Le vendredi 11 juillet 2025, à partir de 19 heures, s’est tenu un webinaire organisé par le Cabinet LDJ SARL, autour du thème central « Le raisonnement juridique ». Cet événement a rassemblé plus d’une quinzaine de participants, majoritairement des étudiants en droit, des stagiaires juristes et des praticiens désireux de renforcer leur maîtrise des mécanismes fondamentaux du raisonnement juridique, compétence incontournable pour tout juriste souhaitant développer rigueur, crédibilité et professionnalisme dans l’analyse des situations de droit.
I. Intervenants
La formation a été assurée par Maître Luc KOUASSI, juriste consultant polyglotte, formateur et mentor en rédaction scientifique. Il était assisté dans la modération de la session par Monsieur CAMARA, stagiaire au sein du Cabinet, qui a facilité la fluidité des échanges, la gestion des interventions et la prise en compte des questions des participants. Leur dynamisme et leur complémentarité ont contribué à créer une atmosphère interactive, bienveillante et studieuse tout au long de la rencontre.
II. Objectif général du webinaire
Ce webinaire avait pour ambition de familiariser les participants aux mécanismes essentiels du raisonnement juridique, afin de leur permettre d’adopter une posture intellectuelle rigoureuse, de développer une méthode d’analyse cohérente et de renforcer leur capacité d’argumentation. L’approche pédagogique choisie reposait sur une progression structurée, subdivisée en trois modules principaux, chacun décliné en sections complémentaires. Cette méthodologie a permis aux apprenants de comprendre progressivement la nature du raisonnement juridique, ses structures formelles et sa mise en œuvre pratique.
III. Déroulement et contenu détaillé de la formation
Module 1 : Les fondements du raisonnement juridique
Ce premier module a posé les bases indispensables à la maîtrise du raisonnement juridique, en initiant les participants aux réflexes intellectuels fondamentaux que tout juriste doit développer.
Dans la première section, Maître Luc Kouassi a insisté sur la nécessité, avant toute formulation de réponse juridique, de suivre un processus intellectuel rigoureux. Celui-ci commence par une compréhension claire du sujet : identifier la question de droit posée, distinguer l’essentiel de l’accessoire, délimiter le problème à résoudre et en cerner les enjeux. La deuxième étape consiste à rechercher les éléments de réponse, notamment dans les textes légaux applicables, la jurisprudence pertinente et la doctrine. Vient ensuite la formulation d’une réponse claire, motivée et structurée, qui doit être cohérente et complète. Enfin, la dernière étape consiste à évaluer la solidité de l’argumentation, en s’assurant qu’elle repose sur des bases juridiques fondées, tout en anticipant les éventuelles objections.
Dans la deuxième section, pour illustrer concrètement la démarche intellectuelle en droit, l’intervenant a proposé un exercice pratique basé sur la question : « Que pensez-vous du divorce ? ». Cet exemple a permis de montrer la différence fondamentale entre une simple opinion personnelle, souvent fondée sur la morale, la religion ou l’émotion, et une analyse juridique structurée, reposant sur la loi et la jurisprudence. L’objectif était de démontrer que le raisonnement juridique consiste à mobiliser des règles de droit applicables, à qualifier juridiquement les faits et à déduire une solution conforme au cadre légal, tout en justifiant chaque étape de la réflexion.
La troisième section a été consacrée aux techniques de discussion et d’argumentation en droit. Maître Luc a exposé quatre principales méthodes : le raisonnement par analogie, qui consiste à appliquer à une situation non prévue une solution déjà reconnue pour une situation similaire ; le raisonnement a fortiori, qui permet de déduire une conclusion plus évidente à partir d’une solution déjà admise ; le raisonnement a contrario, qui exclut l’application d’une règle à un cas non prévu en raison de son silence ou de sa formulation restrictive ; et l’argument de contradiction, qui consiste à confronter deux propositions pour démontrer l’incohérence ou la faiblesse logique d’une position. Ces techniques, indispensables dans le raisonnement juridique, permettent au juriste d’étayer son argumentation, de convaincre son interlocuteur et d’adopter une posture méthodique et critique.
Module 2 : Le syllogisme juridique
Le deuxième module a été entièrement consacré au syllogisme juridique, présenté comme la structure logique classique du raisonnement en droit. Maître Luc a expliqué que le syllogisme juridique se compose de trois éléments :
- La majeure, qui énonce la règle de droit générale applicable à la situation donnée.
- La mineure, qui présente les faits précis du cas d’espèce, à confronter à la règle.
- La conclusion, qui applique la règle aux faits et en déduit la solution juridique.
Pour illustrer cette méthode, un cas pratique inspiré de la jurisprudence en droit des personnes a été proposé. Il s’agissait d’une décision rendue par la première chambre civile de la Cour de cassation le 10 décembre 1985. Les faits concernaient un homme ayant souscrit une assurance-vie prévoyant qu’en cas de décès, une somme serait versée à son épouse, majorée de 30 % par enfant à charge vivant au foyer. L’homme est décédé alors que son épouse était enceinte. La question posée était de savoir si l’enfant à naître pouvait être considéré comme « à charge » pour l’application de la majoration.
Dans l’analyse, la majeure posait la règle selon laquelle la majoration s’applique pour chaque enfant à charge vivant au foyer de l’assuré. La mineure constatait que l’enfant était conçu au moment du décès et est né vivant et viable. La conclusion déduisait que l’enfant devait être considéré comme à charge, et que la majoration était donc applicable. Cet exercice a permis de démontrer l’efficacité du syllogisme juridique pour résoudre des difficultés pratiques avec rigueur et logique.
La dernière section du module a encouragé les participants à poursuivre l’apprentissage en autonomie à travers l’étude de l’arrêt Nikon rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 2 octobre 2001. Cette démarche visait à renforcer leur capacité d’analyse jurisprudentielle et leur autonomie méthodologique.
Module 3 : La qualification juridique
Le troisième module portait sur la qualification juridique, présentée comme une étape essentielle dans tout raisonnement juridique. Maître Luc a expliqué que la qualification consiste à attribuer à un fait, une situation, un objet ou une relation une catégorie juridique précise, permettant de déterminer le régime applicable et d’en déduire les conséquences de droit.
Dans la première section, l’intervenant a exposé plusieurs exemples concrets. Il a notamment montré qu’un chien, bien que considéré comme un bien meuble au sens de l’article 528 du Code civil, est soumis à un régime spécifique en tant qu’être vivant doué de sensibilité. De même, un robot aspirateur ou un robot ménager pose la question de sa qualification en tant que meuble corporel, objet connecté ou appareil domestique, selon ses fonctions et son utilisation. Un autre exemple concernait le dépassement dangereux sur une ligne blanche, impliquant la qualification de la personne (le conducteur), de la chose (le véhicule) et de l’acte (la manœuvre).
Dans la deuxième section, la méthodologie de qualification a été détaillée selon trois contextes d’application : en cas pratique, où il s’agit d’analyser les faits pour leur attribuer la bonne qualification ; dans une fiche d’arrêt, où l’on observe comment le juge a qualifié les faits pour appliquer la règle de droit ; et dans une consultation juridique, où le juriste interprète les faits exposés par le client pour proposer la qualification appropriée et en tirer les conséquences légales. L’intervenant a insisté sur le fait que la qualification n’est jamais automatique et qu’elle requiert une analyse rigoureuse et méthodique.
La dernière section a abordé le rôle du juge dans le contrôle et la rectification de la qualification juridique. Maître Luc a expliqué que le juge dispose d’un pouvoir souverain de qualification et de requalification. Il peut ainsi confirmer la qualification retenue par une partie, la corriger s’il l’estime erronée, ou en substituer une autre plus conforme aux faits du dossier et aux catégories prévues par la loi. Cette prérogative du juge garantit la juste application du droit et constitue un enjeu stratégique majeur pour tout praticien.
IV. Séance de questions-réponses
La session s’est conclue par une riche séance de questions-réponses, au cours de laquelle les participants ont posé des questions pertinentes sur la méthodologie de raisonnement, les techniques de qualification et l’application pratique du syllogisme dans différents domaines du droit. Maître Luc s’est appliqué à répondre avec clarté, précision et pédagogie, consolidant ainsi la compréhension des notions abordées et renforçant la satisfaction des apprenants.
V. Conclusion
En définitive, ce webinaire a permis aux participants d’acquérir une compréhension solide, progressive et opérationnelle du raisonnement juridique. Ils repartent enrichis d’une méthodologie rigoureuse et structurée, leur permettant de traiter les faits avec précision, d’argumenter avec méthode et de développer une posture intellectuelle critique et crédible.
Le Cabinet LDJ SARL, fidèle à sa mission de formation pratique et professionnalisante, réaffirme à travers cette session son engagement à accompagner la nouvelle génération de juristes africains, en leur offrant des formations de qualité, adaptées aux réalités académiques et professionnelles, pour leur réussite et leur insertion durable dans le monde juridique.