pour les praticiens qui usent de la procédure en validité pour convertir la saisie conservatoire en saisie exécutoire.

Le premier est le risque de dépassement du délai légal d’un mois, prescrit à peine de caducité de la saisie-conservatoire, entre l’acte de saisie et l’introduction d’une procédure tendant à l’obtention d’un titre exécutoire.

Le second est le risque de voir la procédure annulée par une décision de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, en cas de cassation.

 

1. Tribunal régional hors classe de Dakar, Décision du 12/09/2000, www.ohada.com, Ohadata J-04-477.

2. S.S. KUATÉ TAMEGHÉ, Les images floues de la vérification des biens saisis dans le système OHADA des voies d’exécution, J.P. n°61/2005, p. 87 et suivantes.

3. J.P. TCHOU-BAYO, Saisie vente, in P.G Pougoué (dir.), Encyclopédie du droit Ohada, Lamy, 2011, p. 1770 et suivantes.

4. Tribunal de première instance d’Edéa, Ordonnance du 24/02/2011, www.ohada.com, Ohadata J-12-254.

5. A. MOUDJAHIDI, « La conversion de la saisie conservatoire en saisie exécutoire : fin de l’assignation en validité », www.ohada.com, Ohadata D-14-17.

6. Cour d’Appel d’Abidjan, Arrêt du 26/03/2010, www.ohadata.com, Ohadata J-10-295.

7. Article 82 AUPSRVE.

8. Tribunal de Première Instance de Bafoussam, Ordonnance du 17 octobre 2003, www.ohada.com Ohadata -J-05-12 ; Tribunal de Grande Instance du Wouri,  Jugement du 19/09/2002, www.ohada.com, Ohadata J-04-218.

 

La révision de la constitution: entre nécessité et précaution

«Les constitutions ne sont pas des tentes dressées pour le sommeil » disait pierre-paul Royer- collard, philosophe français et homme politique. Il ressort de cette assertion que la constitution, loi fondamentale d’un état, norme suprême, est amenée à évoluer , à s’adapter aux situations qui frappent une nation. Cependant, cet élan de réflexion ne doit pas nous amener à banaliser le changement voire la révision de la constitution.

La révision de la constitution est un acte politique fondamental qui peut façonner le destin d’une nation. C’est une démarche par laquelle un pays modifie sa loi fondamentale, souvent dans le but de s’adapter aux évolutions de la société, de renforcer ses institutions, ou de résoudre des crises politiques. Cependant, ce processus suscite souvent des débats passionnés et soulève des questions essentielles notamment celle de la  nécessité de la Révision Constitutionnelle.

La nécessité de réviser une constitution peut découler de divers facteurs. Tout d’abord, les sociétés évoluent, et la constitution doit évoluer en conséquence pour refléter les changements dans les valeurs, les normes et les besoins de la population. Par exemple, l’introduction de nouveaux droits et libertés, la modification des mécanismes électoraux, ou l’adaptation des institutions aux réalités contemporaines sont des raisons courantes de révision.

De plus, une révision constitutionnelle peut être nécessaire pour résoudre des crises politiques ou institutionnelles. Dans certains cas, elle peut contribuer à apaiser les tensions et à rétablir la stabilité politique. Cela peut se produire en réformant les pouvoirs et les compétences des différentes branches du gouvernement, en réduisant les conflits de compétence ou en renforçant les mécanismes de contrôle et d’équilibre.

Pourtant, la révision constitutionnelle n’est pas à prendre à la légère. Elle soulève des préoccupations importantes, notamment en ce qui concerne la préservation de l’État de droit, de la démocratie et des droits de l’homme. Les dirigeants politiques peuvent être tentés de manipuler le processus de révision pour consolider leur pouvoir ou pour servir des intérêts particuliers. Par conséquent, des garanties doivent être mises en place pour assurer un processus transparent, inclusif et démocratique.

La question de la légitimité est cruciale. Une constitution doit être un contrat social accepté par une large majorité de citoyens. Les révisions constitutionnelles doivent donc être menées avec un degré élevé de consensus. La participation citoyenne, les consultations publiques, et le respect des droits des minorités sont autant d’éléments essentiels du processus.

En outre, la révision constitutionnelle doit respecter les principes fondamentaux de l’État de droit. Cela signifie que les révisions ne doivent pas affaiblir les droits de l’homme, la séparation des pouvoirs ou l’indépendance du système judiciaire. Les garanties constitutionnelles doivent être préservées, et les révisions ne doivent pas servir à affaiblir les contre-pouvoirs.


La révision de la constitution est un acte politique délicat qui peut avoir des conséquences durables. Elle doit être guidée par la nécessité, la précaution et le respect des principes fondamentaux. Il incombe aux citoyens, aux leaders politiques et à la société civile de veiller à ce que ce processus soit démocratique, transparent et dans l’intérêt supérieur de la nation. Car, finalement, une constitution devrait servir à établir un cadre qui garantit les droits et les libertés de tous, tout en façonnant l’avenir de la nation de manière équitable et éclairée.

 

 

Corinne THIO, juriste privatiste, rédactrice à LDJ

Les incoterms

Les ventes internationales sont régis par la convention de Vienne de 1980 portant « loi uniforme sur les ventes internationales » mais les règles matérielles ne se limitent pas à une convention. Les praticiens, ne voulant pas attendre les Etats, ont mis en place des contrats-type en la matière dont les plus célèbres sont les incoterms.

Les Incoterms, acronyme de International Commercial Terms, sont un ensemble de règles internationales largement reconnues qui définissent les responsabilités et les obligations des acheteurs et des vendeurs dans le cadre de contrats de vente internationale.

Les Incoterms ont été introduits pour la première fois en 1936 par la Chambre de commerce internationale (CCI) et ont été révisés plusieurs fois depuis pour tenir compte des évolutions du commerce international. 

Cette chambre s’était tracée pour mission de favoriser et sécuriser le développement du Commerce International en codifiant les pratiques et usages du Commerce International dont les incoterms. Ils sont publiés par cette chambre et comportent des éditions successives (la première date de 1928 et la dernière de 2020). Les termes sont conservés dans la majorité mais ont intégré de manière significative d’une part, l’influence que peuvent avoir les nouvelles technologies en matière de transmission de données, et d’autre part, des nouvelles techniques de transport (notamment développement du transport multimodal qui évite les ruptures de charges). Certains incoterms sont particulièrement adaptés à certains transports de biens car on n’a pas recours au même type de transport selon que le bien est périssable ou non. 

Les Incoterms sont conçus pour éviter les malentendus et les litiges entre les parties impliquées dans une transaction commerciale internationale. Ils définissent clairement les responsabilités de l’acheteur et du vendeur, notamment en ce qui concerne le transport, le dédouanement, l’assurance et les risques. les Incoterms sont un outil essentiel pour faciliter le commerce international et garantir que les marchandises arrivent à destination en toute sécurité et conformément aux attentes des parties impliquées.

1. EXW (Ex Works – Au départ): Le vendeur met les marchandises à disposition à son établissement ou à un autre lieu nommé (usine, entrepôt, etc.). L’acheteur est responsable de tous les coûts et risques dès ce point.

2. FCA (Free Carrier – Franco transporteur) : Le vendeur livre les marchandises à un transporteur ou à un endroit désigné par l’acheteur, mais il n’assume pas les coûts et risques de l’exportation.

3. CPT (Carriage Paid To – Port payé jusqu’à) : Le vendeur paie les frais de transport jusqu’à un lieu de destination convenu. Une fois que les marchandises sont remises au transporteur, les risques passent à l’acheteur.

4. CIP (Carriage and Insurance Paid To – Port et assurance payés jusqu’à) : Comme le CPT, mais le vendeur fournit également une assurance pour les marchandises en transit.

5. DAP (Delivered at Place – Rendu au lieu): Le vendeur est responsable de la livraison des marchandises au lieu de destination convenu. L’acheteur assume les coûts et les risques à partir de ce point.

6. DPU (Delivered at Place Unloaded – Rendu au lieu déchargé) : Similaire au DAP, mais le vendeur doit également décharger les marchandises au lieu de destination.

7. DDP (Delivered Duty Paid – Rendu droits acquittés) : Le vendeur est responsable de toutes les dépenses, y compris les droits de douane, liées à la livraison des marchandises au lieu de destination.

8. FAS (Free Alongside Ship – Franco le long du navire): Le vendeur dépose les marchandises à côté du navire au port d’expédition. Une fois les marchandises à côté du navire, les risques passent à l’acheteur.

9. FOB (Free On Board – Franco à bord): Le vendeur est responsable de la livraison des marchandises à bord du navire au port d’expédition. Les risques passent à l’acheteur une fois que les marchandises sont à bord.

10. CFR (Cost and Freight – Coût et fret): Le vendeur paie les frais de transport jusqu’au port de destination convenu. Les risques passent à l’acheteur dès que les marchandises sont à bord du navire.

11. CIF (Cost, Insurance and Freight – Coût, assurance et fret) : Comme le CFR, mais le vendeur fournit également une assurance pour les marchandises en transit jusqu’au port de destination.

 

L’utilisation des Incoterms est essentielle pour déterminer clairement les obligations de chaque partie, le transfert de risques et les coûts associés à la livraison de marchandises internationales. Cela aide à éviter les malentendus et les différends potentiels. Il est recommandé de spécifier les Incoterms dans le contrat de vente pour que toutes les parties sachent quelles règles s’appliquent.

Il est important de noter également que les Incoterms sont révisés de temps en temps pour refléter les évolutions du commerce international, il est donc essentiel de s’assurer d’utiliser la dernière version au moment de la transaction.

 

Corinne THIO, juriste privatiste, rédactrice à LDJ

La responsabilité pénale du mineur

La responsabilité pénale des mineurs, tant en droit international qu’en droit ivoirien, représente une question d’une importance cruciale, méritant une analyse approfondie étant donné le niveau de protection accordé aux mineurs dans l’ordre international. 
 

La question de la responsabilité pénale des mineurs en droit international est à la fois complexe et délicate, et elle est abordée au moyen d’instruments juridiques internationaux et de tribunaux internationaux. Voici quelques éléments essentiels à prendre en considération :

  1. L’âge de la responsabilité pénale : Le droit international reconnaît que les enfants et les adolescents ne peuvent être tenus responsables de la même manière que les adultes en matière pénale. Généralement, un âge minimum est établi en dessous duquel les enfants ne peuvent pas être tenus pénalement responsables de leurs actes. Cet âge varie d’un pays à l’autre, mais il se situe généralement entre 7 et 14 ans.
  1. Principes fondamentaux : Le droit international insiste sur la nécessité de traiter les enfants en conflit avec la loi avec une protection particulièrement renforcée. Les principes fondamentaux comprennent la prééminence de l’intérêt supérieur de l’enfant, la non-discrimination, le respect de la dignité de l’enfant, et l’utilisation de mesures spécifiques pour les mineurs.
  1. Tribunaux internationaux : Les tribunaux internationaux tels que la Cour pénale internationale (CPI) et le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) ont été confrontés à des affaires impliquant des mineurs. Ils ont instauré des procédures spécifiques pour protéger les droits des mineurs accusés de crimes internationaux.
  1. Traité de l’ONU : La Convention relative aux droits de l’enfant des Nations Unies est le traité international le plus complet sur les droits de l’enfant. Elle énonce des principes fondamentaux en matière de justice pour les mineurs, y compris l’obligation de les maintenir séparés des adultes dans un environnement de justice distinct.
  1. Sanctions pour les mineurs : Les sanctions appliquées aux mineurs en conflit avec la loi devraient avoir une dimension éducative, de réadaptation et d’intégration sociale plutôt que d’être punitives. Les sanctions pénales pour les mineurs devraient être proportionnées à la gravité de l’infraction et devraient éviter autant que possible l’incarcération.
  1. L’âge de la majorité pénale : Le droit international reconnaît que l’âge de la majorité pénale devrait être supérieur à l’âge de la responsabilité pénale. L’âge de la majorité pénale est l’âge auquel une personne est traitée comme un adulte en matière pénale. Cet âge est généralement de 18 ans.

Il est à noter que la responsabilité pénale des mineurs peut varier d’un pays à l’autre en fonction de leurs lois nationales. Cependant, les principes fondamentaux du droit international visent à protéger les droits et les intérêts des enfants en conflit avec la loi, en reconnaissant leur vulnérabilité et en cherchant des solutions éducatives et réadaptatives plutôt que des sanctions punitives.

Le système juridique ivoirien reconnaît la minorité comme une excuse atténuante ou absolutoire en droit pénal. L’excuse atténuante de minorité a pour objectif de réduire la peine encourue par un mineur, tandis que l’excuse absolutoire de minorité dispense complètement le mineur de toute culpabilité.

 Cela repose sur la notion que les mineurs de moins de 13 ans ne sont pas en mesure de discerner de manière adéquate, conformément à la loi française. Cette notion est fondée sur le manque de discernement dont souffrent les mineurs. Cependant, cette excuse absolutoire de minorité est limitée à l’âge de 13 ans.

L’excuse atténuante de minorité et l’excuse absolutoire de minorité sont prévues par l’article 113 nouveau de la loi N0 2021-893 du 21 décembre 2021portant code pénal Code Pénal ivoirienL’excuse absolutoire de minorité s’applique de plein droit aux mineurs de moins de 13 ans en cas de culpabilité. En ce qui concerne les mineurs de plus de 13 ans, ils bénéficient de l’excuse atténuante telle que prévue par cette disposition.

L’article 113 nouveau (LOI N° 2021-893 DU 21 décembre 2021) dispose :

« Les faits commis par un mineur de 10 ans ne sont pas susceptibles de qualification et de poursuites pénales.

Le mineur de treize ans bénéficie de droit, en cas de culpabilité, de l’excuse absolutoire de minorité. Il ne peut faire l’objet que des mesures de protection, d’assistance, de surveillance et d’éducation prévues par la loi.

Le mineur âgé de treize ans et plus bénéficie de l’excuse atténuante de minorité.

En matière de crime et de délit, l’excuse atténuante de minorité entraîne l’application de la moitié des peines prévues par l’article 112.

En matière de contravention, elle exclut toute peine privative de liberté. Le juge ne peut prononcer qu’une peine de travail d’intérêt général ou une admonestation. »

Cette distinction en droit ivoirien reflète la reconnaissance de la vulnérabilité des mineurs et la nécessité d’une approche différenciée en matière de responsabilité pénale.

Par Corinne THIO, Juriste rédactrice. 

Compte rendu du séminaire juridique du 13 octobre 2023

Le vendredi 13 octobre 2023, à 19h GMT, un séminaire juridique en ligne a été organisé via Google Meet par la Documentation Juridique (LDJ). Ce séminaire avait pour thème principal « LA PLACE ET LE RÉGIME DE L’EXÉCUTON FORCÉE EN DROIT DES SOCIÉTÉS« . Le Dr Anas OUAFFI, un expert renommé en droit des sociétés, était le conférencier principal de cet événement, soutenu par le modérateur Me Luc kouassi, fondateur de la plate-forme la Documentation Juridique.

 

 Sont nombreux les travaux et recherches qui ont traité l’exécution forcée, mais spécifiquement en droit civil, hormis sont rares les études qui le traitent  en droit des sociétés, notamment la question de la spécificité de « l’exécution forcée  en droit des sociétés marocain » relevant de sa portée institutionnelle et contractuelle qui demeure loin des préoccupations scientifiques des juristes marocains, malgré son importance.

 Le choix de ce sujet était dominé par un double intérêt théorique et pratique. Au niveau théorique, ce travail contribuera à réexaminer sous un angle habituel, la question de la nature dualiste de la société qui tient à la fois de l’institution et du contrat.

 L’intérêt de ce sujet, apparaît aussi au niveau pratique, dont il importe de déterminer si l’exécution forcée constitue une sanction efficace en cas de non-exécution des obligations à caractère contractuel ou légal imposée à la société et à ses acteurs.

Pour rendre notre intervention plus concrète, nous présenterons une étude de cas fictive où l’exécution forcée a été utilisée dans le contexte des sociétés.

 

Situation de base :

Supposons Une société, appelée ABC trading, et constituée de trois associés : A, B, C.

Les trois associés ont convenu qu’ils contribueraient chacun à une somme de 100000DH pour le capital initial de la société.

A et B ont effectué leur contribution promise, mais C refuse de libérer les fonds promis.

c’est ansi que A et B exposent à C leur demande de versement des fonds dans les délais prévus. C persiste dans son refus.

A et B envoient à C une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception, stipulant que C doit libérer les fonds dans un délai de 15jours à compter de la réception de la lettre.

La lettre précise également les conséquences juridiques de l’inexécution de cette obligation.

Si C ne répond pas ou persiste dans son refus après le délai imparti, A et B peuvent prendre des mesures juridiques pour forcer l’exécution de l’obligation.

Introduction d’une action en justice :

À cet effet, A et B engagent une action en justice contre C pour contraindre ce dernier à libérer les fonds promis.

Devant le tribunal, A et B présentèrent tous les documents et les preuves nécessaires pour démontrer que C a une obligation contractuelle de libération des fonds promis et qu’il n’avait pas respecté cette obligation, conformément aux termes de l’accord entre les associés.

Le tribunal étudia attentivement l’affaire et les preuves fournies par A et B, notamment l’accord écrit et la correspondance des parties.

En fin, si le tribunal est convaincu de l’existence d’un contrat et de l’obligation de C de libérer les fonds, il peut émettre une ordonnance d’exécution forcée et contraindre C de s’acquitter de sa dette et libérer les fonds promis.

 

Ce cas pratique illustre la manière dont le droit des sociétés prévoit des mécanismes pour garantir le respect des obligations des associés. L’exécution forcée est l’une de ces mesures, qui permet à un associé lésé de faire valoir ses droits et d’obtenir la réalisation de ce qui a été convenu.

Dans cette optique, le législateur marocain a consacré en droit des sociétés une place importante à l’exécution forcée comme étant une sanction plus adéquate au non-respect des obligations imposées à la société, aux associés et aux dirigeants que les dommages et intérêts, les nullités, et les sanctions pénales. Une  sanction parfaite aussi pour que l’intérêt social prime au sein de la société en utilisant certaines techniques telles que le référé -injonction  de faire et du mandataire ad hoc prévues par certaines lois récentes ayant pour objet la modernisation du droit des sociétés marocain notamment la loi 17-95 sur la société anonyme telle qu’elle a été modifiée et complétée et la loi 5-96 sur la SARL et les autres formes de société).

L’étude de la place et du régime de l’exécution forcée en droit des sociétés marocain conduit à s’interroger sur plusieurs questions, à savoir :

Qu’est-ce que l’exécution forcée ?

Existe-t-il une spécificité de l’exécution forcée en droit des sociétés marocain ?

Est-ce que l’exécution constitue une sanction efficace en cas de non-respect des obligations imposées à la société et à ses membres ? Quels peuvent être les obstacles et les limites rencontrés lors de la mise en œuvre de l’exécution forcée ?

 

  Sens étymologique : L’exécution demeure un concept revêtant plusieurs sens. C’est-à-dire, « l’action d’exécuter quelque chose, de passer à l’acte ou à l’accomplissement ». L’exécution signifie également l’accomplissement de ce qui est convenu. Ainsi, les actes d’exécution signifient le fait d’imposer au débiteur une obligation à exécuter les clauses insérées dans la convention ou les dispositions du jugement.

En droit civil veut dire « l’accomplissement du contrat établi entre le débiteur et le créancier visant à satisfaire ce dernier ». Dans ces conditions, concernant le débiteur obligé d’exécuter une décision, un acte ou sa dette, nous parlons « d’exécution forcée ». L’adjectif « forcée » est l’opposé du « volontaire ». Qui dit forcée dit « ce qui est obligé par la force des hommes ou des choses ». Dès lors que l’obligation intervient pour faire exécuter le terme de contrat, nous pouvons dire qu’elle est « forcée ».

 

 En droit marocain :

• Selon le dahir des obligations et des contrats : L’exécution ne veut ni plus ni moins dire qu’exécuter un contrat. la législation, à l’article 230 du Dahir des obligations et des contrat, précise avec netteté que les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi. Le contrat s’impose aux parties impérativement au moment de sa formation. On parle du principe de la force obligatoire du contrat (le contrat est la loi des parties).

 Dans ce sens, l’exécution forcée est un mécanisme juridique permettant de contraindre une personne à se conformer à une obligation prévue par la loi.

 • Dans le contexte du droit des sociétés, cela concerne principalement les obligations de la société, des associés et des dirigeants

 

En matière civile :

➢ Conditions d’exercice de la responsabilité contractuelle :

• Mise en demeure du créancier par le débiteur

 ➢ Les effets de la responsabilité contractuelle :

Régime Juridique :

1.Exécution en nature :

• Selon le DOC, lorsque le débiteur est en demeure(informé), le créancier a le droit de le contraindre à exécuter son obligation , si l’exécution est possible.

• Si l’exécution n’est pas , le créancier peut demander la résolution du contrat et des dommages-intérêts.

• Lorsque l’exécution n’est plus possible qu’en partie, le créancier peut demander, soit l’exécution du contrat pour la partie qui est encore possible, soit la résolution du contrat, avec dommages-intérêts.

• La réparation en nature s’applique dans l’obligation de ne pas faire et l’obligation de faire quand son exécution est possible

 

2.Exécution par équivalent :

• La détermination du montant des dommages-intérêts est soumise au principe de la réparation intégrale du préjudice.

• Selon le DOC « Les dommages sont la perte effective que  le créancier a éprouvée et le gain dont il a été privé, et qui sont la conséquence directe de l’inexécution de l’obligation.

• Le montant prononcé pour la réparation du préjudice doit couvrir l’intégralité du préjudice subi par le créancier sans le dépasser .

 • Selon le DOC, la réparation prononcée par le juge prend la forme de dommages-intérêts compensatoires et/ou moratoires. ا

• Les dommages-intérêts compensatoires ont pour objet la réparation de l’inexécution ou de la mauvaise exécution des obligations contractuelles du débiteur.

• Pour ce qui est des dommages-intérêts moratoires, leur objet vise la réparation du retard dans l’exécution de l’obligation.

• Le Taux des dommages et intérêts moratoire peut être fixé par les parties dans le contrat, si non c’est le taux légal qui s’applique (fixé par arrêté conjoint).

• En droit des sociétés Marocain : (la loi 17-95 sur la société anonyme telle qu’elle a été modifiée et complétée et la loi 5-96 sur la SARL et les autres formes de société).

 Nous constatons l’apparition de nouvelles dispositions, plus efficaces et plus rapides, leur admission n’est possible que dans le cadre des obligations de donner, il s’agit des techniques du référé injonction de faire sous astreinte, mandataire ad hoc qui vise assurer la survie de la société et à protéger l’intérêt social.

 ➢ NB/Leur efficacité est limitée par la nature de l’obligation.

• Nomination du mandataire ad hoc :

(En s’inspirant du modèle français, le droit marocain envisage également la condition d’urgence dans la nomination du mandataire ad hoc. Ainsi, la législation confère à tout intéressé le droit de demander au tribunal statuant en référé de nommer un mandataire pour la convocation de l’assemblée.

 Dans ce sens, le juge marocain « devra vérifier l’existence de l’urgence conformément à l’article 116 de la loi 17-95 telle qu’elle a été modifiée et complétée ».

• Injonction de faire sous astreinte : le refus de communiquer des documents confère par exemple « le droit à l’actionnaire en cas de refus de demander au Président du tribunal, statuant en référé, d’ordonner à la société, sous astreinte, de communiquer les documents ». 

 

 • Obligation de faire et obligation de ne pas faire : (l’exécution forcée n’est pas acceptée)

Le droit marocain en revanche, dans ses articles 261 et 262 du DOC, ne s’aligne pas sur ces principes français. À ce titre, il mentionne : « L’obligation de faire se résout en dommages-intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur et lorsque l’obligation consiste à ne pas faire, le débiteur est tenu des dommages-intérêts par le seul fait de la contravention ».

Les articles 261 et 262 du DOC interdisent « tout type d’exécution sur la personne de nature à toucher à sa liberté individuelle ».

Les exemples :

• L’apport en industrie : A contrario, l’affectio societatis est susceptible d’entraver l’exécution forcée en nature des obligations statutaires. Par exemple, « l’apport en industrie ou l’obligation de bonne foi ». Dans cette hypothèse, « l’exécution par équivalent se substituera à l’exécution forcée en nature comme mesure d’exception pesant sur le débiteur ».« l’apport en industrie reste spécifique, car ce dernier « n’existe pas en lui-même matériellement, et rien ne permet de garantir que l’associé tiendra sa promesse ». De plus, l’apporteur de service s’engage à fournir « un travail qui du fait de son caractère personnel et successif rend son évaluation difficile »

• L’aide financière volontaire

Même si l’intérêt social est menacé, le droit des sociétés ne justifie pas d’obliger « l’associé à contribuer financièrement et supplémentairement en vertu du principe de l’intangibilité des engagements de l’associé de l’article 1034 du DOC ».

• Le devoir de coopération de l’associé à la société est plus d’ordre moral et financier. Du point de vue de la loyauté, ce dernier « doit respecter la volonté majoritaire et de ne pas adopter d’attitude contradictoire à l’intérêt social. »

• La bonne foi de l’associé et du dirigeant a pour trait commun d’être globalement incompatible avec l’exécution forcée. Il conviendra donc dans ce cas de vérifier l’impossibilité de l’exécution forcée dans le cas d’un conflit d’intérêts non révélé par le dirigeant.

• L’exécution forcée en matière de distribution de dividendes n’est pas envisagée. Par principe, l’assemblée décide du dividende. Néanmoins, le refus de distribuer le dividende voté va à l’encontre de l’intérêt social ; il constitue de ce fait une source conflictuelle entre les parties. L’intervention du tribunal est complexe, car il s’immisce dans la société ; si la décision sociale est irrégulière ou abusive, l’application du droit commun semble effectivement suffisante pour forcer la société à payer les dividendes.

 

En guise de conclusion, l’étude de la place et du régime de l’exécution forcée en droit des sociétés aura pu susciter : l’étonnement, la déception et l’espoir.
 L’étonnement, tout d’abord, parce que l’exécution forcée était, jusqu’à une période récente, une sanction quasi-absente du droit des sociétés alors que la sanction pénale était omniprésente.
 Grande est alors la déception des praticiens, dans la mesure où le droit des sociétés n’a pas appliqué le même régime aux obligations extrastatutaires. Il était pourtant concevable, là aussi, de créer un régime spécifique de l’exécution forcée puisque le droit commun n’était pas suffisant,

 L’espoir, en définitive, peut naître de l’utilisation de la société « contractuelle ».

𝐒igner son premier contrat de travail : 𝐔n guide détaillé

Signer son premier contrat de travail est une étape déterminante dans la vie professionnelle et même si vous êtes sous l’euphorie, il est essentiel de bien comprendre les différentes clauses et conditions pour éviter les mauvaises surprises et s’assurer que vos droits sont protégés. Alors voici un guide détaillé pour vous aider à naviguer dans cette démarche.

Tout d’abord, identifiez le type de contrat que vous allez signer. Il existe principalement deux types de contrats de travail :

  • 𝐂𝐨𝐧𝐭𝐫𝐚𝐭 𝐚̀ 𝐃𝐮𝐫𝐞́𝐞 𝐈𝐧𝐝𝐞́𝐭𝐞𝐫𝐦𝐢𝐧𝐞́𝐞 (𝐂𝐃𝐈) : Ce type de contrat n’a pas de date de fin définie, offrant ainsi une sécurité de l’emploi à long terme. Il peut être rompu par l’employeur ou par vous-même, avec un préavis.
  • 𝐂𝐨𝐧𝐭𝐫𝐚𝐭 𝐚̀ 𝐃𝐮𝐫𝐞́𝐞 𝐃𝐞́𝐭𝐞𝐫𝐦𝐢𝐧𝐞́𝐞 (𝐂𝐃𝐃) : Ce contrat a une durée fixe, avec une date de début et une date de fin précises. Il peut être renouvelé, mais ne doit pas dépasser un certain nombre de renouvellemt au total, sauf exceptions. Assurez-vous de comprendre la raison de l’utilisation d’un CDD et les conditions de renouvellement.

La description du poste est un élément crucial du contrat. Elle doit détailler clairement vos fonctions et responsabilités. Assurez-vous que cette description correspond à ce que vous avez discuté lors de l’entretien. Cela vous évitera de mauvaises surprises en découvrant des tâches qui n’ont pas été mentionnées.

  • 𝐋𝐢𝐞𝐮 𝐝𝐞 𝐓𝐫𝐚𝐯𝐚𝐢𝐥 : Vérifiez l’adresse de votre lieu de travail. Des clauses de mobilité peuvent exister, vous obligeant à travailler dans différents endroits. Assurez-vous de comprendre ces clauses et de les accepter.

Votre contrat doit préciser votre salaire. Voici quelques points à vérifier :

  • 𝐒𝐚𝐥𝐚𝐢𝐫𝐞 𝐛𝐫𝐮𝐭 𝐞𝐭 𝐧𝐞𝐭 : Le salaire brut est celui avant les déductions (impôts, cotisations sociales). Le salaire net est ce que vous recevrez sur votre compte. Assurez-vous de comprendre la différence entre les deux et de vérifier si le salaire proposé correspond à vos attentes.
  • 𝐏𝐫𝐢𝐦𝐞𝐬 𝐞𝐭 𝐛𝐨𝐧𝐮𝐬 : Certaines entreprises offrent des primes de performance, de présence, ou des bonus annuels. Vérifiez les conditions d’attribution de ces primes.
  • 𝐀𝐯𝐚𝐧𝐭𝐚𝐠𝐞𝐬 𝐞𝐧 𝐧𝐚𝐭𝐮𝐫𝐞 : Ces avantages peuvent inclure des tickets-restaurant, une voiture de fonction, une mutuelle d’entreprise, ou des frais de déplacement. Assurez-vous que ces avantages sont clairement indiqués dans le contrat.

Le contrat doit stipuler le nombre d’heures de travail par semaine et vos horaires.

  • 𝐇𝐞𝐮𝐫𝐞𝐬 𝐝𝐞 𝐭𝐫𝐚𝐯𝐚𝐢𝐥 : Vérifiez si vous êtes à temps plein ou à temps partiel. Assurez-vous que les horaires sont compatibles avec vos obligations personnelles.
  • 𝐇𝐞𝐮𝐫𝐞𝐬 𝐬𝐮𝐩𝐩𝐥𝐞́𝐦𝐞𝐧𝐭𝐚𝐢𝐫𝐞𝐬 : Informez-vous sur la politique de l’entreprise concernant les heures supplémentaires et leur rémunération. Elles doivent être payées à un taux majoré ou compensées par des repos.

La période d’essai permet à l’employeur de tester vos compétences et à vous de voir si le poste vous convient. Elle peut être renouvelée une fois.

  • 𝐃𝐮𝐫𝐞́𝐞 : La durée de la période d’essai varie selon le type de contrat et le poste. En général, elle est de deux mois pour les employés, trois mois pour les agents de maîtrise et les techniciens, et quatre mois pour les cadres.
  • 𝐂𝐨𝐧𝐝𝐢𝐭𝐢𝐨𝐧𝐬 𝐝𝐞 𝐫𝐮𝐩𝐭𝐮𝐫𝐞 : Durant cette période, l’employeur ou vous-même pouvez mettre fin au contrat plus facilement, avec un préavis réduit.

Les congés sont un droit important. Votre contrat doit préciser les conditions de prise de congés payés.

  • 𝐂𝐨𝐧𝐠𝐞́𝐬 𝐩𝐚𝐲𝐞́𝐬 : Vous avez droit à un minimum de congés payés par an. Vérifiez si votre contrat prévoit des jours supplémentaires.
  • 𝐉𝐨𝐮𝐫𝐬 𝐝𝐞 𝐑𝐓𝐓 : Si vous travaillez plus d’heures par semaine que la durée légale, vous pouvez avoir des jours de réduction du temps de travail (RTT). Assurez-vous de comprendre comment ils sont attribués et utilisés.

Certains contrats peuvent contenir des clauses spécifiques qui méritent votre attention :

  • 𝐂𝐥𝐚𝐮𝐬𝐞 𝐝𝐞 𝐧𝐨𝐧-𝐜𝐨𝐧𝐜𝐮𝐫𝐫𝐞𝐧𝐜𝐞 : Cette clause peut vous interdire de travailler pour un concurrent après votre départ de l’entreprise, pendant une certaine période et dans une zone géographique déterminée. Assurez-vous qu’elle est justifiée et proportionnelle.
  • 𝐂𝐥𝐚𝐮𝐬𝐞 𝐝𝐞 𝐜𝐨𝐧𝐟𝐢𝐝𝐞𝐧𝐭𝐢𝐚𝐥𝐢𝐭𝐞́ : Elle vous oblige à ne pas divulguer des informations sensibles sur l’entreprise. Cette clause est courante et vise à protéger les intérêts de l’employeur.

En cas de démission ou de licenciement, la durée de préavis à respecter est souvent précisée dans le contrat.

  • 𝐃𝐮𝐫𝐞́𝐞 𝐝𝐮 𝐩𝐫𝐞́𝐚𝐯𝐢𝐬 : La durée du préavis varie selon l’ancienneté et le type de poste. Assurez-vous de connaître cette durée pour pouvoir bien planifier votre départ le cas échéant.

Informez-vous sur les opportunités de formation et d’évolution de carrière au sein de l’entreprise.

  • 𝐎𝐩𝐩𝐨𝐫𝐭𝐮𝐧𝐢𝐭𝐞́𝐬 𝐝𝐞 𝐟𝐨𝐫𝐦𝐚𝐭𝐢𝐨𝐧 : Les entreprises offrent souvent des formations pour développer vos compétences. Vérifiez si le contrat ou l’employeur propose des formations spécifiques.
  • 𝐄́𝐯𝐨𝐥𝐮𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐝𝐞 𝐜𝐚𝐫𝐫𝐢𝐞̀𝐫𝐞 : Demandez quelles sont les possibilités d’évolution au sein de l’entreprise. Un plan de carrière clair peut être un atout important pour votre développement professionnel.

Enfin, avant de signer, assurez-vous que toutes les informations pratiques sont correctes :

  • 𝐂𝐨𝐨𝐫𝐝𝐨𝐧𝐧𝐞́𝐞𝐬 : Vérifiez que vos coordonnées et celles de l’employeur sont correctes.
  • 𝐒𝐢𝐠𝐧𝐚𝐭𝐮𝐫𝐞 : Ne signez le contrat que lorsque vous êtes sûr d’avoir bien compris et accepté toutes les conditions. Prenez le temps de relire le document, et si besoin, demandez conseil à un professionnel, comme un juriste ou un conseiller en ressources humaines.

Ainsi, signer un contrat de travail est-il un acte engageant. Prenez le temps de bien comprendre chaque clause pour être sûr que le poste correspond à vos attentes et que vos droits sont protégés. Ne laissez aucun point sans réponse et n’hésitez pas à poser des questions avant de signer.

Pour tout complément d’informations, n’hésitez pas à me contacter.

Pour toute assistance en la matière, veuillez nous contacter par appel  (+225) 27 23 23 21 64 ou par WhatsApp via ce lien :  https://wa.me/message/VYDJGQP5VMVJL1 

Par Luc KOUASSI

𝑱𝒖𝒓𝒊𝒔𝒕𝒆 𝑪𝒐𝒏𝒔𝒖𝒍𝒕𝒂𝒏𝒕 𝑩𝒊𝒍𝒊𝒏𝒈𝒖𝒆 | 𝑭𝒐𝒓𝒎𝒂𝒕𝒆𝒖𝒓 | 𝑺𝒑𝒆́𝒄𝒊𝒂𝒍𝒊𝒔𝒕𝒆 𝒆𝒏 𝒓𝒆́𝒅𝒂𝒄𝒕𝒊𝒐𝒏 𝒅𝒆 𝒄𝒐𝒏𝒕𝒓𝒂𝒕𝒔, 𝒅’𝒂𝒄𝒕𝒆𝒔 𝒆𝒙𝒕𝒓𝒂𝒋𝒖𝒅𝒊𝒄𝒊𝒂𝒊𝒓𝒆𝒔, 𝒅’𝒂𝒓𝒕𝒊𝒄𝒍𝒆𝒔 𝒋𝒖𝒓𝒊𝒅𝒊𝒒𝒖𝒆𝒔 𝒆𝒕 𝒅𝒆𝒔 𝒒𝒖𝒆𝒔𝒕𝒊𝒐𝒏𝒔 𝒓𝒆𝒍𝒂𝒕𝒊𝒗𝒆𝒔 𝒂𝒖 𝒅𝒓𝒐𝒊𝒕 𝒅𝒖 𝒕𝒓𝒂𝒗𝒂𝒊𝒍 | 𝑷𝒐𝒍𝒊𝒕𝒊𝒔𝒕𝒆 𝒆𝒏 𝒇𝒐𝒓𝒎𝒂𝒕𝒊𝒐𝒏 | 𝑩𝒆́𝒏𝒆́𝒗𝒐𝒍𝒆 𝒉𝒖𝒎𝒂𝒏𝒊𝒕𝒂𝒊𝒓𝒆.

denisjunior690@gmail.com / +225 07 79 57 04 35

La formation professionnelle continue

A. Droit à la formation continue (art. 13.23)

Le travailleur est en droit de bénéficier de la formation professionnelle continue et du perfectionnement professionnel que nécessite l’exercice de son emploi, dans un but de promotion sociale et d’adaptation à l’évolution économique et technologique. La formation professionnelle continue et le perfectionnement professionnel concernent tous les travailleurs (D. n° 96-285, art. 1).

B. Obligations de l’employeur et du travailleur


1. Obligations de l’employeur

L’employeur doit déterminer les actions de formation, de perfectionnement ou le cas échéant, de reconversion professionnelle de ses travailleurs (D. n° 96-285, art. 5). Il lui incombe également de fixer, en liaison avec les organismes de formation professionnelle continue, les critères d’admission à la formation professionnelle continue et au perfectionnement professionnel (D. n° 96-285, art. 2).

2. Obligation du travailleur

L’employeur est en droit d’exiger que son personnel en fonction suive les cours de formation et de perfectionnement professionnels (art. 13.24). Il peut également soumettre le travailleur à un stage de formation professionnelle. Si ce stage est concluant, le travailleur bénéficie des avantages rattachés à la fonction qu’il avait en tant que stagiaire. Cependant, un travailleur ayant déjà effectué un stage de formation professionnelle ne peut être obligé de faire un nouveau stage lorsqu’il est engagé dans un autre établissement du même secteur d’activité et relevant des mêmes fonctions que son précédent stage. Une fois la période d’essai accomplie avec succès, l’intéressé sera confirmé dans son nouvel emploi (art. 13.24).

3. Rupture du contrat de travail pendant la formation

En cas de rupture du contrat de travail à l’initiative du travailleur et sans motif légitime pendant la période de formation, l’employeur est en droit d’obtenir la réparation du préjudice qu’il subit. Tout employeur reconnu complice pourra être tenu au remboursement total ou partiel du coût de la formation (D. n° 96-285, art. 7 et 8).

4. Rupture du contrat de travail à l’issue de la formation

L’employeur et le travailleur peuvent fixer un délai après lequel, postérieurement à la formation, le contrat de travail pourra être rompu à l’initiative de chacune des parties intéressées (D. n° 96-285, art. 9).


C. Exécution de la formation (art. 13.24).

1. Coût

Le coût de la formation est à la charge de l’employeur, qu’elle soit organisée par un organisme spécialisé ou par l’employeur lui-même.

2. Salaire du travailleur

Lorsqu’il est en formation, le travailleur continue à percevoir l’intégralité de son salaire ainsi que les indemnités qui s’y rattachent.

3. Période de formation

Pendant la période de formation, le travailleur bénéficie du temps libre nécessaire, déterminé en fonction du programme de formation ou de perfectionnement (D. n° 96-285, art. 4).

4. Echec à l’examen

Si le cours de formation ou de perfectionnement comporte un examen, l’échec du travailleur à cet examen ne peut être la cause d’un licenciement. Le travailleur est réintégré dans son emploi précédent et bénéficie des avantages qui s’y rattachent (art. 13.24).

A. Définition (art. 13.26)

Le congé de formation est une période de suspension du contrat de travail qui a pour objet de permettre à tout travailleur, au cours de sa vie professionnelle, de suivre à son initiative, et à titre individuel, des actions de formation, indépendamment de sa participation aux stages compris dans le plan de formation de l’entreprise qui l’emploie.

Il peut également être accordé à un salarié pour préparer et passer un examen pour l’obtention d’un titre ou d’un diplôme. Dans les deux cas, le coût de la formation est pris en charge par le travailleur.

B. Critère(s) d’accès et pièces justificatives (art. 13.27)

Pour bénéficier du congé de formation, le travailleur doit justifier d’une ancienneté d’au moins trentesix mois dans l’entreprise ou, le cas échéant, d’un retour de congé de formation depuis au moins trente-six mois.

La demande de congé de formation est adressée par écrit à l’employeur au moins deux mois avant le début de la formation et doit s’accompagner des pièces justificatives.

C. Bénéfice du congé de formation (art. 13.30)

Le bénéfice du congé de formation demandé est de droit, sauf dans le cas où l’employeur estime que cette absence peut avoir des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l’entreprise.

En cas de différend, l’Inspecteur du Travail et des Lois Sociales peut être saisi par l’une des parties. En cas de persistance du désaccord, le contrat de travail peut être légitimement rompu par l’employeur sauf pour le travailleur à rapporter la preuve d’une intention de nuire.

D. Limites

Sauf accord de l’employeur, aucun travailleur ne peut solliciter son droit à congé de formation plus de deux fois, par période de dix ans continue dans l’entreprise (art. 13.27).

Par ailleurs, lorsque plusieurs travailleurs remplissent, dans une même entreprise, les conditions requises pour bénéficier du congé de formation, l’employeur peut différer la satisfaction de certaines demandes (art. 13.28).

E. Durée du congé de formation (art. 13.29)

Le congé de formation correspond à la durée de la formation, sans pouvoir excéder un an s’il s’agit d’une formation continue à temps plein ou 1200 heures s’il s’agit d’une formation constituant un cycle pédagogique comportant des enseignements discontinus ou à temps partiel.

Un accord collectif peut stipuler des durées plus longues.

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Luc KOUASSI

Juriste bilingue en droit privé

Politiste de formation