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Rupture sans raison valable d’un contrat de travail : ce que tout salarié ivoirien doit savoir

En droit du travail ivoirien, la rupture du contrat de travail est strictement encadrée par des règles qui visent à préserver l’équilibre entre les intérêts du salarié et ceux de l’employeur. Si ce dernier dispose d’un pouvoir de direction lui permettant, sous certaines conditions, de mettre fin à la relation contractuelle, il ne peut le faire de manière arbitraire ou discriminatoire. C’est dans ce contexte que s’inscrit la notion de rupture abusive, consacrée à l’article 18.15 du Code du travail[1].

La rupture abusive se définit comme un licenciement dépourvu de motif légitime, ou intervenant en violation des règles légales, notamment celles interdisant les discriminations ou encadrant les licenciements collectifs. Elle englobe également les cas de licenciements prononcés pour des motifs fallacieux, c’est-à-dire lorsque l’employeur invoque un prétexte qui ne correspond pas à la véritable cause de la rupture[2].

Cette notion traduit l’idée selon laquelle le licenciement, bien qu’il constitue un droit de l’employeur, doit reposer sur une cause réelle et sérieuse, exigence empruntée au droit français[3]. En cas de rupture abusive, la loi ivoirienne n’impose pas la réintégration du salarié, mais prévoit le versement de dommages-intérêts, dont le montant est calculé en fonction de l’ancienneté et de la gravité du préjudice subi[4].

L’analyse de ce régime suppose donc d’examiner la définition et les critères de la rupture abusive (I), avant d’étudier les conséquences indemnitaires qui en découlent (II).

Le licenciement est considéré comme abusif lorsqu’il est prononcé sans motif valable, c’est-à-dire lorsqu’il ne repose sur aucune raison objective ou sérieuse. L’article 17.4 du Code du travail encadre les motifs personnels liés à l’insuffisance professionnelle, à la faute ou à l’état de santé du salarié. Mais lorsqu’aucune de ces causes ne peut être établie, ou qu’elles ne présentent pas la gravité suffisante, la rupture devient abusive[5]. Ainsi, le licenciement ne saurait être le résultat d’un simple caprice de l’employeur. La jurisprudence comparée (notamment française et sénégalaise) rappelle que l’existence d’un motif réel (c’est-à-dire objectif et vérifiable) et sérieux (d’une gravité suffisante pour justifier la rupture) constitue une garantie fondamentale pour le salarié[6].

La rupture est également abusive lorsqu’elle viole les dispositions prohibant les discriminations. En Côte d’Ivoire, l’article 4 du Code du travail interdit tout licenciement fondé sur des critères tels que le sexe, l’origine, l’opinion politique, la religion ou l’appartenance syndicale. Tout licenciement motivé par ces éléments est automatiquement nul et qualifié d’abusif[7]. De même, dans le cas des licenciements économiques collectifs, le non-respect de la procédure prévue (consultation des délégués du personnel, information de l’Inspecteur du travail, etc.) entraîne la requalification du licenciement en rupture abusive.

L’article 18.15 mentionne enfin le licenciement pour « faux motif », expression qui prête à confusion. Cette formule doit être comprise comme l’hypothèse dans laquelle l’employeur invoque un prétexte pour masquer la véritable raison de la rupture. Par exemple, invoquer une prétendue insuffisance professionnelle alors que la véritable raison réside dans l’activité syndicale du salarié[8]. En droit français, cette situation correspond à l’absence de cause réelle et sérieuse, et la jurisprudence a souvent sanctionné les employeurs pour de tels détournements de motifs[9]. En droit ivoirien, la juridiction compétente procède à une enquête sur les causes et circonstances de la rupture pour établir la vérité.

Contrairement à d’autres systèmes juridiques, notamment en droit administratif où l’annulation d’une décision entraîne souvent une réintégration, le droit du travail ivoirien ne prévoit pas la réintégration du salarié licencié abusivement. La réparation est exclusivement pécuniaire[10]. Cette orientation s’explique par la volonté d’éviter une reprise forcée de la relation contractuelle, qui risquerait de créer un climat de tension entre les parties et d’être contre-productive[11].

L’article 18.15 du Code du travail dispose que toute rupture abusive ouvre droit à des dommages-intérêts. Le montant de ceux-ci est fixé par le juge, en tenant compte de divers éléments : ancienneté, âge du salarié, situation familiale, circonstances de la rupture et préjudice moral ou matériel subi[12]. La loi distingue deux hypothèses :

  • Lorsque la responsabilité incombe au salarié (ex. rupture abusive de sa part), l’indemnisation due à l’employeur est plafonnée à six mois de salaire.
  • Lorsque la responsabilité incombe à l’employeur, le salarié a droit à une indemnité équivalente à un mois de salaire brut par année d’ancienneté, avec un minimum de trois mois et un maximum de vingt mois[13].

Ce mécanisme assure une graduation équitable : plus le salarié a servi longtemps l’entreprise, plus la compensation est élevée.

Les dommages-intérêts pour rupture abusive sont indépendants du préavis et de l’indemnité de licenciement. Ils constituent une sanction spécifique de l’abus, venant s’ajouter aux autres indemnités éventuellement dues[14]. Cette autonomie est importante car elle souligne que l’indemnisation vise à réparer un préjudice particulier : celui d’avoir été injustement privé d’emploi. Elle confère ainsi un effet dissuasif, incitant les employeurs à respecter scrupuleusement les procédures et les motifs légitimes de licenciement.

La notion de rupture abusive du contrat de travail illustre l’effort du législateur ivoirien pour protéger les salariés contre les licenciements arbitraires, discriminatoires ou fallacieux. En imposant à l’employeur de justifier ses décisions et en sanctionnant les abus par une indemnisation significative, le droit ivoirien s’inscrit dans une logique de justice sociale et de sécurité juridique.

Cependant, l’absence de réintégration automatique peut être critiquée, car elle laisse au salarié uniquement une réparation financière, qui ne compense pas toujours la perte d’emploi dans un marché du travail marqué par un fort chômage. À l’avenir, il serait pertinent que la jurisprudence affine les contours de la notion de « faux motif » et assure une plus grande effectivité du droit à réparation.

La rupture abusive n’est donc pas seulement une question de procédure ou de calcul d’indemnités : elle traduit un enjeu plus large, celui de la dignité du salarié, de sa protection contre l’arbitraire et de la nécessité de concilier la stabilité de l’emploi avec la flexibilité dont ont besoin les entreprises dans un environnement économique mondialisé.

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Me Luc KOUASSI

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[1] Code du travail ivoirien, art. 18.15.

[2] K. Kouadio, « Le licenciement pour faux motif en droit ivoirien », Revue de droit social, 2020, p. 63.

[3] J.-P. Lhernould, Droit social européen et international, PUF, 4e édition, 2021, p. 428.

[4] Cass. soc. fr., 16 déc. 1992, Bull. civ. V, n° 602.

[5] Ibid., art. 17.4.

[6] Cass. soc. fr., 27 nov. 1990, n° 88-42.878 ; M. Despax, Droit du travail, PUF, 2001, 128 p.

[7] Ibid., art. 4.

[8] K. Kouassi, Les discriminations dans la rupture du contrat de travail en Côte d’Ivoire, Mémoire de Master, Université Félix Houphouët-Boigny, 2019, p. 84.

[9] Cass. soc. fr., 18 juill. 2000, Sté Sat, n° 98-41.258.

[10] Ibid., art. 18.15.

[11] F. Gaudu, Droit du travail, Dalloz, 2024, p. 214.

[12] Arrêt n° 46 du 22 janvier 2009 ; Arrêt n° 619 du 20 novembre 2008.

[13] Ibid., art. 18.15.

[14] Convention collective interprofessionnelle ivoirienne, art. 3e et s.

Peut-on me reprocher d’avoir conclu le contrat avec une mauvaise personne ?

En droit des obligations, il est communément admis qu’un contrat doit être conclu entre personnes habilitées à disposer des droits qu’elles entendent transmettre ou à assumer les obligations qu’elles s’engagent à exécuter. Ce principe, parfois exprimé par la maxime latine « nemo plus juris ad alium transferre potest quam ipse habet » pour dire que nul ne peut transférer plus de droits qu’il n’en possède lui-même, constitue une règle de base qui permet d’assurer la cohérence du système juridique et la protection des véritables titulaires de droits[1]. En d’autres termes, si une personne se prétend propriétaire d’un bien alors qu’elle n’est que locataire, elle ne peut transmettre à un tiers plus de droits que ceux dont elle dispose réellement.

Toutefois, si ce principe est fondamental, il n’est pas sans susciter de délicates interrogations pratiques. Que devient la situation d’un cocontractant de bonne foi qui, trompé par les apparences, a cru légitimement conclure avec une personne habilitée à contracter ? Doit-il supporter seul les conséquences de cette erreur alors qu’il n’avait aucune raison de suspecter l’irrégularité de la situation ? Le droit positif ne pouvait rester indifférent à cette difficulté, car l’économie et la stabilité des relations contractuelles exigent que soit protégée la bonne foi des contractants et que l’apparence puisse parfois primer sur la réalité.

C’est ainsi qu’est née et s’est développée la théorie de l’apparence, élaborée par la jurisprudence puis consacrée par le Code civil dans ses dispositions relatives à la représentation. Cette théorie permet, dans certaines circonstances, de considérer comme valables les actes conclus avec une personne qui n’avait pas réellement les pouvoirs qu’elle prétendait détenir, dès lors que le cocontractant était de bonne foi et que l’apparence était suffisamment crédible pour justifier sa confiance.

Toutefois, ce mécanisme correcteur ne saurait être appliqué de manière automatique et généralisée. Il obéit à des conditions strictes, et son champ d’application connaît d’importantes limites, notamment lorsque l’ordre public ou la protection des personnes vulnérables est en cause.

L’étude de cette question suppose donc, dans un premier temps, de rappeler la règle de principe selon laquelle un contrat conclu avec une personne dépourvue de droits ou de pouvoirs est inopposable (I), puis d’exposer la consécration et les conditions de la théorie de l’apparence, qui vient tempérer cette rigueur (II). Il conviendra ensuite d’analyser les limites de ce mécanisme et les critiques qu’il suscite en doctrine comme en jurisprudence (III), avant de proposer un bilan critique.

Le droit civil repose sur une exigence fondamentale de rigueur : nul ne peut transmettre un droit dont il n’est pas titulaire. Par ailleurs, la règle de base est claire : un contrat ne peut produire d’effets qu’entre les parties légitimes. Cette règle, dérivée du droit de propriété et de l’autonomie de la volonté, est consacrée tant par le Code civil français que par le Code civil ivoirien. Elle garantit que le patrimoine des individus ne peut être affecté que par leur propre consentement ou par une disposition expresse de la loi[2].

Ainsi, lorsqu’une personne s’engage au nom d’autrui sans en avoir les pouvoirs, l’acte est en principe inopposable au représenté. L’article 1156 du Code civil français, repris à l’article 1989 du Code civil ivoirien, dispose expressément que l’acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs ne peut engager le représenté[3]. Cette règle protège efficacement celui dont le nom a été indûment utilisé, en évitant qu’il ne soit tenu d’assumer des obligations contractuelles qu’il n’a jamais consenties.

De la même manière, lorsqu’une personne prétend vendre un bien dont elle n’est pas propriétaire, l’acte de vente n’a pas d’effet à l’égard du véritable propriétaire. Ce dernier peut revendiquer son bien et faire échec à toute tentative d’appropriation par un tiers acquéreur. Le contrat conclu avec la « mauvaise personne » est alors privé d’efficacité à l’égard du titulaire légitime des droits.

La logique est claire : il serait contraire aux principes les plus élémentaires du droit de priver un individu de ses droits par le seul fait d’un tiers qui n’était pas habilité à les transférer. Ce principe de rigueur est essentiel pour assurer la protection des droits subjectifs.

La jurisprudence, consciente de la nécessité d’assurer la stabilité et la sécurité des échanges, a toutefois assoupli cette rigueur par l’élaboration de la théorie de l’apparence. Selon ce mécanisme, un contrat conclu avec une personne qui n’avait pas les pouvoirs requis peut néanmoins être considéré comme valable si deux conditions sont réunies : une apparence suffisamment crédible et la bonne foi du cocontractant.

L’apparence doit être suffisamment sérieuse pour justifier la confiance du tiers. Elle peut résulter de divers éléments, tels que le comportement du représenté, l’utilisation de documents officiels (par exemple, le papier à en-tête d’une société), la présence de l’intéressé lors des négociations, ou toute circonstance objective de nature à accréditer la réalité des pouvoirs invoqués.

La bonne foi du tiers est également indispensable. Elle suppose que celui-ci ignorait la véritable situation et qu’il n’avait pas, en l’espèce, à vérifier la réalité des pouvoirs. La jurisprudence a ainsi affirmé que le tiers contractant doit être protégé lorsqu’il a légitimement cru à la réalité des pouvoirs du représentant, sur la base d’indices objectifs et crédibles[4].

La théorie de l’apparence ne saurait être appliquée de manière automatique. La Cour de cassation a rappelé qu’elle ne pouvait prévaloir sur des règles d’ordre public. Ainsi, elle a exclu son application dans les cas où la protection d’un incapable est en jeu. Le législateur ayant entendu protéger les mineurs et les majeurs protégés contre eux-mêmes et contre les tiers, il ne saurait être admis qu’une apparence de capacité puisse être opposée pour justifier la validité d’un acte conclu en violation de cette protection[5].

Plus largement, certains auteurs mettent en garde contre une application trop extensive de la théorie de l’apparence. En faisant prévaloir l’apparence sur la réalité, cette théorie pourrait fragiliser le principe de l’autonomie de la volonté et celui de la vérité des droits. Le professeur Terré a notamment souligné que « le droit ne peut se satisfaire des apparences au risque de déstabiliser la confiance elle-même »[6], rappelant ainsi la nécessité d’un usage mesuré et encadré de ce mécanisme.

Il en résulte que la théorie de l’apparence doit rester une exception. Elle ne peut être invoquée qu’à titre subsidiaire, lorsque l’apparence était objectivement crédible et que le tiers contractant a fait preuve de bonne foi.

Les faits : Après avoir reçu une commande signée de la main de M. ENTREDEUX, sous le papier à en-tête de la société BATITOUT, la société CARRELAGE INVEST lui adressa près d’une tonne de marchandises. Quelques jours plus tard, la société BATITOUT, qui avait payé le prix de la moitié de la marchandise, renvoya l’autre moitié au vendeur en sollicitant, sur le même papier à en-tête, une facture correspondante. La société CARRELAGE INVEST, qui s’en tenait au seul contenu de la commande, réclama le paiement du prix de l’intégralité des marchandises livrées. La société BATITOUT y opposa son refus en prétextant que M. ENTREDEUX n’avait aucun pouvoir pour engager la société BATITOUT.

Analyse juridique : M. ENTREDEUX n’était peut-être pas un fondé de pouvoir. Mais il a pu apparaître aux yeux de la société CARRELAGE INVEST comme le mandataire apparent de la société BATITOUT. En effet, cette personne ayant utilisé le papier à en-tête de la société BATITOUT, le destinataire de la commande a légitimement pu penser qu’il avait le pouvoir de conclure le contrat de vente. Il s’avère en outre que la société BATITOUT a conservé une partie de la marchandise, ce qui laisse supposer qu’elle était au moins intéressée par l’opération. Le juge pourrait donc estimer que la société BATITOUT est contractuellement engagée envers CARRELAGE INVEST, sur le fondement de la théorie de l’apparence.

En définitive, il est possible de reprocher à une personne d’avoir conclu un contrat avec la « mauvaise personne », au sens où son cocontractant n’avait pas les droits ou pouvoirs requis. Toutefois, le droit a introduit un correctif en consacrant la théorie de l’apparence, afin de protéger les contractants de bonne foi et de garantir la stabilité des transactions.

Ce mécanisme, qui repose sur la confiance légitime et la sécurité juridique, permet à la personne abusée d’obtenir le droit qu’elle croyait avoir acquis, à condition que l’apparence soit crédible et que la bonne foi soit établie. Mais cette théorie n’est pas sans limites. Elle ne saurait s’appliquer contre des règles d’ordre public, notamment celles qui protègent les personnes incapables, et son application doit être strictement encadrée afin d’éviter toute insécurité juridique.

L’avenir du droit des obligations invite donc à maintenir un équilibre entre la rigueur des principes et le pragmatisme des solutions. La théorie de l’apparence, utilisée avec mesure, illustre parfaitement cette recherche d’équilibre entre la vérité des droits et la protection de la confiance légitime dans les relations contractuelles.

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[1] F. Terré, Droit civil : Les obligations, Dalloz, 2022, p. 214.

[2] Code civil ivoirien, art. 544 ; Constitution française de 1958, art. 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

[3] Code civil ivoirien, art. 1989 ; Code civil français, art. 1156.

[4] Cass. com., 13 déc. 1962, Bull. civ. IV, n° 544 (arrêt fondateur du mandat apparent).

[5] V. Cass. com., 19 févr. 2002, n° 00-14.610 : utilisation d’un papier à en-tête comme apparence suffisante de pouvoir.

[6] F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil : Les obligations, Dalloz, 2022, p. 425.

Quand l’employeur invoque le motif personnel pour licencier : quelles garanties pour le salarié ?

Le licenciement est sans doute l’un des aspects les plus sensibles du droit du travail, car il touche à la stabilité professionnelle du salarié et, par ricochet, à son existence sociale et économique. En Côte d’Ivoire, comme dans la plupart des pays inspirés du droit romano-germanique, le licenciement est strictement encadré par la loi afin de prévenir les abus.

Parmi les différents types de licenciement, le licenciement pour motif personnel occupe une place particulière. Contrairement au licenciement économique, qui est lié aux difficultés de l’entreprise, le licenciement pour motif personnel repose sur des considérations propres au salarié : son comportement, son aptitude ou son état de santé. L’article 17.4 du Code du travail ivoirien en définit les contours en prévoyant des règles générales mais aussi des cas spécifiques, notamment en cas de maladie de courte ou de longue durée[1].

Ce type de licenciement illustre la recherche d’un équilibre entre deux impératifs contradictoires : la protection du salarié, en tant que partie faible de la relation contractuelle, et la reconnaissance du pouvoir de gestion de l’employeur, qui doit pouvoir adapter son entreprise aux réalités opérationnelles[2].

Ainsi, l’étude du licenciement pour motif personnel impose une double approche : l’analyse des motifs pouvant justifier la rupture du contrat (I), puis l’examen des règles procédurales qui encadrent la mise en œuvre de ce licenciement (II).

En droit ivoirien, le licenciement pour motif personnel se fonde sur des éléments relatifs à la personne du salarié. L’article 17.4 du Code du travail prévoit que l’inaptitude, l’insuffisance professionnelle, l’état de santé ou encore la faute peuvent constituer des causes réelles et sérieuses de licenciement[3]. Il ne s’agit pas d’une faculté discrétionnaire laissée à l’employeur : la jurisprudence et la doctrine insistent sur la nécessité que les faits invoqués soient objectifs, vérifiables et suffisamment graves pour justifier la rupture. La cause doit être réelle, c’est-à-dire fondée sur des faits existants et exacts, et sérieuse, c’est-à-dire d’une gravité telle qu’elle rende impossible le maintien du salarié dans l’entreprise[4].

Cette exigence de cause réelle et sérieuse est un principe d’ordre public social, qui vise à protéger le salarié contre l’arbitraire patronal. En ce sens, la doctrine ivoirienne rejoint les analyses développées en droit français, où la jurisprudence de la Cour de cassation a toujours exigé cette double condition[5].

Lorsque le salarié est victime d’une maladie entraînant une absence prolongée, la loi prévoit un mécanisme protecteur. Pendant les six premiers mois d’absence, le contrat est suspendu et le salarié bénéficie d’une protection renforcée[6]. Cependant, si à l’expiration de ce délai le salarié demeure inapte à reprendre le travail, l’employeur peut procéder à un licenciement. Mais ce licenciement n’est légitime que si certaines conditions strictes sont respectées :

  • l’impossibilité d’aménager le poste de travail en fonction des capacités résiduelles du salarié ;
  • l’impossibilité de proposer un reclassement sur un autre emploi disponible et compatible ;
  • le refus explicite du salarié d’une proposition de reclassement ;
  • ou encore la déclaration d’inaptitude totale par le médecin du travail[7].

Ce régime traduit une volonté d’équilibre : protéger le salarié malade, sans bloquer le fonctionnement de l’entreprise.

Lorsque l’absence se prolonge au-delà de douze mois, on parle de maladie de longue durée. Dans ce cas, l’article 18.3 du Code du travail prévoit que l’employeur peut mettre fin au contrat si le salarié reste inapte à reprendre son emploi[8]. Là encore, l’employeur doit justifier de l’impossibilité d’aménagement ou de reclassement. À défaut, le licenciement est abusif. Le rôle du médecin du travail est central : c’est lui qui détermine si le salarié est inapte à tout emploi, ce qui fonde juridiquement la décision de rupture[9].

La procédure est un élément essentiel de la régularité du licenciement. L’article 17.4 du Code du travail impose que le licenciement soit notifié par écrit au salarié. La lettre doit être adressée par recommandé avec accusé de réception, ou remise en main propre contre décharge, en présence des délégués du personnel ou de témoins[10]. La lettre de licenciement doit être motivée avec précision. Elle doit indiquer les motifs de la rupture, l’identité complète de l’employeur et du salarié, ainsi que la date de prise d’effet de la rupture. Une lettre imprécise ou vague expose l’employeur à la nullité de la procédure[11].

Concomitamment à la notification au salarié, l’employeur doit informer par écrit l’Inspecteur du Travail et des Lois sociales, en lui transmettant les mêmes informations. Ce contrôle administratif a une double fonction : garantir une traçabilité et permettre un éventuel recours du salarié[12]. Le non-respect de cette exigence entraîne l’imputabilité de la rupture à l’employeur, conformément à l’article 33 de la Convention collective interprofessionnelle.

Lorsque le licenciement repose sur une faute disciplinaire, il doit suivre la procédure disciplinaire : convocation du salarié, entretien préalable, respect du contradictoire et délai de réflexion avant notification[13]. Cette articulation entre procédure disciplinaire et licenciement reflète l’idée que le salarié doit toujours avoir la possibilité de présenter sa défense. L’absence de respect du contradictoire entraîne la nullité du licenciement, même si la faute est avérée[14].

Le licenciement pour motif personnel, tel qu’encadré par le Code du travail ivoirien, apparaît comme une illustration de l’équilibre fragile entre deux logiques : la protection du salarié et la gestion des impératifs économiques de l’entreprise.

En exigeant une cause réelle et sérieuse, et en imposant une procédure stricte, la loi ivoirienne empêche l’arbitraire patronal. Cependant, elle n’interdit pas le licenciement lorsqu’il est légitime, notamment en cas d’inaptitude persistante ou de faute grave.

Inspiré du droit français mais adapté aux réalités locales, ce régime contribue à sécuriser les relations de travail. Son efficacité dépendra néanmoins de la capacité des juridictions sociales à sanctionner les abus et à renforcer une jurisprudence claire.

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[1] Code du travail ivoirien, art. 17.4.

[2] J.-P. Lhernould, Droit du travail : Relations individuelles, Edito, 2003, p. 245.

[3] Code du travail ivoirien, art. 17.4.

[4] K. Kouadio, « Le licenciement abusif en droit ivoirien », RID, 2020, p. 48.

[5] Cass. soc., 27 sept. 2007, n° 06-43.867 ; F. Favennec-Héry, Notion de sanction disciplinaire, Cass. Soc. 18 mars 1992, JCP E, n°11, 18 mars 1993, II, p. 412.

[6] Code du travail ivoirien, art. 16.7.

[7] Décret n° 96-198 du 7 mars 1996, art. 13.

[8] Code du travail ivoirien, art. 18.3.

[9] Cass. soc. française, 12 janv. 1999, n° 96-44.193.

[10] Code du travail ivoirien, art. 17.4.

[11] Cass. soc. française, 29 nov. 1990, n° 88-40.121.

[12] Convention collective interprofessionnelle, art. 33.

[13] Code du travail ivoirien, art. 17.4 et suiv.

[14] M. Despax, Droit du travail, PUF, 2001, 128 p.

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  6. La responsabilité administrative pour défaut de sécurité publique.
  7. La régulation juridique des entreprises privées de sécurité.
  8. Les fouilles corporelles et la dignité humaine : étude comparée.
  9. La protection juridique des lanceurs d’alerte en matière de sécurité publique.
  10. Le maintien de l’ordre public et l’usage de la force : normes internationales et pratiques nationales.

  1. La souveraineté numérique des États africains : enjeux et limites.
  2. La protection des infrastructures critiques face aux cyberattaques.
  3. Le cadre juridique de la cyberdéfense nationale.
  4. La protection des systèmes électoraux contre le piratage.
  5. La responsabilité de l’État pour défaillance en cybersécurité.
  6. La cybersurveillance publique et les libertés fondamentales.
  7. La régulation des fake news en matière de sécurité publique.
  8. La coopération interétatique contre la cybercriminalité.
  9. La cybersécurité des administrations publiques : étude critique.
  10. Les cyberattaques comme menace à la sécurité nationale : cadre juridique international.

  1. La politique culturelle nationale et la construction identitaire.
  2. La protection des expressions culturelles traditionnelles par le droit public.
  3. La régulation juridique des festivals et manifestations culturelles.
  4. La gouvernance publique des institutions culturelles.
  5. La diplomatie culturelle et le droit international public.
  6. La responsabilité publique pour dégradation du patrimoine culturel.
  7. Les droits culturels comme droits fondamentaux.
  8. La fiscalité culturelle et l’accès aux biens culturels.
  9. La régulation des industries culturelles numériques.
  10. La protection juridique du patrimoine immatériel africain.

  1. La responsabilité administrative pour absence de prévention des catastrophes prévisibles.
  2. La relocalisation des populations sinistrées : cadre juridique et droits fondamentaux.
  3. La gouvernance des risques sismiques : étude comparative.
  4. Le droit à l’information des populations exposées aux risques naturels.
  5. L’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles.
  6. La planification urbaine et la prévention des inondations.
  7. Le rôle des collectivités territoriales dans la gestion des catastrophes.
  8. L’alerte précoce et la responsabilité administrative.
  9. La protection des populations vulnérables face aux catastrophes naturelles.
  10. Le cadre juridique international de la gestion des catastrophes.

  1. La régulation juridique des services universels de télécommunication.
  2. La protection des données personnelles dans les services publics numériques.
  3. La neutralité du net et les services publics numériques.
  4. Les obligations de service public des opérateurs télécoms.
  5. La cybersécurité des communications publiques : étude critique.
  6. Le rôle de l’ARCEP dans la régulation des télécommunications.
  7. Les communications électroniques et la souveraineté nationale.
  8. La régulation juridique des plateformes numériques publiques.
  9. La fracture numérique et les obligations des États.
  10. Les télécommunications d’urgence et la responsabilité publique.

  1. Les aides d’État et la politique de concurrence dans l’espace UEMOA.
  2. La régulation des monopoles publics et la libéralisation des marchés.
  3. La commande publique comme outil de politique économique.
  4. La politique industrielle nationale et le droit public économique.
  5. Les ententes illicites dans les marchés publics : prévention et répression.
  6. La gouvernance économique publique et la lutte contre la corruption.
  7. La fiscalité et la justice distributive en droit public économique.
  8. Les services publics marchands et la régulation concurrentielle.
  9. La politique de développement économique durable et le droit public.
  10. La régulation des investissements étrangers par le droit public.

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Suis-je obligé de signer personnellement le contrat pour lequel je souhaite m’engager ?

En droit des obligations, la signature constitue traditionnellement l’expression la plus claire et la plus solennelle du consentement. Elle scelle l’accord des parties et marque leur volonté ferme de s’engager juridiquement. Le droit positif français[1], tout comme le droit positif ivoirien[2], rappelle que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Or, la signature demeure l’instrument privilégié de cette formation.

Cependant, l’évolution des pratiques contractuelles, notamment dans le monde des affaires, a mis en lumière une réalité incontournable : il n’est pas toujours possible, matériellement ou juridiquement, que la personne qui s’engage signe elle-même le contrat. Le droit a donc développé divers mécanismes permettant à une personne de conclure valablement un contrat sans apposer directement sa signature. La représentation joue ici un rôle essentiel.

Mais ce mécanisme, bien que très utile, n’est pas sans limites. Pour être valable, la représentation doit respecter certaines conditions strictes, tant dans la détermination des pouvoirs accordés au représentant que dans les relations avec les tiers.

Cette étude vise donc à répondre à la question suivante : dans quelles hypothèses peut-on valablement être engagé sans avoir signé personnellement un contrat ? Pour y répondre, nous envisagerons dans un premier temps le rôle de la représentation dans la conclusion des contrats (I), avant d’analyser les limites et les garanties entourant ce mécanisme (II), puis terminer par un exemple pratique (III).

Le droit des contrats reconnaît la possibilité pour toute personne de déléguer à autrui le soin de signer un contrat en son nom. Ce mécanisme est encadré par les règles du mandat[3]. Par le mandat, une personne (le mandant) confère à une autre (le mandataire) le pouvoir de conclure un acte juridique en son nom et pour son compte.

Le mandataire, en apposant sa signature, engage directement le mandant. Ce dernier est lié par l’acte, comme s’il l’avait signé lui-même. La jurisprudence a constamment rappelé que l’effet principal du mandat est de produire des effets juridiques dans le patrimoine du représenté, sans qu’il soit nécessaire que celui-ci ait matériellement signé l’acte[4].

Ce mécanisme est particulièrement répandu dans la vie des affaires. Ainsi, un chef d’entreprise peut confier à un directeur commercial le soin de signer des contrats de fourniture. L’entreprise (personne morale) est engagée, même si son dirigeant n’a pas apposé sa signature.

Outre le mandat volontaire, il existe des cas où la loi ou le juge impose une représentation. C’est le cas pour les mineurs ou les majeurs protégés : le tuteur ou le curateur est habilité à conclure les actes en leur nom. Ici encore, l’absence de signature personnelle de l’intéressé ne remet nullement en cause la validité du contrat.

De même, dans le cas des personnes morales (sociétés, associations), celles-ci ne pouvant signer elles-mêmes, elles agissent nécessairement par l’intermédiaire de leurs représentants légaux (gérant, président, administrateur).

Pour que la représentation produise pleinement ses effets, encore faut-il que le tiers contractant sache que le signataire agit pour le compte d’autrui. À défaut, il pourrait légitimement penser contracter avec le représentant lui-même. C’est pourquoi la jurisprudence exige que le représentant précise, lors de la signature, qu’il agit « au nom et pour le compte » du représenté[5].

Le représentant ne peut pas agir au-delà des pouvoirs qui lui ont été conférés. S’il dépasse les limites fixées, le contrat n’engage pas le représenté, sauf ratification ultérieure. Dans ce cas, c’est le représentant qui peut voir sa responsabilité personnelle engagée pour avoir outrepassé son mandat[6].

L’illustration jurisprudentielle est abondante[7]. Plus loin nous traiterons l’affaire de Mme INVESTIE, où le mandataire (la banque) avait acheté des actions en dehors des conditions de temps fixées par le mandat. Un tel dépassement rend l’acte inopposable au mandant. Le contrat n’est donc pas valablement formé et la banque pourrait être contrainte de rembourser la somme investie.

Au-delà du strict respect des pouvoirs, la jurisprudence impose au mandataire une obligation de loyauté et de diligence. En particulier, les établissements bancaires ou financiers ont une obligation d’information et de conseil envers leurs clients profanes. Ainsi, une banque qui fait exécuter des opérations risquées sans informer son client peut engager sa responsabilité civile.

Cette exigence découle du principe de bonne foi dans l’exécution des contrats[8].

Pour éviter que les tiers ne soient victimes d’une incertitude juridique, le droit reconnaît la « théorie de l’apparence ». Lorsqu’un tiers a légitimement pu croire que le représentant disposait des pouvoirs nécessaires, le représenté peut être engagé malgré l’absence de véritable pouvoir. Cette théorie, construite par la jurisprudence, permet de préserver la sécurité des échanges et la confiance légitime des contractants[9].

  • Exposé du cas : Mme INVESTIE vient d’ouvrir un compte auprès de la banque INATTENTIVE. Disposant d’une importante somme d’argent depuis le décès de son père, celle-ci s’est mise en tête de la faire entièrement fructifier en bourse. Après quelques hésitations, elle finit par donner mandat à sa banque d’acheter pour son compte 100 000 actions de la société ABOUDECOURSE, récemment cotée sur le marché réglementé. Mme INVESTIE précisa à la banque que son ordre n’était valable qu’à la fin du mois et que les actions considérées ne devaient être achetées qu’au moment où le prix du titre passerait sous le seuil des 10.000 FCFA. Le premier jour du mois suivant, les actions furent achetées par la banque au moment où le prix de l’action passa sous le seuil souhaité. Malheureusement, à la fin de la journée, le prix de l’action n’était plus que de 2.000 FCFA. Très déstabilisée, Mme INVESTIE demanda à la banque s’il y avait un moyen pour elle de récupérer une partie de son investissement. La banque lui répondit que cette baisse aussi brutale du cours était prévisible, que Mme INVESTIE avait bien naïvement acheté les actions en cause et qu’en conséquence la restitution du prix de vente était exclue.
  • Analyse: Le mandataire (la banque ici) ne doit pas outrepasser les limites de son mandat. En l’espèce, la banque a acheté des actions pour le compte de sa cliente après la date limite de son mandat puisque l’opération a été effectuée « le premier jour du mois suivant » alors que le mandant (Mme INVESTIE) avait clairement spécifié que l’ordre d’achat n’était valable qu’à la fin du mois. La vente n’a donc pas pu être valablement formée et la banque pourrait bien être contrainte de lui rembourser la totalité de la somme ayant servi à l’acquisition des actions. En outre, la banque a acheté les actions de la société ABOUDECOURSE alors que la chute du marché était « prévisible ». Elle a d’ailleurs elle-même souligné la « naïveté » du comportement de sa cliente. Or, les banques sont des professionnels de la finance et ont, à ce titre, une obligation d’information à l’égard de leurs clients profanes. Il est manifeste ici que la banque a violé cette obligation. La banque pourrait donc bien engager sa responsabilité civile à l’égard de Mme INVESTIE.

La signature personnelle, bien qu’elle demeure l’expression privilégiée du consentement contractuel, n’est pas une condition indispensable pour être valablement engagé. Le droit a su aménager des mécanismes efficaces de représentation, qu’ils soient volontaires, légaux ou judiciaires, afin de répondre aux nécessités de la vie économique et sociale.

Toutefois, cette délégation de pouvoir n’est pas sans limites : le représentant doit agir dans le cadre précis de ses pouvoirs, avec loyauté et bonne foi, tandis que le tiers contractant doit être vigilant sur l’étendue de ces pouvoirs.

La question posée révèle finalement un équilibre subtil : permettre la fluidité des relations contractuelles sans fragiliser la sécurité juridique. Cet équilibre repose sur trois piliers : la précision des pouvoirs conférés au représentant, la bonne foi dans leur exercice et la protection des tiers de bonne foi.

Ainsi, la signature personnelle, si elle reste le mode naturel d’expression de la volonté, n’est plus qu’une modalité parmi d’autres. Ce n’est pas tant l’apposition matérielle de la signature qui compte que l’assurance que le contrat traduit bien la volonté réelle et éclairée de la personne engagée.

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Me Luc KOUASSI

Juriste Consultant Polyglotte| Formateur | Spécialiste en rédaction de contrats, d’actes extrajudiciaires, d’articles juridiques et des questions relatives au droit du travail | Politiste | Bénévole humanitaire.

denisjunior690@gmail.com / +225 07 795 704 35 / +90 539 115 55 28


[1] Code civil français, art. 1103.

[2] Code civil ivoirien, art. 1134, al. 1.

[3] Code civil français, art. 1984 et s. ; Code civil ivoirien, art. 1984 et s.

[4] F. Terré, Y. Lequette, Droit civil : Les obligations, Dalloz, 2022, p. 211.

[5] Cass. civ. 1re, 10 févr. 1987, n°85-14.205.

[6] Code civil français, art. 1997 et 1998 ; Code civil ivoirien, art. 1997 et 1998.

[7] Cass. com., 13 déc. 2011, n°10-25.553 (responsabilité du mandataire bancaire).

[8] Code civil français, art. 1104 ; Code civil ivoirien, art. 1134, al. 3.

[9] J.-L. Aubert et E. Savaux, Droit civil : Les obligations – L’acte juridique, 18e édition, Sirey, 2024, p. 456.

La Société Civile Immobilière (SCI) et la Société Coopérative Simplifiée (SCOOP) en droit ivoirien : entre gestion patrimoniale et développement solidaire

Le droit des affaires en Afrique de l’Ouest, et en particulier en Côte d’Ivoire, offre un éventail de structures juridiques adaptées aux besoins des investisseurs, des entrepreneurs et des particuliers. Parmi celles-ci, deux formes retiennent particulièrement l’attention : la Société Civile Immobilière (SCI) et la Société Coopérative Simplifiée (SCOOP).

La première est un outil privilégié pour l’acquisition, la gestion et la transmission des biens immobiliers, tandis que la seconde s’impose comme un instrument de développement collectif et solidaire, notamment dans les secteurs agricole et commercial.

Ces deux formes sociétaires trouvent leur fondement dans le droit uniforme OHADA, respectivement à travers l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêtéconomique pour la SCI, et l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives pour la SCOOP. Elles illustrent deux dynamiques complémentaires : la sécurisation patrimoniale d’une part, et la mutualisation économique et sociale d’autre part.

La Société Civile Immobilière (SCI) est une société civile dont l’objet principal est la détention et la gestion d’un patrimoine immobilier. Elle ne peut pas exercer d’activités commerciales par nature, sauf si ses statuts l’y autorisent expressément et qu’elle se conforme aux exigences fiscales qui en découlent.

En droit ivoirien, la SCI se rattache aux dispositions générales de l’Acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales qui encadre les sociétés civiles, tout en bénéficiant d’un traitement spécifique lié à son objet immobilier. Les dispositions de l’AUSCGIE sont-elles applicables à une Société Civile Immobilière?  La CCJA, saisie d’un recours en cassation d’un arrêt de la Cour d’Appel d’Abidjan doit statuer sur la question. Aux termes de l’article 6 alinéa 1 l’AUSCGIE, « Le caractère commercial d’une société est déterminé par sa forme ou par son objet. »[1]. Il est bien vrai qu’en l’espèce, la dénomination de la société dont s’agit comporte le terme « civil ». Cependant, le caractère commercial d’une société n’étant pas uniquement déterminé par sa forme, la CCJA[2] procèdera également à une analyse de son objet social à la lumière des statuts. Elle constate que, la société a entre autres pour objet, l’acquisition, l’exploitation, la gestion et la vente de tous biens et droits immobiliers et de parts de Société immobilière, le cautionnement hypothécaire de ses membres ou des acquéreurs de ses biens fonciers etc[3]. Estimant au regard de ce qui précède qu’il s’agit là des actes de commerce au sens de l’article 3 de l’AUDCG, la Haute juridiction retient in fine que, ladite société est soumise aux dispositions de l’AUSCGIE. 

L’intérêt de la SCI est de permettre à plusieurs personnes de se regrouper pour acquérir un immeuble, le gérer ensemble et, le cas échéant, en organiser la transmission. Ainsi, plutôt que de procéder à une indivision, source fréquente de conflits familiaux ou successoraux, les associés détiennent des parts sociales, lesquelles peuvent être transmises ou cédées plus facilement que la propriété directe d’un bien immobilier.

La SCI est adaptée à différents profils. Elle intéresse tout d’abord les familles qui souhaitent organiser la gestion d’un patrimoine immobilier commun, en évitant les tensions liées à l’indivision. Elle est également prisée des investisseurs, commerçants et entrepreneurs désireux de sécuriser leurs actifs immobiliers. Les professionnels de l’immobilier, tels que les agents ou les sociétés spécialisées, peuvent y recourir pour structurer leurs activités. Enfin, elle s’adresse aux investisseurs étrangers, car aucune disposition légale n’impose la présence d’un associé ivoirien ou d’un gérant national.

Elle offre une souplesse juridique et fiscale appréciable. Elle permet, d’abord, de choisir entre une SCI familiale ou de gestion, tournée vers la location ou l’administration d’un patrimoine, et une SCI commerciale, orientée vers des activités plus dynamiques comme la construction-vente ou la location meublée. Cette flexibilité est un atout majeur pour les investisseurs.

De plus, la SCI facilite l’accès au crédit bancaire, car les établissements financiers privilégient souvent le financement de structures sociétaires stables plutôt que d’individus isolés. Elle constitue aussi un outil efficace de transmission patrimoniale : les parts sociales peuvent être cédées progressivement aux héritiers, permettant d’éviter les blocages successoraux. Enfin, la législation ivoirienne et le droit OHADA autorisent la constitution de SCI détenues par des holdings étrangères, ce qui en fait un instrument attractif pour l’investissement international.

Toutefois, la SCI n’est pas exempte de contraintes. D’un point de vue juridique, son objet étant civil, elle ne peut exercer une activité commerciale qu’à titre accessoire ou dans des conditions strictes, sous peine de requalification. Sur le plan pratique, la tenue d’assemblées générales et l’établissement de comptes réguliers sont obligatoires, même dans les petites SCI familiales, ce qui impose une rigueur administrative. Enfin, les SCI à caractère commercial, notamment celles tournées vers la construction-vente, doivent s’acquitter d’obligations fiscales plus lourdes, ce qui peut dissuader les petits investisseurs.

La Société Coopérative Simplifiée (SCOOP ou SCOOPS) est une société régie par l’Acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés coopératives[4]. Elle constitue un regroupement autonome de personnes qui s’associent volontairement afin de répondre collectivement à leurs besoins économiques, sociaux et culturels. La particularité de la SCOOP réside dans son mode de gestion démocratique : chaque membre, quelle que soit sa participation financière, dispose généralement d’une voix dans les assemblées, conformément au principe « un homme, une voix ».

Elle s’adresse principalement aux agriculteurs et producteurs, ce qui explique son fort développement en Côte d’Ivoire, notamment dans le secteur agricole (cacao, café, anacarde, hévéa, palmier à huile). Elle concerne aussi les commerçants, artisans et entrepreneurs qui souhaitent mutualiser leurs moyens de production, de distribution ou de financement. Des personnes physiques comme morales peuvent constituer une SCOOP, à condition d’être au moins cinq membres fondateurs. La constitution de la société coopérative simplifiée est décidée par une assemblée générale constitutive. Elle est désignée par une dénomination sociale qui doit être immédiatement précédée ou suivie en caractères lisibles, de l’expression « Société Coopérative Simplifiée » et du sigle « SCOOPS ». Par ailleurs, la société coopérative simplifiée est tenue de requérir son immatriculation au Registre des Sociétés Coopératives dans les conditions définies par l’Acte Uniforme relatif au droit des sociétés coopératives[5].

La SCOOP présente plusieurs avantages majeurs. Contrairement aux sociétés commerciales, elle ne connaît pas de limitation du nombre d’adhérents, ce qui permet de rassembler de larges communautés autour d’un projet commun. Elle bénéficie aussi d’une fiscalité plus avantageuse, dans la mesure où son but n’est pas strictement lucratif mais orienté vers la satisfaction des besoins de ses membres. Sur le plan organisationnel, la gestion démocratique favorise une implication directe des coopérateurs et assure une meilleure transparence. Enfin, la SCOOP est un outil de développement communautaire, contribuant à l’amélioration des conditions de vie et de travail des membres.

Par ailleurs, la société coopérative avec conseil d’administration est constituée entre quinze personnes physiques ou morales au moins. Elle est désignée par une dénomination sociale qui doit être immédiatement précédée ou suivie, en caractères lisibles, de l’expression « Société Coopérative avec Conseil d’Administration » et du sigle « COOP-CA ».

Cependant, la SCOOP n’échappe pas à certaines difficultés. La constitution exige la présence d’au moins cinq personnes, ce qui peut compliquer les démarches pour des projets de petite taille. Par ailleurs, la prise de décision peut être ralentie en raison du nombre élevé d’adhérents, ce qui peut affecter l’efficacité opérationnelle. Enfin, la réussite d’une SCOOP dépend largement de la formation et de la compétence de ses dirigeants. Dans bien des cas, le manque de connaissances en gouvernance coopérative constitue un obstacle à la pérennité des structures coopératives.

La SCI et la SCOOP répondent à des besoins différents mais complémentaires. La première vise la gestion patrimoniale et immobilière, tandis que la seconde favorise la mutualisation des efforts économiques et sociaux. Dans les deux cas, il s’agit de structures accessibles aussi bien aux nationaux qu’aux étrangers, en phase avec la dynamique d’intégration économique de l’espace OHADA.

Elle est particulièrement adaptée aux investisseurs et aux familles désireuses de structurer leur patrimoine immobilier, alors que la SCOOP constitue une réponse collective à des besoins de production, de commercialisation et de financement. Leur succès repose cependant sur une bonne connaissance des textes OHADA, ainsi que sur un accompagnement juridique et fiscal approprié.

En définitive, la Société Civile Immobilière (SCI) et la Société Coopérative Simplifiée (SCOOP) occupent une place importante dans l’architecture juridique et économique ivoirienne. La première favorise la sécurisation et la transmission du patrimoine immobilier, tandis que la seconde promeut une économie solidaire et participative.

Dans un contexte où la Côte d’Ivoire cherche à renforcer son cadre des affaires et à attirer davantage d’investissements, ces deux structures offrent des opportunités considérables, à condition de maîtriser leur régime juridique et leurs implications fiscales. Pour cela, l’accompagnement par un cabinet spécialisé tel que LDJ SARL s’avère indispensable, afin de garantir une mise en œuvre conforme aux exigences légales et efficace sur le plan opérationnel.

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Luc KOUASSI

Juriste Consultant Polyglotte| Formateur | Spécialiste en rédaction de contrats, d’actes extrajudiciaires, d’articles juridiques et des questions relatives au droit du travail | Politiste | Bénévole humanitaire


[1] Article 6 Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique.

[2] CCJA, 3e Ch., no 353/2020 du 26 Novembre 2020 ; Décision attaquée : Arrêt N°412 CIV/19 rendu le 28 juin 2019 par la Cour d’appel d’Abidjan.

[3] CCJA, 1ère Ch., no 168/2020 du 14/05/2020 ; CCJA.

[4] Acte Uniforme relatif au droit des sociétés coopératives, Articles 204 et suivants.

[5] Acte Uniforme relatif au droit des sociétés coopératives, Articles 74 à 77.

Se former tout au long de sa carrière en Côte d’Ivoire : un droit pour chaque salarié

La formation professionnelle constitue aujourd’hui un instrument incontournable de la politique sociale et économique des États. Dans un monde en constante mutation, marqué par les avancées technologiques, la globalisation des échanges et la transformation des métiers, la formation continue est devenue un facteur stratégique de compétitivité pour les entreprises et un levier de sécurisation professionnelle pour les travailleurs. En Côte d’Ivoire, cette dynamique se traduit par une reconnaissance légale du droit à la formation professionnelle continue, encadrée par le Code du travail (art. 13.23 à 13.31) et par des textes réglementaires, notamment le décret n° 96-285 du 3 avril 1996 relatif à la formation professionnelle.

L’esprit de ces textes s’inscrit dans une logique double. D’une part, la formation continue permet aux salariés d’adapter leurs compétences aux évolutions économiques et technologiques, évitant ainsi l’obsolescence professionnelle. D’autre part, elle confère à l’entreprise la possibilité d’améliorer sa productivité et sa compétitivité par le biais de travailleurs qualifiés, flexibles et innovants. La formation professionnelle continue constitue donc un investissement socialement utile, bénéficiant à la fois au salarié, à l’entreprise et, plus largement, à l’économie nationale.

Cet article se propose d’analyser le régime juridique de la formation professionnelle continue en droit ivoirien, en mettant en lumière les droits et obligations qu’elle génère pour l’employeur et le travailleur, les mécanismes d’exécution et de financement, ainsi que le dispositif spécifique du congé de formation.

L’article 13.23 du Code du travail ivoirien consacre expressément le droit de tout travailleur à bénéficier d’une formation professionnelle continue et du perfectionnement nécessaire à l’exercice de son emploi, dans un objectif de promotion sociale et d’adaptation aux évolutions économiques et technologiques[1]. Ce droit est universel : il concerne tous les travailleurs, quelle que soit leur catégorie professionnelle, leur ancienneté ou leur secteur d’activité.

Aussi, le décret n° 96-285 du 3 avril 1996 vient-il préciser que la formation continue s’adresse à l’ensemble des travailleurs et vise notamment la reconversion professionnelle, la spécialisation ou l’acquisition de nouvelles compétences[2]. Ainsi, la loi ne se limite pas à une logique d’adaptation à l’emploi occupé, mais embrasse une perspective plus large d’évolution professionnelle.

Par ailleurs, le droit ivoirien n’est pas isolé dans ce domaine. On retrouve des dispositions similaires dans d’autres législations, notamment en France, où la loi du 4 mai 2004 a affirmé que la formation professionnelle constitue « une obligation nationale »[3]. De même, les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT), notamment la Convention n° 142 sur le développement des ressources humaines (1975), insistent sur la nécessité pour les États de promouvoir la formation continue tout au long de la vie[4].

L’inspiration ivoirienne dans ce domaine illustre une volonté d’arrimer le droit national aux standards internationaux, tout en l’adaptant aux réalités locales, marquées par une économie en transition et une forte demande de qualification.

L’employeur est au cœur du dispositif de formation professionnelle continue. Le décret n° 96-285 lui impose de déterminer les actions de formation, de perfectionnement ou de reconversion de ses salariés[5]. Cette obligation s’inscrit dans la logique de son pouvoir de direction, mais elle revêt également un caractère protecteur, dans la mesure où elle vise à garantir la pérennité de l’emploi.

L’employeur doit en outre définir, en liaison avec les organismes de formation professionnelle continue, les critères d’admission des salariés aux actions de formation[6]. Il lui revient donc de s’assurer que les formations proposées sont adaptées aux besoins de l’entreprise et aux aspirations des travailleurs.

Si la formation est un droit, elle s’accompagne aussi d’une obligation pour le salarié. L’article 13.24 du Code du travail autorise l’employeur à exiger que son personnel suive des cours de perfectionnement professionnel. Le salarié ne peut refuser sans motif valable, sous peine de se voir reprocher une faute disciplinaire[7].

Le travailleur peut également être soumis à un stage de formation. Lorsque celui-ci est concluant, il bénéficie des avantages liés au poste correspondant. En revanche, un salarié ayant déjà accompli un stage dans un même secteur ne peut être contraint d’en effectuer un autre en cas de changement d’établissement. Ce mécanisme vise à éviter une exploitation abusive des périodes de formation au détriment du salarié[8].

Le coût de la formation est pris en charge par l’employeur, qu’elle soit organisée par un organisme spécialisé ou en interne[9]. Cette obligation financière témoigne de l’idée que la formation constitue un investissement pour l’entreprise, plutôt qu’une charge imposée aux salariés[10].

Pendant sa formation, le salarié continue de percevoir l’intégralité de son salaire et des indemnités y afférentes. Ce principe consacre la neutralité financière de la formation pour le salarié : sa rémunération n’est pas affectée, même si la prestation de travail est temporairement remplacée par un apprentissage[11].

La loi prévoit expressément que l’échec à un examen lié à une formation ne peut justifier un licenciement. Le salarié est réintégré dans son emploi initial avec tous les avantages acquis[12]. Ce mécanisme garantit que la formation ne devienne pas un moyen détourné pour exclure des salariés jugés « insuffisants »[13].

L’article 13.26 du Code du travail définit le congé de formation comme une période de suspension du contrat permettant au salarié, à son initiative, de suivre des actions de formation indépendamment du plan de formation de l’entreprise. Ce congé peut aussi servir à préparer et passer un examen diplômant[14].

Pour en bénéficier, le salarié doit justifier de 36 mois d’ancienneté ou d’un retour de congé de formation depuis au moins 36 mois. La demande doit être formulée par écrit deux mois avant le début de la formation et accompagnée des pièces justificatives[15].

Le congé de formation est de droit, sauf lorsque l’absence compromet gravement la production de l’entreprise. En cas de différend, l’Inspecteur du Travail peut être saisi, et en dernier recours, le contrat peut être rompu si le salarié ne prouve pas une intention de nuire de l’employeur[16].

Des limites existent : un salarié ne peut demander plus de deux congés de formation en dix ans, sauf accord contraire de l’employeur. De plus, lorsque plusieurs salariés en font simultanément la demande, l’employeur peut différer certaines absences[17].

Le congé correspond à la durée de la formation, dans la limite d’un an pour une formation à temps plein, ou 1200 heures pour un cycle pédagogique discontinu ou à temps partiel. Des accords collectifs peuvent prévoir des durées plus longues[18].

La formation professionnelle continue en droit ivoirien s’impose comme un pilier essentiel de la politique sociale et économique. Elle est à la fois un droit fondamental du travailleur, garantissant son adaptabilité et sa mobilité professionnelle, et une obligation pour l’employeur, qui doit en assurer la mise en œuvre et le financement.

Par l’institution du congé de formation, le législateur ivoirien ouvre également la voie à une véritable autonomie des salariés dans la gestion de leur parcours professionnel. Toutefois, la mise en œuvre effective de ces droits dépend largement de la vigilance des acteurs (employeurs, syndicats, inspection du travail) et des moyens financiers alloués à la formation.

Ainsi, loin d’être un luxe, la formation professionnelle continue apparaît comme un impératif stratégique, garantissant à la fois la compétitivité des entreprises et la sécurisation des trajectoires professionnelles dans un marché du travail en perpétuelle mutation.

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Me Luc KOUASSI

Juriste Consultant Polyglotte| Formateur | Spécialiste en rédaction de contrats, d’actes extrajudiciaires, d’articles juridiques et des questions relatives au droit du travail | Politiste | Bénévole humanitaire.

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[1] Loi ivoirienne n° 2015-532 du 20 juillet 2015 portant code du travail, art. 13.23.

[2] Décret n° 96-285 du 3 avril 1996 relatif à la formation professionnelle, art. 1.

[3] Loi française n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie.

[4] Convention OIT n° 142 sur le développement des ressources humaines, 1975.

[5] Décret n° 96-285, art. 5.

[6] Décret n° 96-285, art. 2.

[7] Loi n° 2015-532. Art. 13.24.

[8] J.-P. Lhernould, Droit du travail : Relations individuelles, Edito, 2003, 278 p.

[9] Loi n° 2015-532. Art. 13.24.

[10] Décret n° 96-285, art. 4.

[11] Loi n° 2015-532. Art. 13.24.

[12] Ibid.

[13] M. Despax, Droit du travail, PUF, 2001, 128 p.

[14] Ibid., art. 13.26.

[15] Ibid., art. 13.27.

[16] Ibid., art. 13.30.

[17] Ibid., art. 13.28.

[18] Ibid., art. 13.29.

Guide de préparation d’un speech de soutenance

Une soutenance de mémoire est un exercice oral académique qui ne se limite pas à lire des pages écrites. C’est un moment de synthèse, de démonstration de ta maîtrise du sujet, et surtout une preuve de ta capacité à réfléchir de façon critique. Un bon speech doit être structuré, clair, fluide et convaincant pour être rendu en 15 minutes. Voici, étape par étape, les rubriques que doit contenir ton discours, avec des explications approfondies.

Le début du discours est décisif : il donne le ton et installe une atmosphère respectueuse et professionnelle. Il est recommandé de saluer en priorité le président du jury, les membres, l’encadrant, et les invités présents. Les remerciements doivent être sincères, mesurés, sans tomber dans un excès de familiarité. C’est aussi l’occasion de montrer ton humilité et ta gratitude envers ceux qui ont contribué à ton parcours (professeurs, encadrant, famille, amis).

  • Exemple 

Monsieur le Président du jury,
Mesdames et Messieurs les membres du jury,
Monsieur mon encadrant,
Honorables invités, chers parents et amis,

Je vous adresse mes salutations respectueuses et mes remerciements sincères. C’est avec une profonde humilité que je me tiens devant vous aujourd’hui pour défendre ce travail de mémoire, fruit de plusieurs mois de recherche, de réflexion et d’efforts soutenus.

Je voudrais, avant toute chose, exprimer ma gratitude à mon encadrant pour sa disponibilité constante, la qualité de ses conseils et la rigueur de son suivi. J’adresse également mes remerciements à l’ensemble de mes enseignants, dont les enseignements et l’accompagnement ont constitué les fondations de ce travail.

Je n’oublie pas mes camarades de promotion, avec qui les échanges intellectuels ont enrichi mon esprit critique, ainsi que ma famille et mes amis, dont le soutien moral et spirituel a été une source d’énergie inestimable. Enfin, je remercie très sincèrement le jury pour le temps consacré à l’analyse de mon mémoire et pour les observations que vous ne manquerez pas de formuler afin d’améliorer encore ma réflexion.

  • Objectif : instaurer un climat de respect et de reconnaissance qui valorise ton travail et ton parcours.

Il est indispensable de situer ton sujet dans son environnement. Cette partie répond à la question : « Pourquoi ce sujet est-il pertinent aujourd’hui ? ». Tu dois expliquer brièvement les réalités sociales, économiques, juridiques ou technologiques qui justifient ton choix. Le contexte permet au jury de comprendre que ton travail ne flotte pas dans l’abstrait, mais s’ancre dans une réalité concrète et actuelle.

  • Exemple

Le thème que j’ai choisi d’étudier, les caractères de la règle de droit, trouve son importance dans la mesure où le droit est l’un des piliers de la vie en société. Chaque jour, consciemment ou non, les individus vivent sous l’emprise de règles juridiques : elles organisent leurs relations, encadrent leurs libertés, fixent leurs obligations. Mais pour comprendre la spécificité du droit, encore faut-il distinguer la règle de droit des autres règles sociales, comme la morale, la religion ou les usages.

Dans un monde où les normes se multiplient et se croisent, il était essentiel de revenir à cette réflexion de base : qu’est-ce qui rend la règle de droit unique ? Quels sont ses caractères distinctifs qui justifient qu’on la place au cœur de l’organisation sociale et politique ?

  • Objectif : capter l’attention en montrant que ton sujet est une réponse à un problème existant et important.

Cette étape consiste à énoncer clairement le thème de ton mémoire. Tu dois le formuler de manière complète, en rappelant ce qu’il recouvre et pourquoi il mérite une analyse approfondie. Cette présentation doit être simple mais précise, afin que même un auditeur extérieur à ton domaine comprenne l’essentiel.

  • Exemple

Le sujet de mon mémoire est intitulé : « Les caractères de la règle de droit ». Ce sujet, bien qu’élémentaire, n’en est pas moins fondamental. Il est à la base de toute construction juridique, car il permet de comprendre ce qui fait du droit une norme singulière, différente des autres. Étudier ces caractères, c’est poser les fondements de la science juridique et préparer l’esprit à aborder des matières plus complexes.

  • Objectif : exposer ton sujet de manière claire et intelligible pour ton jury.

La problématique est le cœur intellectuel de ton travail. Elle consiste en une question centrale à laquelle ton mémoire cherche à répondre. Une bonne problématique est toujours issue d’une tension ou d’un paradoxe entre deux exigences (par exemple, efficacité et équité, sanction et prévention, protection et liberté). La problématique doit être formulée de manière simple, compréhensible et stimulante.

  • Exemple

La réflexion m’a conduit à formuler la question suivante : Quels sont les caractères qui permettent d’identifier la règle de droit et de la distinguer des autres règles sociales, et en quoi ces caractères expriment-ils la spécificité du droit ?

Cette interrogation part d’un constat simple : dans toute société, les individus obéissent à des règles diverses. Mais le droit, lui, se présente comme une norme contraignante, impersonnelle et sanctionnée, ce qui l’élève au-dessus des autres règles sociales. C’est ce paradoxe qui justifie mon étude.

  • Objectif : montrer que tu as cerné la vraie difficulté intellectuelle de ton sujet.

À partir de la problématique centrale, tu déclines des sous-questions précises qui encadrent ton travail. Ce sont des pistes exploratoires qui structurent ton raisonnement. Les questions de recherche démontrent que ton travail ne se contente pas de survoler un thème, mais qu’il l’examine sous différents angles.

  • Exemple

De cette problématique découlent trois interrogations spécifiques : Premièrement, quels sont les caractères essentiels qui définissent la règle de droit ? Deuxièmement, en quoi ces caractères permettent-ils de distinguer la règle de droit des autres normes sociales ? Enfin, quels sont les enjeux pratiques et théoriques liés à ces caractères dans la vie juridique et dans le fonctionnement de la société ?

  • Objectif : prouver ta rigueur scientifique en montrant comment tu as décliné ton sujet.

Ici, tu exposes ce que tu as voulu démontrer ou atteindre à travers ton travail. Il s’agit à la fois d’objectifs théoriques (apporter une analyse scientifique, enrichir la littérature existante) et d’objectifs pratiques (proposer des solutions concrètes aux problèmes identifiés). Cette partie montre l’utilité académique et sociale de ton mémoire.

  • Exemple

L’objectif général de mon travail est de contribuer à une meilleure compréhension des fondements du droit. Sur le plan théorique, il s’agissait d’analyser les caractères de la règle de droit, d’en montrer la cohérence et d’enrichir la réflexion doctrinale sur le sujet. Sur le plan pratique, mon objectif était de mettre en lumière la portée concrète de ces caractères : comment ils influencent le comportement des citoyens, comment ils renforcent la sécurité juridique, et comment ils garantissent la justice sociale.

  • Objectif : convaincre le jury que ton travail a une finalité précise et utile.

La méthodologie met en lumière la manière dont tu as mené tes recherches. Tu dois préciser les sources utilisées (textes juridiques, jurisprudence, doctrine, enquêtes, comparaisons internationales), les outils employés (analyse critique, étude comparative, observations pratiques), et la logique suivie. La méthodologie est ce qui donne sa validité scientifique à ton mémoire.

  • Exemple

Pour atteindre ces objectifs, j’ai adopté une méthodologie qualitative essentiellement doctrinale et analytique. J’ai étudié les travaux des grands auteurs, tels que Gérard Cornu et Jean Carbonnier, mais aussi les textes légaux fondamentaux. Cette approche m’a permis de confronter la théorie à la pratique et de dégager des conclusions solides. J’ai également adopté une démarche comparative, en rapprochant la règle de droit des autres normes sociales, afin de faire ressortir ce qui fait son originalité.

  • Objectif : démontrer la solidité et la crédibilité de ta démarche.

Cette partie est centrale : elle représente le cœur de ton travail de recherche. Tu dois exposer de manière synthétique les principaux résultats obtenus, les constats majeurs, mais aussi les analyses critiques que tu en as faites. Il ne s’agit pas de tout détailler, mais de dégager les points les plus significatifs. Chaque résultat doit être accompagné d’une explication claire et, si possible, d’exemples concrets.

  • Exemple

Mon étude a permis de dégager trois caractères essentiels de la règle de droit :

Tout d’abord, le caractère général et impersonnel. La règle de droit ne s’adresse pas à une personne en particulier, mais à une catégorie d’individus ou à une situation déterminée. Elle est abstraite et vise l’intérêt collectif. Ainsi, lorsqu’on dit « Nul n’est censé ignorer la loi », on exprime le fait que la règle s’applique à tous, sans distinction.

Ensuite, le caractère obligatoire. La règle de droit impose une conduite déterminée, que l’on veuille ou non s’y conformer. Elle ne se contente pas de conseiller ou de recommander ; elle prescrit, elle ordonne. Elle peut imposer une action positive (par exemple, l’obligation de payer ses impôts) ou une abstention (comme l’interdiction de nuire à autrui). C’est cette force obligatoire qui donne au droit sa véritable efficacité.

Enfin, le caractère coercitif ou sanctionné par l’État. Contrairement aux règles morales ou religieuses, le non-respect de la règle de droit entraîne des sanctions prévues et appliquées par la puissance publique. Ces sanctions peuvent être civiles (comme le versement de dommages-intérêts), pénales (comme l’amende ou l’emprisonnement) ou administratives. C’est cette contrainte organisée qui distingue le droit de toute autre norme sociale.

Ces trois caractères, mis en perspective, montrent que le droit est un instrument à la fois normatif, universel et coercitif, garantissant ainsi l’ordre et la justice dans la société.

  • Objectif : prouver ta maîtrise du sujet et ta capacité d’analyse critique.

À partir de tes résultats, tu dois dégager leurs conséquences pratiques et théoriques. Puis, tu proposes des solutions concrètes pour améliorer le cadre existant. Les recommandations montrent que ton travail ne s’arrête pas à un constat, mais qu’il propose des pistes d’action réalistes.

  • Exemple

Ces résultats ont plusieurs implications majeures. Ils rappellent que la règle de droit est un pilier de la sécurité juridique : parce qu’elle est générale, obligatoire et sanctionnée, elle inspire confiance et stabilité. Cependant, pour que ces caractères produisent pleinement leurs effets, il est essentiel de renforcer la vulgarisation juridique afin que chaque citoyen connaisse ses droits et obligations, d’assurer une application équitable et uniforme de la sanction par les autorités, et de promouvoir une culture de respect de la règle de droit au sein de la société.

  • Objectif : démontrer que ton travail a un impact concret et qu’il peut servir à améliorer les pratiques.

Reconnaître les limites de ton travail est une marque de maturité intellectuelle. Aucun mémoire n’est parfait ou exhaustif. Tu peux évoquer des limites de temps, d’accès aux sources, de champ d’étude restreint. Ensuite, tu proposes des perspectives : comment ton travail pourrait être prolongé, élargi ou approfondi.

  • Exemple

Ce travail présente certaines limites. Il s’est concentré sur les caractères classiques de la règle de droit, sans entrer dans les débats philosophiques ou les nouvelles approches contemporaines. Mais ces limites ouvrent des perspectives de recherche intéressantes, notamment l’étude de l’évolution de la règle de droit face aux mutations actuelles : mondialisation, numérisation, émergence des droits fondamentaux, ou encore la montée en puissance du droit international.

  • Objectif : montrer ton esprit critique et ton honnêteté scientifique.

C’est ta conclusion orale. Elle doit rappeler brièvement l’importance du sujet, la pertinence de ton travail et ta conviction personnelle sur l’apport de ta recherche. Tu remercies à nouveau le jury pour son attention et tu te rends disponible pour leurs questions.

  • Exemple

En définitive, l’étude des caractères de la règle de droit montre que celle-ci n’est pas une norme comme les autres. Par sa généralité, son caractère obligatoire et sa sanction par la puissance publique, elle se distingue des autres règles sociales et constitue l’outil essentiel de l’organisation de la société.

Ce mémoire n’a pas la prétention d’être exhaustif, mais il apporte une contribution à la réflexion sur les fondements du droit et sur sa spécificité.

Je vous remercie pour votre attention, et je reste à votre disposition pour répondre à vos questions.

  • Objectif : terminer sur une note forte, claire et professionnelle.

Monsieur le Président du jury,
Mesdames et Messieurs les membres du jury,
Monsieur mon encadrant,
Honorables invités, chers parents et amis,

Je vous adresse mes salutations respectueuses et mes remerciements sincères. C’est avec une profonde humilité que je me tiens devant vous aujourd’hui pour défendre ce travail de mémoire, fruit de plusieurs mois de recherche, de réflexion et d’efforts soutenus.

Je voudrais, avant toute chose, exprimer ma gratitude à mon encadrant pour sa disponibilité constante, la qualité de ses conseils et la rigueur de son suivi. J’adresse également mes remerciements à l’ensemble de mes enseignants, dont les enseignements et l’accompagnement ont constitué les fondations de ce travail.

Je n’oublie pas mes camarades de promotion, avec qui les échanges intellectuels ont enrichi mon esprit critique, ainsi que ma famille et mes amis, dont le soutien moral et spirituel a été une source d’énergie inestimable. Enfin, je remercie très sincèrement le jury pour le temps consacré à l’analyse de mon mémoire et pour les observations que vous ne manquerez pas de formuler afin d’améliorer encore ma réflexion.

Le thème que j’ai choisi d’étudier, les caractères de la règle de droit, trouve son importance dans la mesure où le droit est l’un des piliers de la vie en société. Chaque jour, consciemment ou non, les individus vivent sous l’emprise de règles juridiques : elles organisent leurs relations, encadrent leurs libertés, fixent leurs obligations. Mais pour comprendre la spécificité du droit, encore faut-il distinguer la règle de droit des autres règles sociales, comme la morale, la religion ou les usages.

Dans un monde où les normes se multiplient et se croisent, il était essentiel de revenir à cette réflexion de base : qu’est-ce qui rend la règle de droit unique ? Quels sont ses caractères distinctifs qui justifient qu’on la place au cœur de l’organisation sociale et politique ?

Le sujet de mon mémoire est intitulé : « Les caractères de la règle de droit ».

Ce sujet, bien qu’élémentaire, n’en est pas moins fondamental. Il est à la base de toute construction juridique, car il permet de comprendre ce qui fait du droit une norme singulière, différente des autres. Étudier ces caractères, c’est poser les fondements de la science juridique et préparer l’esprit à aborder des matières plus complexes.

La réflexion m’a conduit à formuler la question suivante :

Quels sont les caractères qui permettent d’identifier la règle de droit et de la distinguer des autres règles sociales, et en quoi ces caractères expriment-ils la spécificité du droit ?

Cette interrogation part d’un constat simple : dans toute société, les individus obéissent à des règles diverses. Mais le droit, lui, se présente comme une norme contraignante, impersonnelle et sanctionnée, ce qui l’élève au-dessus des autres règles sociales. C’est ce paradoxe qui justifie mon étude.

De cette problématique découlent trois interrogations spécifiques : Premièrement, quels sont les caractères essentiels qui définissent la règle de droit ? Deuxièmement, en quoi ces caractères permettent-ils de distinguer la règle de droit des autres normes sociales ? Enfin, quels sont les enjeux pratiques et théoriques liés à ces caractères dans la vie juridique et dans le fonctionnement de la société ?

L’objectif général de mon travail est de contribuer à une meilleure compréhension des fondements du droit.

Sur le plan théorique, il s’agissait d’analyser les caractères de la règle de droit, d’en montrer la cohérence et d’enrichir la réflexion doctrinale sur le sujet.

Sur le plan pratique, mon objectif était de mettre en lumière la portée concrète de ces caractères : comment ils influencent le comportement des citoyens, comment ils renforcent la sécurité juridique, et comment ils garantissent la justice sociale.

Pour atteindre ces objectifs, j’ai adopté une méthodologie qualitative essentiellement doctrinale et analytique. J’ai étudié les travaux des grands auteurs, tels que Gérard Cornu et Jean Carbonnier, mais aussi les textes légaux fondamentaux. Cette approche m’a permis de confronter la théorie à la pratique et de dégager des conclusions solides. J’ai également adopté une démarche comparative, en rapprochant la règle de droit des autres normes sociales, afin de faire ressortir ce qui fait son originalité.

Mon étude a permis de dégager trois caractères essentiels de la règle de droit :

Tout d’abord, le caractère général et impersonnel. La règle de droit ne s’adresse pas à une personne en particulier, mais à une catégorie d’individus ou à une situation déterminée. Elle est abstraite et vise l’intérêt collectif. Ainsi, lorsqu’on dit « Nul n’est censé ignorer la loi », on exprime le fait que la règle s’applique à tous, sans distinction.

Ensuite, le caractère obligatoire. La règle de droit impose une conduite déterminée, que l’on veuille ou non s’y conformer. Elle ne se contente pas de conseiller ou de recommander ; elle prescrit, elle ordonne. Elle peut imposer une action positive (par exemple, l’obligation de payer ses impôts) ou une abstention (comme l’interdiction de nuire à autrui). C’est cette force obligatoire qui donne au droit sa véritable efficacité.

Enfin, le caractère coercitif ou sanctionné par l’État. Contrairement aux règles morales ou religieuses, le non-respect de la règle de droit entraîne des sanctions prévues et appliquées par la puissance publique. Ces sanctions peuvent être civiles (comme le versement de dommages-intérêts), pénales (comme l’amende ou l’emprisonnement) ou administratives. C’est cette contrainte organisée qui distingue le droit de toute autre norme sociale.

Ces trois caractères, mis en perspective, montrent que le droit est un instrument à la fois normatif, universel et coercitif, garantissant ainsi l’ordre et la justice dans la société.

Ces résultats ont plusieurs implications majeures. Ils rappellent que la règle de droit est un pilier de la sécurité juridique : parce qu’elle est générale, obligatoire et sanctionnée, elle inspire confiance et stabilité.

Cependant, pour que ces caractères produisent pleinement leurs effets, il est essentiel de renforcer la vulgarisation juridique afin que chaque citoyen connaisse ses droits et obligations, d’assurer une application équitable et uniforme de la sanction par les autorités, et de promouvoir une culture de respect de la règle de droit au sein de la société.

Ce travail présente certaines limites. Il s’est concentré sur les caractères classiques de la règle de droit, sans entrer dans les débats philosophiques ou les nouvelles approches contemporaines.

Mais ces limites ouvrent des perspectives de recherche intéressantes, notamment l’étude de l’évolution de la règle de droit face aux mutations actuelles : mondialisation, numérisation, émergence des droits fondamentaux, ou encore la montée en puissance du droit international.

En définitive, l’étude des caractères de la règle de droit montre que celle-ci n’est pas une norme comme les autres. Par sa généralité, son caractère obligatoire et sa sanction par la puissance publique, elle se distingue des autres règles sociales et constitue l’outil essentiel de l’organisation de la société.

Ce mémoire n’a pas la prétention d’être exhaustif, mais il apporte une contribution à la réflexion sur les fondements du droit et sur sa spécificité.

Je vous remercie pour votre attention, et je reste à votre disposition pour répondre à vos questions.

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Existe-t-il un lien entre le Certificat Foncier et l’Attestation Villageoise ?

La question du foncier occupe une place centrale en Côte d’Ivoire, car elle touche directement à la sécurité juridique des propriétaires et à la stabilité sociale des communautés rurales et urbaines. Depuis quelques années, l’État ivoirien a entrepris de profondes réformes visant à sécuriser et moderniser la gestion des terres, en mettant fin à la pratique des documents non sécurisés et souvent sources de litiges. Parmi ces réformes, l’on distingue l’institution du Certificat Foncier en milieu rural et la création de l’Attestation de Droit d’Usage Coutumier (ADU) en milieu urbain, appelée à remplacer l’ancienne attestation villageoise.

Mais alors, ces deux documents ont-ils un lien entre eux ? Pour bien comprendre, il est nécessaire d’analyser leur nature, leur régime juridique et leur finalité.

Autrefois, l’attestation villageoise constituait un document délivré par le chef de village pour attester de la cession d’une parcelle coutumière. Elle était utilisée dans les transactions foncières, notamment en zone périurbaine. Cependant, ce document, non uniformisé et facilement falsifiable, a généré de nombreux conflits, car il ne garantissait pas la sécurité juridique des acquéreurs.

Consciente de ces limites, l’État a décidé de mettre fin à cette pratique. Depuis le 24 mai 2023, en Conseil des ministres, a été instituée une Attestation de Droit d’Usage Coutumier (ADU), uniformisée et hautement sécurisée. Contrairement à l’ancienne attestation villageoise, l’ADU est désormais :

  • signée conjointement par le chef du village, le président du comité villageois de gestion foncière et le lotisseur ;
  • délivrée après l’approbation des lotissements impliquant des communautés villageoises ;
  • établie sur un imprimé sécurisé et infalsifiable, fourni par l’administration foncière ;
  • dotée d’un identifiant numérique unique enregistré dans le Système Intégré de Gestion du Foncier Urbain (SIGFU), permettant une vérification en ligne de son authenticité.

Ainsi, l’ADU marque une avancée notable en matière de sécurisation du foncier urbain.

En parallèle, le Certificat Foncier est une innovation propre au domaine foncier rural. Selon l’article 4 nouveau alinéa 2 de la loi n°2019-868 du 14 octobre 2019 modifiant la loi n°98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural, le Certificat Foncier est un acte administratif constatant les droits coutumiers sur une terre rurale.

Il s’agit d’un document officiel, établi après une enquête de terrain et signé par le Préfet. Contrairement à l’ADU qui reste attachée au foncier urbain, le Certificat Foncier constitue la première étape vers la transformation d’un droit coutumier en titre foncier, c’est-à-dire en propriété pleine et entière reconnue par l’État.

À première vue, l’ADU et le Certificat Foncier semblent partager une vocation commune : reconnaître et sécuriser des droits coutumiers. Toutefois, ils se distinguent par plusieurs éléments essentiels :

  • Le domaine d’application :
    • L’ADU concerne le foncier urbain (parcelles issues de lotissements villageois).
    • Le Certificat Foncier concerne le foncier rural (terres coutumières agricoles).
  • La nature du document :
    • L’ADU est une attestation de droit d’usage, c’est-à-dire une reconnaissance provisoire de droits coutumiers, ouvrant la voie à l’Arrêté de Concession Définitive (ACD).
    • Le Certificat Foncier est un acte administratif constatant la propriété coutumière, première étape vers l’obtention d’un titre foncier.
  • L’autorité compétente :
    • L’ADU est délivrée avec la participation des autorités coutumières et du comité villageois.
    • Le Certificat Foncier est délivré par le représentant de l’État, le Préfet.

Bien que distincts, ces deux documents présentent tout de même une similitude importante : ils constituent tous deux une preuve écrite de droits coutumiers.

  • Dans le rural, le Certificat Foncier protège les droits coutumiers agricoles et prépare leur transformation en propriété moderne.
  • Dans l’urbain, l’ADU sécurise les droits coutumiers issus de lotissements et prépare leur mutation en propriété individuelle via l’ACD.

Ils répondent ainsi à un même objectif : sécuriser le foncier en Côte d’Ivoire et réduire les conflits liés à la terre.

En définitive, le Certificat Foncier et l’Attestation de Droit d’Usage Coutumier (ADU) ne sont pas directement liés, car ils s’appliquent dans des domaines fonciers distincts, le rural pour le premier, l’urbain pour la seconde. Toutefois, ils participent d’une même logique : offrir une base juridique claire et incontestable aux détenteurs de droits coutumiers, tout en facilitant leur évolution vers une propriété moderne et sécurisée.

En d’autres termes, le Certificat Foncier conduit au Titre Foncier, tandis que l’ADU mène à l’Arrêté de Concession Définitive (ACD). Deux chemins différents, mais une finalité commune : la sécurisation et la pacification du foncier ivoirien.

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L’intervention d’un notaire est-elle toujours obligatoire pour signer un contrat ?

Lorsqu’on évoque la conclusion d’un contrat, nombre de personnes imaginent spontanément la signature d’un document officiel devant un notaire, perçu comme le garant par excellence de la sécurité juridique. Pourtant, en droit civil, l’intervention du notaire n’est pas une condition générale de validité du contrat. En vertu du principe du consensualisme, issu de l’article 1101 du Code civil français et repris dans le Code civil ivoirien, le contrat naît du simple échange de volontés, sans qu’il soit besoin d’un formalisme particulier[1].

Cependant, la loi impose parfois un formalisme solennel, qui se traduit par l’obligation de recourir à un notaire pour constater l’accord. Tel est le cas, par exemple, du contrat de mariage ou de la donation (sauf lorsqu’il s’agit d’un simple don manuel, c’est-à-dire la remise matérielle d’un objet ou d’une somme d’argent)[2]. Le rôle du notaire devient alors important, non seulement comme instrumentum (celui qui dresse l’acte), mais aussi comme auctoritas (celui qui confère force authentique et opposabilité à l’acte)[3].

La problématique se dessine ainsi : le recours au notaire est-il une formalité exceptionnelle, réservée à certaines situations, ou doit-il être envisagé comme une garantie quasi indispensable de la sécurité contractuelle ?

Cet article nous permettra d’y répondre en commençant par l’analyse de l’obligation légale de recourir au notaire dans certains cas (I), avant de traiter la distinction entre acte authentique et acte sous signature privée (II) et finir en illustrant par un cas concret, celui de la donation par remise de chèque à une étudiante, afin de montrer les implications pratiques de ce formalisme (III).

Dans certains contrats, la volonté des parties ne suffit pas : il faut respecter une forme déterminée, faute de quoi l’acte est nul. Ces contrats dits « solennels » traduisent une volonté du législateur de protéger les parties contre elles-mêmes ou de préserver l’ordre public.

Deux exemples phares :

  • La donation entre vifs : en droit français, l’article 931 du Code civil impose que « tous actes portant donation entre vifs soient passés devant notaires dans la forme ordinaire des contrats, sous peine de nullité »[4]. En droit ivoirien, l’article 30 de la loi n° 2020-669 du 10 septembre 2020 relative aux libéralités reprend la même exigence, mais en offrant une alternative : la donation de biens meubles peut être constatée soit par acte notarié, soit par acte sous seing privé dûment enregistré[5]. L’idée est ici d’assurer la traçabilité de l’acte et d’éviter les contestations successorales.
  • Le contrat de mariage : en vertu de l’article 1394 du Code civil français, toutes les conventions matrimoniales doivent être rédigées par acte devant notaire, en présence et avec le consentement simultané de toutes les parties[6]. L’intervention du notaire vise à garantir l’information des futurs époux sur le régime matrimonial choisi et à prévenir toute fraude.

D’autres exemples existent encore, tels que la donation-partage, le testament authentique ou encore la constitution d’hypothèques. Dans tous ces cas, l’acte notarié est une condition de validité et non une simple preuve.

Pourquoi imposer le notaire ? Parce que certains actes engagent lourdement le patrimoine ou la vie familiale. Le législateur a donc jugé nécessaire d’entourer leur conclusion d’un formalisme protecteur. Le notaire est à la fois :

  • Un conseiller impartial : il informe les parties de la portée de leurs engagements ;
  • Un garant de l’ordre public : il veille à ce que l’acte respecte la loi et ne soit pas contraire aux bonnes mœurs ;
  • Un conservateur : il conserve la minute de l’acte et en délivre des copies exécutoires.

Ainsi, si l’écrit n’est pas toujours obligatoire en matière contractuelle, il devient incontournable dans certaines hypothèses où l’intérêt général ou la protection des parties l’exige.

Lorsqu’un contrat est rédigé par écrit, il peut prendre deux formes principales : l’acte authentique (souvent notarié) ou l’acte sous signature privée.

Un acte authentique est rédigé par un officier public (généralement le notaire), qui lui confère un caractère incontestable. En effet, l’acte authentique « fait foi jusqu’à inscription de faux » (art. 1369 C. civ. fr.)[7]. Cela signifie que son contenu est présumé exact, sauf preuve contraire par une procédure lourde et exceptionnelle d’inscription en faux.

En outre, l’acte authentique a force exécutoire : il vaut titre exécutoire, c’est-à-dire que le créancier peut directement faire exécuter les obligations prévues (par exemple une obligation de payer) sans avoir à passer par un jugement. C’est un avantage considérable en matière de sécurité des transactions.

À l’inverse, l’acte sous signature privée (anciennement « sous seing privé ») est simplement rédigé et signé par les parties, éventuellement avec l’aide d’un tiers (juriste, agent immobilier, avocat). Il ne bénéficie pas de la force authentique. Sa validité repose essentiellement sur la sincérité de la signature. En cas de contestation, le juge pourra ordonner une vérification d’écriture ou une expertise graphologique pour établir la véracité de la signature.

Un exemple illustre l’ambiguïté terminologique : en droit français, bien que la réforme du droit des obligations de 2016 ait modernisé le vocabulaire, certains articles, tel l’article 1582 du Code civil français relatif à la vente, continuent à mentionner « acte sous seing privé », créant une certaine confusion doctrinale[8][9]. En droit ivoirien, n’ayant de pas de réforme, cela est toujours de mise.

Ainsi, si l’acte notarié apporte une sécurité optimale, l’acte sous signature privée reste une alternative largement utilisée, mais plus fragile en cas de litige.

Les faits : Claire, jeune étudiante en criminologie, reçoit de son grand-oncle avocat un chèque de 2 000 000 FCFA destiné à financer ses études. Il a par ailleurs produit un document ecrit signé par les 2. Ce chèque, encaissé avant le décès du donateur, est contesté par une partie des héritiers, qui invoquent l’absence d’acte notarié pour en demander l’annulation.

Analyse juridique : Le droit français prévoit à l’article 931 C. civ. que toute donation doit être passée devant notaire sous peine de nullité. Toutefois, la jurisprudence admet une exception : le don manuel, c’est-à-dire la remise matérielle d’un bien meuble (objet, somme d’argent, chèque). Ce don échappe à l’exigence notariée à condition que le donateur soit effectivement et irrévocablement dépossédé du bien donné[10].

La Cour de cassation a précisé que le simple fait d’émettre un chèque ne suffit pas si le bénéficiaire n’a pas la possibilité de l’encaisser (par exemple s’il est enfermé dans un coffre inaccessible). Mais dès lors que le chèque est provisionné et encaissé, la donation est réputée parfaite[11].

En droit ivoirien, la loi n° 2020-669 relative aux libéralités est plus souple que le droit français : elle permet qu’une donation de biens meubles soit réalisée par acte sous seing privé enregistré, et même, dans certains cas, par don manuel, dès lors que la remise est effective et certaine.

En l’espèce, Claire a bien encaissé le chèque avant le décès, ce qui prouve la dépossession du donateur. La donation est donc valable et les héritiers ne peuvent obtenir restitution.

Ce cas illustre deux leçons à retenir :

  • d’une part, l’intervention du notaire n’est pas toujours obligatoire en matière de donation, notamment pour les dons manuels ;
  • d’autre part, la validité repose sur la réalité matérielle de la remise, qui doit être certaine et irréversible.

L’intervention du notaire, si elle n’est pas systématiquement requise, demeure un instrument de sécurisation des relations contractuelles. Elle s’impose de manière impérative pour certains contrats solennels, tels que le mariage ou la donation entre vifs. Mais au-delà de ces cas, même lorsque la loi ne l’impose pas, le recours au notaire présente un intérêt évident en termes de preuve, de force exécutoire et de conseil impartial.

Toutefois, le droit conserve une certaine souplesse par l’admission d’exceptions comme le don manuel, qui répond à une logique sociale et pratique de simplification des transmissions. Cette dualité traduit bien la philosophie générale du droit des obligations : concilier sécurité et liberté, formalisme et pragmatisme.

À l’heure où les pratiques contractuelles évoluent vers la dématérialisation et l’usage croissant des outils électroniques (signature numérique, blockchain), une réflexion s’impose : le notaire de demain sera-t-il toujours le pivot exclusif de la sécurité juridique, ou devra-t-il réinventer son rôle en devenant un « notaire numérique », garant de l’authenticité et de la protection des parties dans un environnement dématérialisé ?

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Me Luc KOUASSI

Juriste Consultant Polyglotte| Formateur | Spécialiste en rédaction de contrats, d’actes extrajudiciaires, d’articles juridiques et des questions relatives au droit du travail | Politiste | Bénévole humanitaire.

denisjunior690@gmail.com / +225 07 795 704 35 / +90 539 115 55 28


[1] Code civil français & ivoirien, art. 1101 et s.

[2] J.-L. Aubert, E. Savaux, Droit Civil : Les obligations, Sirey, 18e édition, 2024, p. 215.

[3] P. Malaurie, L. Aynès et P. Stoffel-Munck, Droit des obligations, LGDJ, 13e édition, 2024, p. 134.

[4] Code civil français, art. 931.

[5] Loi ivoirienne n° 2020-669 du 10 septembre 2020 relative aux libéralités, art. 30.

[6] Code civil français, art. 1394.

[7] Cass. civ. 1re, 28 mars 2000, n° 97-19.959 : la force probante de l’acte authentique ne peut être renversée que par une inscription en faux.

[8] B. Fages, Droit des obligations, LGDJ, 9e édition, 2019, 602 p.

[9] E. Martin-Hocquenghem. Droit des obligations : Le contrat. Licence, Thèse de doctorat, Université Paris Panthéon Assas, France, 2025, 483 p.

[10] Cass. civ. 1re, 20 juin 2006, n° 03-20.367 : la validité d’un don manuel suppose une dépossession effective et irrévocable.

[11] Cass. civ. 1re, 4 juill. 1995, n° 93-13.397 : la remise d’un chèque encaissé constitue un don manuel valable.