Dois-je nécessairement signer un document écrit pour qu’un contrat soit valable ? : Analyse doctrinale et pratique du rôle de l’écrit dans la validité et la preuve du contrat

La vie juridique et économique repose sur une multitude de contrats qui, chaque jour, organisent les rapports entre les individus, les entreprises et l’État. Ces contrats prennent des formes variées : contrats de travail, de vente, de prêt, de bail, d’assurance, etc. Pourtant, une question revient régulièrement, notamment dans la pratique : faut-il nécessairement un document écrit pour qu’un contrat soit valable ?

À première vue, on pourrait croire que tout contrat doit être signé et consigné par écrit pour exister. En réalité, il n’en est rien. Le principe fondamental du droit des obligations est que le contrat se forme par le simple échange des consentements, indépendamment d’un écrit (art. 1101 et 1103 du Code civil français ; art. 1121 et s. du Code civil ivoirien)[1]. Dès lors que les parties se sont mises d’accord sur les éléments essentiels de leur engagement (objet, prix, prestations), le contrat est né, même sans écrit. Ce principe illustre la force de la liberté contractuelle, que les auteurs qualifient parfois de « pierre angulaire du droit privé moderne »[2].

Cependant, si l’écrit n’est pas une condition de validité du contrat, il joue un rôle essentiel à un autre niveau : celui de la preuve. En cas de contestation, il ne suffit pas de dire qu’un accord a été conclu : il faut pouvoir en apporter la démonstration devant un juge. Or, dans un monde où les litiges sont nombreux, la preuve devient aussi importante que l’existence du contrat lui-même. Comme le rappelle Philippe Malaurie, « le contrat sans preuve est un contrat sans force »[3].

Dès lors, la question n’est pas tant de savoir si l’écrit est obligatoire, mais dans quelles hypothèses il l’est, et surtout pourquoi le droit impose parfois aux parties d’écrire ce qu’elles auraient pu se contenter de dire oralement. C’est cette tension entre principe et exceptions que nous allons examiner.

Nous verrons dans un premier temps que l’écrit n’est pas, en principe, une condition de validité du contrat, mais qu’il peut être exigé dans certains cas pour la formation même de l’acte (I). Dans un second temps, nous analyserons la fonction de l’écrit comme moyen de preuve, en distinguant les cas où il est indispensable de ceux où d’autres modes de preuve sont admis (II). Enfin, nous verrons que le droit contemporain, à travers des exceptions jurisprudentielles et législatives, reconnaît la possibilité d’assouplir cette exigence en admettant des preuves alternatives (III).

Le droit des contrats, dans sa tradition civiliste, repose sur le principe du consensualisme : un contrat est formé dès que les parties sont d’accord, indépendamment de la forme qu’il revêt[4]. Ce principe est un corollaire direct de la liberté contractuelle, qui laisse aux individus la possibilité d’organiser eux-mêmes leurs relations. Toutefois, à côté de ce principe, le législateur a prévu un certain nombre d’exceptions. Dans des hypothèses précises, il exige que le contrat soit non seulement conclu par un échange de consentements, mais aussi constaté par écrit. Dans ces cas, l’écrit n’est plus une simple commodité probatoire, il devient une véritable condition de validité du contrat : à défaut, celui-ci est inexistant ou requalifié.

Ces exceptions sont motivées par plusieurs considérations : protéger la partie faible (notamment en droit du travail), garantir la sécurité juridique (en droit commercial), ou encore informer et alerter les parties des conséquences de leurs engagements (en droit civil).

On distinguera ici trois grandes catégories de contrats dans lesquels l’écrit est imposé : les contrats de travail spéciaux (A), les contrats de cession d’entreprises et assimilés (B), et les contrats nécessitant une information renforcée des parties (C).

Le premier domaine dans lequel l’écrit est imposé par la loi est celui du droit du travail, et plus particulièrement en matière de contrat à durée déterminée (CDD). En principe, le contrat de travail est consensuel : il peut se former oralement, dès que l’employeur et le salarié sont d’accord sur la prestation et la rémunération[5]. Toutefois, lorsqu’il s’agit d’un CDD, la loi impose un écrit sous peine de requalification en contrat à durée indéterminée (CDI).

Ainsi, en Côte d’Ivoire, l’article 15.2 du Code du travail dispose que « le contrat de travail à durée déterminée doit être établi par écrit »[6]. De même, en droit français, l’article L1242-12 du Code du travail précise que « le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif ; à défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée »[7].

Cette exigence d’écrit poursuit une finalité protectrice : le CDD étant un contrat précaire par nature, il doit être encadré afin d’éviter les abus. L’absence d’écrit entraîne une sanction radicale : la requalification en CDI, plus protecteur pour le salarié, avec toutes les conséquences attachées (ancienneté, indemnités de rupture, etc.).

La jurisprudence française a été constante en ce sens : la Cour de cassation a jugé qu’un CDD non écrit est réputé à durée indéterminée, et que l’absence de mention précise du motif du recours au CDD conduit également à la requalification[8]. La doctrine ivoirienne suit la même logique, insistant sur le rôle de l’écrit comme instrument de protection sociale.

Un second domaine où l’écrit est requis est celui des contrats commerciaux relatifs aux entreprises. Plus précisément, la vente d’un fonds de commerce doit obligatoirement être constatée par écrit et comporter certaines mentions légales.

En droit français, l’article L141-1 du Code de commerce impose que l’acte de vente mentionne notamment : le nom du précédent vendeur, la date et la nature de son acte d’acquisition, le prix de cession des éléments incorporels, du matériel et des marchandises, le chiffre d’affaires et les résultats d’exploitation réalisés au cours des trois exercices précédents[9]. Ces mentions visent à protéger l’acquéreur en lui garantissant une information suffisante sur la valeur réelle de ce qu’il achète.

En l’absence de ces mentions obligatoires, le contrat n’est pas nécessairement nul, mais l’acquéreur dispose d’une action en nullité relative, destinée à le protéger contre une information défaillante. La jurisprudence considère en effet que l’écrit a ici une fonction informative autant que probatoire[10].

En Côte d’Ivoire, le droit OHADA, bien que moins détaillé que le Code de commerce français, prévoit également l’exigence d’un écrit dans la cession d’un fonds de commerce, notamment pour des raisons de publicité et d’opposabilité aux tiers[11]. Cette exigence s’inscrit dans une logique de sécurité des transactions commerciales, où la clarté et la certitude sont essentielles pour garantir la confiance des acteurs économiques.

Enfin, certains contrats doivent être conclus par écrit parce qu’ils engagent les parties dans des obligations lourdes ou à long terme. L’écrit est alors imposé comme instrument de réflexion et de protection contre la précipitation.

C’est notamment le cas en matière de crédit à la consommation, où la loi française (art. L312-18 du Code de la consommation) impose un écrit contenant l’ensemble des conditions financières du prêt (taux, durée, échéances, coût total)[12]. De même, dans le domaine du droit immobilier, le contrat de bail de plus de 12 ans doit être établi par acte notarié pour être publié au service de la publicité foncière[13].

L’écrit n’est donc pas ici un simple instrument de preuve, mais une condition d’efficacité de l’acte, parfois même de validité. Comme l’explique Jacques Ghestin, « l’écrit imposé par la loi ne vise pas seulement à constater le contrat : il a pour fonction d’éclairer les volontés, d’informer, et de limiter les risques d’abus »[14].

Ainsi, si le principe demeure que l’écrit n’est pas une condition de validité du contrat, il existe de nombreuses exceptions, justifiées par des considérations de protection, de sécurité ou d’information. L’exigence d’un écrit apparaît comme une limite au consensualisme, mais une limite qui se veut pragmatique et équilibrée, afin de répondre à des besoins sociaux et économiques concrets.

Si l’écrit n’est pas toujours exigé comme condition de validité du contrat, il conserve une place essentielle dans le droit des obligations en tant que moyen de preuve. En d’autres termes, même si un contrat peut exister valablement sans écrit, il reste souvent difficile d’en prouver l’existence ou le contenu devant le juge sans un support écrit. L’écrit devient alors le pivot de la sécurité juridique : il permet de fixer la mémoire des conventions et de prévenir les contestations.

Ce rôle probatoire de l’écrit s’inscrit dans une architecture législative précise. Le Code civil français comme le Code civil ivoirien organisent un régime général de la preuve des actes juridiques, fondé sur le principe selon lequel tout acte dépassant une certaine valeur doit être prouvé par écrit[15]. Toutefois, cette règle connaît des tempéraments, afin d’éviter qu’elle ne conduise à des injustices ou à une rigidité excessive.

Nous envisagerons donc, d’une part, la primauté de l’écrit en matière de preuve (A), puis, d’autre part, les exceptions et limites apportées à cette primauté (B).

En droit civil, l’écrit est traditionnellement considéré comme une preuve dite « parfaite », c’est-à-dire que le juge ne dispose en principe d’aucun pouvoir d’appréciation sur sa valeur, sauf en cas de contestation sur l’authenticité ou d’ambiguïté dans le contenu[16].

L’article 1359 du Code civil français pose une règle fondamentale : tout acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit, sous signature privée ou authentique. Le Code de procédure civil ivoirien reprend le même esprit en exigeant un écrit pour les actes juridiques dépassant la somme de 500 francs CFA. Ainsi, dans notre exemple introductif du prêt de dix millions de francs CFA consenti par M. EMBONPOINT à sa nièce, la loi exige en principe un écrit pour prouver le contrat.

L’écrit confère donc une stabilité aux relations contractuelles. Comme le souligne Philippe Malaurie, « l’écrit cristallise la convention, il fixe dans le temps l’accord des volontés et le soustrait aux incertitudes de la mémoire »[17].

Le droit distingue plusieurs types d’écrits pouvant servir de preuve :

  • L’acte authentique, rédigé par un officier public (notaire, officier d’état civil, huissier) et doté d’une force probante renforcée. Sa valeur probante s’impose au juge tant qu’il n’est pas attaqué par la voie de l’inscription de faux[18].
  • L’acte sous seing privé, établi par les parties elles-mêmes, qui n’a pas la même force probante que l’acte authentique mais reste une preuve parfaite, sauf si sa signature est contestée.
  • L’écrit électronique, désormais reconnu par les législations modernes (art. 1366 Code civil français), qui a la même valeur probante que l’écrit papier à condition que l’identité du signataire soit garantie et que le support assure l’intégrité du contenu[19].

Cette diversification des supports reflète une adaptation du droit aux évolutions technologiques et aux besoins des relations économiques contemporaines.

Le principe de la force probante de l’écrit se traduit également par la règle d’exclusivité : il ne peut être prouvé « outre ou contre un écrit » que par un autre écrit. L’article 1359, alinéa 2 du Code civil français dispose expressément que l’on ne peut pas établir par témoignage ou par présomptions ce qui contredit un acte écrit[20].

Cette règle a pour finalité de protéger la stabilité et la cohérence des relations contractuelles. Comme le rappelle la jurisprudence, admettre systématiquement la preuve par témoins contre un écrit reviendrait à vider ce dernier de sa substance et à fragiliser la sécurité juridique[21].

La rigueur de la règle du « tout écrit » ne pouvait toutefois être appliquée sans nuances, au risque de conduire à des injustices. C’est pourquoi le Code civil et la jurisprudence ont prévu plusieurs exceptions permettant de suppléer l’absence d’écrit ou de contourner l’exigence légale.

L’article 1360 du Code civil français prévoit que les règles de preuve par écrit « reçoivent exception en cas d’impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit ».

L’impossibilité matérielle vise des situations concrètes : par exemple, un contrat conclu dans l’urgence, comme lors d’une hospitalisation soudaine, où l’établissement d’un écrit aurait été impossible. L’impossibilité morale renvoie à des cas où la nature de la relation entre les parties rendait inapproprié de demander un écrit. La jurisprudence française a admis qu’un prêt conclu entre membres d’une même famille pouvait relever de cette exception, l’existence d’un lien affectif fort constituant une impossibilité morale de réclamer un écrit[22].

Dans l’affaire de M. EMBONPOINT, la relation familiale et affective avec sa nièce pourrait justifier l’absence d’écrit, et permettre au juge d’admettre des témoignages comme preuve du prêt.

Le même article 1360 prévoit deux autres cas d’exception : lorsque l’usage exclut l’écrit, et lorsque l’écrit a été perdu par force majeure.

  • Les usages : certains milieux professionnels ou certaines pratiques sociales n’impliquent pas la formalisation écrite des accords. Dans le commerce de détail, par exemple, les achats sont rarement constatés par un écrit.
  • La perte de l’écrit : lorsqu’un contrat avait bien été formalisé mais que l’écrit a été détruit accidentellement (incendie, inondation, etc.), la loi permet aux parties de recourir à d’autres modes de preuve.

L’article 1362 du Code civil français définit le commencement de preuve par écrit comme « tout écrit qui, émanant de celui qui conteste un acte ou de celui qu’il représente, rend vraisemblable ce qui est allégué ». Par exemple, une lettre, un courriel ou un reçu signé peuvent constituer un commencement de preuve par écrit.

Ce commencement doit toutefois être corroboré par un autre mode de preuve (témoignages, présomptions) pour emporter la conviction du juge. Ce mécanisme permet une certaine souplesse, tout en préservant la prééminence de l’écrit.

L’article 1361 du Code civil français admet que l’écrit peut être suppléé par des modes de preuve solennels tels que l’aveu judiciaire ou le serment décisoire. Ces mécanismes permettent d’éviter un formalisme excessif, tout en garantissant une valeur probatoire équivalente à l’écrit.

L’écrit apparaît ainsi comme le pilier de la preuve contractuelle : il constitue la preuve parfaite des conventions, et son absence expose les parties à de grandes difficultés probatoires. Toutefois, afin d’éviter que la rigueur de cette exigence ne mène à des injustices, la loi et la jurisprudence ont prévu de nombreuses exceptions, notamment en cas d’impossibilité morale, d’usages, ou par le recours au commencement de preuve par écrit.

Le système de preuve en droit civil illustre donc une tension permanente entre deux objectifs : la sécurité juridique par l’écrit et la souplesse des relations sociales et économiques.

Si l’écrit occupe une place centrale dans le système probatoire des contrats, il ne constitue pas l’unique instrument de preuve. Le droit civil, conscient de la diversité des situations de la vie sociale, a admis des modes de preuve supplétifs permettant de compléter ou, parfois, de remplacer l’écrit. Ces mécanismes viennent tempérer la rigidité de la règle du « tout écrit » et offrir une certaine souplesse aux parties, en particulier lorsqu’il leur est difficile d’obtenir un document écrit.

Ainsi, en dehors de l’écrit, les parties peuvent recourir à trois grands types de preuves supplétives : le témoignage, les présomptions et la preuve électronique. Chacun de ces modes, bien que moins « parfaits » que l’écrit, est encadré par la loi et la jurisprudence, afin de garantir un équilibre entre la recherche de vérité et la sécurité juridique.

Le témoignage consiste en la déclaration faite par une personne, sous serment, sur des faits dont elle a eu connaissance personnelle. Le Code civil français (art. 1381 et s.) comme le Code civil ivoirien reconnaissent le témoignage comme un mode de preuve recevable, mais qui demeure une preuve « imparfaite » : le juge conserve un pouvoir souverain d’appréciation sur sa valeur probante[23].

Ce caractère imparfait s’explique par les risques d’altération de la mémoire, de partialité ou encore de pressions exercées sur les témoins. Comme l’a souligné un arrêt ancien mais constant de la Cour de cassation, « le témoignage est une preuve sujette à caution, que le juge doit apprécier avec une particulière prudence »[24].

Le témoignage est souvent admis lorsque l’écrit fait défaut, mais uniquement dans les cas prévus par la loi, comme l’impossibilité morale d’obtenir un écrit (cf. supra). Dans l’affaire de M. EMBONPOINT, par exemple, les témoins présents au moment du prêt pourraient utilement attester de la réalité de l’accord verbal. Toutefois, ces témoignages n’auraient de valeur probante qu’à condition d’être corroborés par d’autres éléments (commencement de preuve par écrit, présomptions, etc.)[25].

La jurisprudence ivoirienne a également admis l’usage du témoignage pour suppléer un écrit lorsque les circonstances rendaient impossible la formalisation du contrat, notamment dans le cadre des relations familiales ou des échanges coutumiers.

La présomption se définit comme un raisonnement par lequel le juge déduit l’existence d’un fait inconnu à partir d’un fait connu. Le Code civil distingue deux catégories :

  • Les présomptions légales, prévues par la loi elle-même, qui s’imposent au juge (par exemple, la présomption de paternité du mari, art. 312 C. civ. fr.).
  • Les présomptions judiciaires, que le juge déduit librement de l’ensemble des circonstances de la cause (art. 1382 C. civ. fr.).

En matière contractuelle, ce sont principalement les présomptions judiciaires qui jouent un rôle, car elles permettent au juge de pallier l’absence d’écrit ou de confirmer un commencement de preuve.

Un exemple typique de présomption judiciaire est celui du paiement constaté par le créancier. Si celui-ci restitue volontairement une reconnaissance de dette ou un titre, le juge peut présumer que la dette a été payée.

Dans le cas de M. EMBONPOINT, si sa nièce avait adressé un message écrit ou tenu des propos reconnaissant le prêt, le juge pourrait, à partir de ce fait connu, présumer l’existence de l’accord initial. Cette utilisation des présomptions démontre leur rôle complémentaire dans l’architecture probatoire.

Les présomptions judiciaires ne valent que comme preuves imparfaites, soumises à l’appréciation souveraine des juges du fond[26]. Toutefois, elles constituent un outil précieux pour trancher des litiges où l’écrit fait défaut.

La révolution numérique a profondément bouleversé la notion d’écrit. Désormais, l’écrit ne se réduit plus au support papier. L’article 1366 du Code civil français dispose que « l’écrit sous forme électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier », à condition que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et que l’intégrité du document soit garantie.

Le droit OHADA, dans l’Acte uniforme révisé sur le droit commercial général, a également reconnu la valeur juridique des communications électroniques dans les relations commerciales[27]. Cette évolution a été déterminante pour sécuriser les transactions modernes, notamment dans le commerce international et le secteur bancaire.

La signature électronique est l’élément central qui confère à l’écrit électronique sa force probante. La loi française (art. 1367 C. civ.) et la législation ivoirienne, à travers la loi n° 2013-546 relative aux transactions électroniques, encadrent strictement son usage. Pour être valable, la signature électronique doit être « fiable », ce qui implique un procédé d’identification garantissant le lien entre le signataire et l’acte signé[28].

Dans la pratique, les signatures électroniques certifiées par des tiers de confiance (par exemple, les certificats numériques délivrés par des autorités agréées) sont reconnues par les juridictions comme ayant une valeur probante équivalente à celle d’une signature manuscrite[29].

Si la preuve électronique constitue une avancée majeure, elle n’est pas exempte de difficultés. Les contestations portent souvent sur la sécurité du procédé (usurpation d’identité, altération du document) ou sur la pérennité des supports numériques. Comme l’a souligné un rapport de l’OHADA, « la preuve électronique appelle une vigilance accrue afin que la modernité technologique ne devienne pas une source d’insécurité juridique ».

Les modes de preuve supplétifs notamment témoignage, présomptions et preuve électronique démontrent que le système probatoire en droit civil n’est pas figé dans un formalisme rigide. Si l’écrit conserve la primauté, ces instruments permettent d’adapter la preuve aux réalités sociales, psychologiques et technologiques.

Ils participent ainsi à l’équilibre recherché entre sécurité juridique (garantie par l’écrit) et souplesse des rapports sociaux et économiques (assurée par les preuves supplétives).

L’étude de la question de savoir si un contrat doit nécessairement être constaté par écrit met en lumière les tensions permanentes du droit des obligations entre deux exigences contradictoires : d’une part, la sécurité juridique, qui impose la traçabilité et la précision des engagements contractuels, et, d’autre part, la souplesse des rapports sociaux, qui rend nécessaire la reconnaissance de formes alternatives de preuve.

En principe, le droit civil, qu’il soit français, ivoirien ou même dans l’espace OHADA, repose sur le principe du consensualisme : le contrat naît du simple échange de consentements, sans qu’un écrit soit exigé[30]. Ce principe, hérité du Code civil napoléonien de 1804 et repris dans le Code civil ivoirien (art. 1101 et s.), constitue une véritable conquête doctrinale, en ce qu’il consacre l’autonomie de la volonté comme fondement du droit des contrats[31]. Toutefois, cette autonomie se heurte à la nécessité de fixer des limites, notamment dans un souci de protection des parties les plus vulnérables et de préservation de l’ordre public économique.

Ainsi, dans un premier temps, nous avons constaté que l’écrit est parfois érigé en condition de validité du contrat, ce qui constitue une dérogation au consensualisme. C’est le cas, par exemple, du contrat de travail à durée déterminée en Côte d’Ivoire (art. 15.2 C. trav. CI) ou encore de la vente de fonds de commerce en France (art. L141-1 C. com. fr.), où l’exigence d’un écrit vise à éviter les litiges en fixant par avance les conditions essentielles de l’accord. Ces formalismes imposés traduisent une logique protectrice : protéger le salarié contre un contrat précaire non consenti, ou encore protéger l’acquéreur d’un fonds contre les pratiques abusives du vendeur.

Dans un second temps, nous avons relevé que l’écrit constitue avant tout un instrument probatoire, reconnu comme une preuve parfaite. Le Code civil français (art. 1359 et s.) et le Code civil ivoirien prévoient ainsi que les actes juridiques portant sur des sommes supérieures à un certain seuil (1 500 € en France, 500 F CFA en Côte d’Ivoire) doivent être prouvés par écrit. Cette exigence permet d’éviter la volatilité des engagements verbaux et d’assurer une sécurité dans les relations patrimoniales. Cependant, elle n’est pas absolue : le législateur admet des exceptions fondées sur l’impossibilité matérielle ou morale d’obtenir un écrit (art. 1360 C. civ. fr.), ainsi que sur l’usage social ou la force majeure. Cette souplesse reflète une adaptation pragmatique du droit à la réalité des rapports humains, notamment lorsqu’il s’agit de relations familiales empreintes de confiance, comme dans le cas fictif mais réaliste de M. EMBONPOINT et de sa nièce.

Dans un troisième temps, nous avons vu que d’autres modes de preuve supplétifs complètent l’écrit. Le témoignage, les présomptions judiciaires et la preuve électronique forment un ensemble hétérogène, mais nécessaire, de moyens permettant de pallier l’absence d’acte écrit. Si le témoignage et les présomptions appartiennent à la tradition classique du droit de la preuve, la reconnaissance de la preuve électronique marque une véritable révolution juridique, en phase avec la transformation numérique des échanges économiques. La consécration légale de l’écrit électronique et de la signature électronique, aussi bien en droit français (art. 1366 et 1367 C. civ.) qu’en droit ivoirien (loi n° 2013-546 relative aux transactions électroniques), ouvre la voie à une contractualisation dématérialisée et transfrontalière, tout en posant de nouveaux défis de sécurité et de fiabilité.

L’ensemble de ces développements met en évidence une dialectique fondamentale du droit des contrats : comment concilier la liberté contractuelle, expression de l’autonomie individuelle, avec la nécessité d’encadrer cette liberté pour protéger les plus faibles et garantir la sécurité juridique des échanges ? Cette question trouve un écho particulier dans les travaux doctrinaux contemporains qui insistent sur la dimension éthique et sociale du contrat. Comme le souligne Geneviève Viney, « la contractualisation moderne n’est plus seulement un acte privé, mais un fait social qui engage l’ensemble de la collectivité »[32].

Enfin, au-delà du bilan, une mise en perspective critique s’impose. Si l’écrit reste au cœur de la preuve contractuelle, son avenir pourrait être bouleversé par les évolutions technologiques. La preuve électronique, notamment à travers les smart contracts fondés sur la blockchain, pourrait redéfinir le rôle de l’écrit dans les années à venir[33]. Ces nouveaux instruments garantissent non seulement l’existence du contrat, mais automatisent aussi son exécution, réduisant encore davantage la place du juge dans l’interprétation des engagements. Toutefois, cette dématérialisation radicale soulève des inquiétudes quant à la protection des consommateurs, au respect de la vie privée et à la persistance des inégalités d’accès au numérique dans les pays en développement, y compris au sein de l’espace OHADA.

En définitive, la réponse à la question initiale doit-on nécessairement signer un document écrit pour qu’un contrat existe ? est nuancée. Le droit apporte une réponse claire : non, l’écrit n’est pas toujours nécessaire, mais il est souvent indispensable. Indispensable lorsqu’il conditionne la validité de certains contrats, indispensable lorsqu’il constitue la preuve principale d’un engagement, et indispensable enfin lorsqu’il rassure les parties elles-mêmes. Le contrat n’a donc pas besoin d’un écrit pour exister, mais il a besoin de l’écrit pour durer.

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Me Luc KOUASSI

Juriste Consultant Polyglotte| Formateur | Spécialiste en rédaction de contrats, d’actes extrajudiciaires, d’articles juridiques et des questions relatives au droit du travail | Politiste | Bénévole humanitaire.

denisjunior690@gmail.com / +225 07 795 704 35 / +90 539 115 55 28


[1] Code civil français, art. 1101 et 1103, Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats ; Code civil ivoirien, art. 1121 et suivants.

[2] F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Droit civil : Les obligations, 12e éd., Dalloz, 2022, p. 61 : « La liberté contractuelle constitue la pierre angulaire du droit des obligations et un instrument d’autonomie de la volonté ».

[3] Ph. Malaurie, L. Aynès, Les obligations, 11e éd., LGDJ, 2021, p. 312.

[4] J.-L. Aubert, É. Savaux, Droit des obligations, 15e éd., Sirey, 2020, p. 101.

[5] F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Droit civil : Les obligations, 12e éd., Dalloz, 2022, p. 123.

[6] Code du travail ivoirien, art. 15.2.

[7] Code du travail français, art. L1242-12.

[8] Cass. soc., 21 sept. 2017, n° 16-15.033 : un CDD conclu sans écrit est réputé CDI. ; Cass. soc., 23 janv. 2008, n° 06-44.239 : absence de mention du motif = requalification en CDI.

[9] Code de commerce français, art. L141-1.

[10] Cass. com., 10 mai 1994, n° 92-17.525. Voir : M. Cabrillac, Droit commercial, Litec, 2020, p. 411.

[11] Acte uniforme OHADA relatif au droit commercial général, 2010, art. 135 et s.

[12] Code de la consommation français, art. L312-18.

[13] Code civil français, art. 1198, combiné avec Code de la construction et de l’habitation, art. L111-5.

[14] J. Ghestin, La formation du contrat, LGDJ, 1998, p. 512.

[15] Code civil français, art. 1359 ; Code civil ivoirien, art. 1102 et s.

[16] F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Droit civil : Les obligations, 12e éd., Dalloz, 2022, p. 451.

[17] P. Malaurie, L. Aynès, P. Stoffel-Munck, Les obligations, 12e éd., LGDJ, 2021, p. 367.

[18] Code civil français, art. 1369 ; Cass. civ. 1re, 18 nov. 1997, n°95-18.210.

[19] Code civil français, art. 1366 : reconnaissance de l’écrit électronique. Voir : B. Fauvarque-Cosson, Le droit à l’épreuve du numérique, RTD civ., 2017, p. 451.

[20] Code civil français, art. 1359, al. 2.

[21] Cass. civ. 1re, 19 déc. 1995, n°93-20.561.

[22] Cass. civ. 1re, 25 févr. 1997, n°94-17.818 : impossibilité morale admise pour un prêt familial.

[23] Code civil français, art. 1381 et s. ; Code civil ivoirien

[24] Cass. civ. 1re, 12 juin 1911, DP 1912.1.45.

[25] Cass. civ. 1re, 25 févr. 1997, n°94-17.818 : admission de témoignages corroborés par un commencement de preuve par écrit.

[26] Cass. civ. 1re, 13 juill. 1983, n°82-11.419.

[27] Acte uniforme OHADA révisé portant sur le droit commercial général, 15 déc. 2010, art. 5.

[28] Code civil français, art. 1367 ; Loi ivoirienne n° 2013-546 du 30 juillet 2013 relative aux transactions électroniques.

[29] Cass. civ. 1re, 6 avr. 2016, n°15-11.048 : valeur probante d’une signature électronique certifiée.

[30] Code civil français, art. 1101 et 1102 ; Code civil ivoirien, art. 1134.

[31] R. Demogue, Traité des obligations en général, Paris, 1923, t. I, p. 17.

[32] G. Viney, La fonction sociale du contrat, RTD civ. 1998, p. 1.

[33] F. Ewald et M. Fleurbaey, Smart contracts et blockchain : quel avenir pour la preuve contractuelle ?, Revue des contrats, 2020, p. 215.

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L’amodiation en droit minier congolais : vigilance et prudence

Le droit minier congolais par le biais de son de sa loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018 à poser les principes pour se lancer aux activités minières. Ainsi, hormis le principe lié à l’éligibilité et  d’autres formalités  au-devant de l’administration.  Il se révèle que toute personne qui se lance ou qui veut se lancer à l’exercice des activités minières sauf à quelques exceptions prévues par  le code, doit  être mini d’un titre minier au moins.

Considérant ce qui précède, le code organise 4 quatre types de droits miniers ou titres miniers qui sont :

  • Le permis de recherches : il ne porte que sur les substances minérales classées en mines pour lesquelles il a été accordé et sur les substances associées, si son titulaire en demande l’extension à ces dernières. [1] ;
  • Permis d’exploitation : il autorise son titulaire à exploiter, à l’intérieur de son périmètre qu’il couvre, les substances minérales pour lesquelles il est spécifiquement établi. Ces substances minérales sont celles que le titulaire a identifiées et dont il a démontré l’existence d’un gisement économiquement exploitable.[2] ;
  • Permis d’exploitation des rejets : il emporte le droit d’exploiter les gisements artificiels situés dans le périmètre minier couvert par le permis, à moins que ce permis d’exportation n’exclue expressément l’exploitation des gisements artificiels.[3] ;
  • Permis d’exploitation des petites mines ou à petite échelle : la détermination de la nature du gisement de petite mine dépend des conditions techniques et des types d’installations utilisées, lorsque les conditions techniques pour exploiter un gisement de substances minérales ne permettent pas de  faire une exploitation à grande échelle.

Il s’en suit que toute détention d’un titre minier en droit congolais confère à son titulaire une certaine portion des droits,  à titre de  propriété que,  sur les substances minérales extrait car, le sol demeure une propriété inaliénable, imprescriptible et indivisible de l’Etat. Le titre minier présente les caractéristiques suivantes :

  • Droit réel : parce qu’il porte directement sur la chose qui est la mine ;
  • Droit Immobilier : parce que porte sur une chose qui selon la loi considérée comme immobilière ;
  • Droit exclusif : parce que le seul titulaire est autorisé à jouir, user et disposer des droits que lui confère le titre minier ;
  • Droit cessible : ils sont cessibles parce qu’ils sont dans les commerces, c’est-à-dire peuvent faire l’objet d’une transaction sauf exception prévue par la loi etc….

Il se constate que le législateur congolais donne la possibilité au titulaire des titres miniers d’en faire de ces titres l’objet des tractions parmi lesquelles l’amodiation, c’est pourquoi il nous revient dans la présente étude d’en démontrer son contours de validité

En droit congolais, le concept de contrat doit être compris comme une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs autres personnes à donner, ou à ne pas faire quelque chose.[4] En l’espèce, l’amodiation est un louage pour une durée déterminée ou indéterminée, sans faculté de sous-louage, de tout ou partie des droits attachés à un droit minier ou à une autorisation de carrières moyennant une rémunération fixée par accord entre l’amodiant et l’amodiataire.[5] Autrement dit, il est un contrat par lequel une partie appelée « amodiant »qui est titulaire actuel, donne en location pour une durée déterminée ou indéterminée, sans faculté de sous-location, tout ou partie des droits attachés à  un droit minier ou d’autorisation de carrières à une autre personne appelée « amodiataire », qui est locataire moyennant une rémunération fixée par accord entre l’amodiant et l’amodiataire.[6]  

Ainsi, pour que cette convention qui lie les parties contractes soit valide il doit y avoir consécutivement la réunion de certaines conditions telles qu’énumérées à l’article 8 du Décret du 30 juillet 1888 portant des contrats et les obligations conventionnelles, les conditions de validité du contrat sont :

  • Le consentement des parties qui s’obligent ;
  • La capacité de contracter ;
  • Un objet certain et ;
  • Une cause licite.

De ce qui précède, il nous revient de préciser que tout contrat ou toute convention  doit obéir en droit congolais à ces règles générales ci-dessus citées de manière superficielle. Ainsi, cette étude sera traitée dans deux grands points dont la première porte sur conditions et le second sur les droits et obligations des parties au contrat d’amodiation.

Le contrat d’amodiation, comme tout autre contrat, doit satisfaire aux conditions générales de validité de contrat telles que libellées à l’article 8 du décret du 30 juillet 1888 portant des contrats et les obligations conventionnelles. Il s’ensuit que, la satisfaction à ces règles générales de validité du contrat n’est pas suffisante dans le cas particulier du contrat d’amodiation dont question ici. Ce qui conduit a relevé qu’en dehors de règles générales de validités de contrat les parties au contrat d’amodiation comme contrat particulier du secteur minier présentent certaines spécificités aux conditions de validité qui méritent de passer en revue.

Le contrat d’amodiation est un contrat de louage de titre minier qui représente une propriété par l’amodiataire à l’amodiant.Hors, il est d’un principe que toute aliénation ou vente d’un bien appartenant à autrui est nulle avec risque de paiement des dommages et intérêts par la partie qui a vendu ou aliéné un bien ne lui appartenant. Pour être valable l’amodiant doit satisfaire aux conditions suivantes :

  • L’amodiant au contrat d’amodiation doit être au préalable titulaire de titre minier objet de ce  contrat

Par titulaire, il faut entendre par toute personne morale au nom de laquelle un droit minier ou de carrière est accordé et un titre minier ou un titre de carrières est établi, conformément aux dispositions du code.[7] De cette disposition, nous retiendrons qu’il est inconcevable en droit minier congolais de trouver une personne sans titre minier avec la qualité de titulaire. Egalement même si certains documents de l’administration sont détenus par l’intéressé, le Co contractant doit se rassurer que ces titres dont il détient sont régulier. Pour se faire un travail d’audit juridique de conformité des titres faisant l’objet du contrat d’amodiation peut être demandé à un avocat ou juriste expérimenté en droit minier en vue de prévenir aux risques liés à la perte d’argent au cas les choses n’arrivent à bien tournées.

  • L’amodiant doit détenir le titre minier pouvant faire l’objet d’amodiation

Comme relever ci-dessus que  le contrat d’amodiation dans le secteur minier doit porter sur le titre minier détenu préalablement par l’amodiant avant la conclusion du contrat d’amodiation. Mais il se constate que de la seule volonté du législateur congolais tous les titres miniers tels que organiser par le code ne sont pas éligible ou peuvent pas faire l’objet d’un louage ou d’une amodiation. Ainsi peuvent faire l’objet de l’amodiation les titres miniers que voici :

  • Le permis d’exploitation ;
  • Le permis d’exploitation de rejets ;
  • Le permis d’exploitation des petites mines ou à petite échelle.

Ainsi,  pour les substances minérales classées en mines, le permis de recherche ne peut faire nullement l’objet d’amodiation. Cela veut autant dire que le contrat d’amodiation ne doit porter que sur le périmètre couvert soit par un permis d’exploitation, permis d’exploitation des rejets et celui d’exploitation à petite échelle.

De ce qui précède, il y a lieu de préciser que dans la législation minière congolaise tout contrat de louage de droit minier de recherche reste et demeure illicite, or en droit de contrat congolais l’illicéité est une cause d’annulation du contrat, dès même lorsque les parties concluent un contrat d’amodiation portant sur le permis de recherche ce contrat est par nature invalide pour son illégalité.

Il apparaît logique que le titulaire d’un droit minier de recherches ne puisse pas procéder à un louage d’un droit sur lequel les recherches qui s’effectuent n’ont pas encore abouti à des résultats susceptibles de conduire à l’exploitation. Tout semble indiquer que celui qui loue un bien doit pouvoir être sûr d’en tirer profit. Or, dans la mesure où l’opérateur minier se trouve encore à la phase des recherches minières, rien ne peut présager que ces dernières aboutiront à tout prix à la découverte d’un gisement économiquement exploitable ou rentable.[8] Autrement, le titulaire du permis de recherche n’est pas autorisé à conclure le contrat d’amodiation  sous quelle condition que ce soit. Cela découle de l’article 177 alinéa 2 que les droits miniers et/ou des carrières de recherche ne peuvent faire l’objet d’amodiation.[9] Mais s’il y a des conditions relatives à l’amodiant il y a également d’autres pour la amodiataire qui nécessitent de relever.

L’amodiataire est une partie au contrat d’amodiation qui s’engage à prendre en louage le titre minier détenu par le titulaire qui est l’amodiant. Il découle des termes de l’article 1.53  que l’amodiataire  est assimilé au propriétaire de titre minier, et comme telle il doit remplir les conditions suivantes pour être éligible au contrat d’amodiation avec possibilité de devenir dans le futur propriétaire de titre loué.Pour se faire l’amodiataire devra satisfaire aux conditions suivantes :

  • Etre constitué en  société commerciale

Les activités minières en RDC telles que définies à l’article 1.2 du code minier comme tous services, des fournitures ou travaux de l’art des mines directement liés à la recherche, à l’exploitation minière ou au traitement et/ou à la transformation des substances minérales, y compris les travaux de développement, de construction et d’infrastructures.[10]Sont réservées qu’aux seules personnes morales, exclusion faite aux personnes physiques.

Les personnes morales dont question ici sont des personnes qui poursuivent les intérêts lucratifs, donc les sociétés commerciales créées conformément au droit congolais positif des sociétés aujourd’hui régissent par l’acte uniforme relatif aux droits des sociétés commerciales et du groupement d’intérêts économiques. Cela veut dire que les associations sans but lucratif et les organisations non gouvernementales ne peuvent pas être considérées comme des personnes morales éligibles aux activités minières bien que régulières constituées.

Rappelons que l’acte uniforme relatif aux droits des sociétés commerciales et du groupement d’intérêts économiques organise de marnière ferme ou impérative cinq formes des sociétés commerciales a son article 6  dont,  les sociétés en nom collectif ; les sociétés en commandite simple ; les sociétés à responsabilité limitée ; les sociétés anonyme et les sociétés par action simplifiées qui méritent de définir sommairement  comme suite :

  • La  société en nom collectif, elle est une forme dans laquelle tous les associés sont commerçants et répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales.[11] ;
  • Société en commandite simple, elle est celle dans laquelle coexistent un ou plusieurs associés indéfiniment et solidairement responsables des dettes sociales dénommés « associés commandités », avec un ou plusieurs associés responsables des dettes sociales dans la limite de leurs apports dénommés « associés commanditaires », et dont le capital est divisé en parts sociales.[12] ;
  • La société à responsabilité limitée, elle est une société dans laquelle les associés ne sont responsables  des dettes sociales qu’à concurrence de leurs apports et dont les droits sont représentés par des parts sociales.[13] ;
  • Société anonyme est une société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des dettes sociales qu’à concurrence de leurs apports et dont les droits actionnaires sont représentés par des actions.[14] ;
  • Société par action simplifiée est une société instituée par un ou plusieurs associés et dont les statuts organisent librement l’organisation et le fonctionnement de la société sous réserve des règles impératives du présent livre.

Les associés de la société par action simplifiée ne sont responsables des dettes sociales qu’à concurrence de leurs apports et leurs droits sont représentés par des actions.[15] Si l’amodiataire s’est constituée en société commerciale selon l’une des formes passées en revue ci-dessus, elle doit également.

  • Elire domicile en RDC

Le domicile d’une société renvoie à son siège social. Toute société doit avoir un siège social qui doit être mentionné dans ses statuts.[16]  Ce siège doit être fixe, selon l’AUDCGIE les associés ont la liberté de choisir le lieu d’établissement du siège social, mais une société qui porte sur son objet social l’exercice des activités minières en RDC parmi lesquelles l’amodiataire ne fait pas exception devra choisir comme le lieu d’établissement de son siège social le territoire congolais sous peine de tomber dans l’inéligibilité. Mais une personne morale ne peut être constituée sans objet social, a ceci la législation minière congolaise présente une rigueur incontournable faute de quoi le contrat serait irrégulier.

  • L’exclusivité des activités minières

Le principe de l’exclusivité des activités minières telles que repris à l’article 1.2 du code minier reste l’une des conditions d’éligibilité aux activités minières. C’est-à-dire le fait pour une personne morale société commerciale soit constituée régulièrement mais comporte d’une part les activités minières et d’autres parts les activités autres que celles minières, fera à ce que cette personne morale perde la possibilité d’exercer les activités minières ou son éligibilité. C’est dans cette logique que  note Roger MULAMBA KATAMBA dans un article publié sur net et cité par CIM’S qu’une société peut être  régulièrement constituée et avoir un objet social  licite conformément aux articles 19 et 20 de l’AUSCGIE sans être pour autant éligible à détenir les droits miniers si cet objet ne porte pas exclusivement sur aux activités minières.

Les associés sont donc tenus s’ils veulent que leur société exerce des activités minières, au respect de cette exigence légale d’éligibilité, lors de la rédaction des actes constitutifs ou lors de la demande des droits miniers en procédant par une assemblée générale extraordinaire modificative des statuts. Il sied de préciser que, l’amodiataire avant tout déboursement de ces fond devra se rassurer qu’il satisfait aux conditions d’éligibilité aux activités minières dont l’analyses ci-dessus entre autre :

  • Etre personne morale ;
  • Avoir son siège social en RDC ;
  • Avoir l’objet exclusif sur  les activités minières.[17]

À cet effet, l’article 179 du code minier ajoute que préalablement à la conclusion du contrat, l’amodiataire doit démontrer qu’il est éligible au droit minier. Si toute les deux parties arrivent à satisfaire chacune aux conditions particulières non seulement qui lui conviennent mais aussi s’en convint de l’égalité de l’autre ils peuvent cette fois-là signer le contrat d’amodiation. Le contrat qui doit faire l’objet de la signature devra contenir certaines mentions sous peine de sanctions prévues par la loi.

Comme dans tout contrat de droit commun,   les parties devraient au préalable l’identifier en l’espèce l’amodiant et l’amodiataire. Prévoir les différentes obligations entre elles, parmi lesquelles le prix du loyer et les échéances. Mais hors ces mentions facultatives selon que les parties y trouvent intérêts, pour le contrat minier d’amodiation la loi impose que les parties mettent ou insérées obligatoirement une clause résolutoire du contrat au cas où l’une des parties manque notamment :

  • Pour le non-paiement par l’amodiataire des impôts, taxes et redevances dus à l’état ;
  • Pour non observation des lois et règlements pouvant entraîner des conséquences financières ou administratives préjudiciables à l’amodiant. Qui plus est, il rend l’amodiant et l’amodiataire civilement responsables vis-à-vis de l’État en cas de faute. Il est question en espèce d’une responsabilité civile purement solidaire.

Pour s’en épargner les parties au contrat d’amodiation devraient mettre à l’esprit qu’elles n’ont droit à la commission d’aucune erreur quel qu’en soit sa valeur pour ne pas s’exposer. C’est nous disons qu’il faut signer ou entreprendre les démarches de signature du contrat d’amodiation avec plus de prudence et de vigilance. En dehors de la clause résolutoire, les parties au contrat d’amodiation ont également l’obligation de prévoir ou d’insérer au contrat  sous peine de nullité une clause d’entretien et de réinvestissement nécessaire à l’exploration et au développement raisonnables du gisement.

La nullité est une sanction juridique qui frappe normalement un acte juridique irrégulier du point de vue des éléments requis pour sa validité, ou des requises. Un contrat d’amodiation  qui ne respecte pas cette règle d’intégration d’une clause d’entretien du gisement  pourrait être sanctionnée par la nullité, celle-ci a pour effet, de priver l’acte ainsi irrégulier des effets juridiques qu’il aurait dû notamment produire, s’il été régulier. Cette sanction doit être toujours prononcée par le juge. Elle n’est donc automatique sauf quand elle est de plein droit. Dans ce cas, le texte lui-même le dit.[18]     

De ce qui précède, il y a lieu de relever que, le contrat d’amodiation dans le secteur minier ne pas celui qu’il faut signer sans informations fluides entre parties, et aussi se rassurer sur la crédibilité ou la confiance qu’à son future partenaire, cela en prévision des risques juridiques qui peuvent s’encourir lorsqu’on n’est engager avec une mauvaise personne n’ayant non seulement la bonne fois de se libérer a ces obligations mais aussi d’y répondre favorablement à chaque temps que son exécution la requière.

Comme tout contrat ordinaire tel que régi par le décret du 30 juillet 1888 portant des contrats et les obligations conventionnelles, il y a toujours un moment où le contrat d’amodiation devient effectif et opposable aux parties et aux tiers après accomplissement   de certaines formalités.

  • Effectivité

En droit congolais de contrat, ce dernier est effectif du moment que les conditions de sa validité sont réunies, à savoir : le consentement des parties, la capacité de contracter, l’objet déterminé et la cause licite. Autrement en droit congolais, un contrat devient effectif dès sa signature. Cela signifie que les obligations convenues entre les parties commencent à produire les effets entre  elles seules.  Cela relève du principe d’effet relatif des contrats tant fait mention dans cette étude, selon lequel un contrat ne crée d’obligations qu’à l’égard des parties qui l’ont conclu.

Dans un contrat de vente, de louage etc… c’est-à-dire synallagmatique  il est effectif du moment que les parties s’accordent sur la chose et sur le prix. En l’espèce, le contrat d’amodiation entre dans cette catégorie des contrats synallagmatiques où il y a réciprocité des obligations entre parties et ce, il y a toujours une clause résolutoire sous-entendue. Qui peut porter corps ou extérioriser  du moment que l’une des parties n’obéit pas  à ces obligations.

Il convient de préciser que, le contrat d’amodiation n’est pas l’œuvre du CAMI comme administration des mines chargée de procéder à son enregistrement,  mais plutôt reste l’œuvre des parties c’est-à-dire l’amodiant et l’amodiataire. Comme telles, elles doivent bien le rédiger en prospection des règles ou mentions obligatoires à intégrer.  Cela veut dire que le contrat d’amodiation devient effectif à la date de sa signature par les parties bien qu’à ce stade son opposabilité ne concerne que les mêmes parties. Cela veut aussi dire que cette phase de signature où il devient effectif n’est nullement à négliger car dès qu’il est signé il ne sera présenté au cadastre que pour son enregistrement éventuellement pour vérification sur l’éligibilité de l’amodiataire et non pour une autre rédaction. 

  • Opposabilité

En vertu du principe de l’effet relatif du contrat tel que le libellé à l’article 33 du décret du 30 juillet 1888 portant des contrats et les obligations conventionnelles que les  conventions légalement formées entre tiennent lieu de loi à ceux  qui les ont faites.

De ce principe général en droit de contrat, l’amodiation comme contrat devrait ne produire les effets, qu’entre l’amodiant et l’amodiataire, mais parce qu’il s’agit d’un contrat que la loi congolaise attache certaines importances de par sa volonté ce contrat est soumis aux règles particulières d’enregistrement devant l’administration des mines qui est le cadastre minier en vue d’étendre ces effets, ou en vue d’invoquer ces effets même au regard des tiers cela au-delà de l’entendement du principe des effets relatifs de contrat. En effet, seule la signature du contrat d’amodiation ne suffit pas pour qu’il  soit opposable aux tiers.  Pour être opposable aux tiers, tout contrat d’amodiation doit être enregistré dans un registre établi et gardé à cet effet au cadastre minier conformément à la procédure prévue par le règlement minier.

L’enregistrement du contrat d’amodiation n’est soumis qu’au contrôle de l’éligibilité par l’administration des mines selon la procédure prévue par le règlement minier.

Le contrat d’amodiation doit être enregistré par le cadastre minier moyennant paiement, au profit du trésor public, d’une taxe pour l’enregistrement dont le montant est fixé par voie règlementaire[19]

Il découle de cette disposition que l’opposabilité du contrat d’amodiation est soumise à la formalisation de son enregistrement auprès de l’administration des mines qui se bornerait à faire avant tout enregistrement à vérifier si l’amodiataire est éligible aux droits miniers, faute de quoi cette procédure d’enregistrement en vue de son opposabilité aux tiers peut être paralysée. Alors aussi longtemps que le contrat d’amodiation n’est pas enregistré, c’est-à-dire inscrit dans un cahier ou registre d’enregistrement des demandes d’inscription hypothèques et d’amodiation, ni l’amodiant ni l’amodiataire ne peuvent se prévaloir des droits découlant dudit contrat pour les opposer aux tierces personnes.

Lors de l’instruction cadastrale, le CAMI ne devrait se limiter qu’à l’examen de l’éligibilité de l’amodiataire, et ce, en dehors de toute autre considération.[20]

Afin, il sied de préciser que, le contrat d’amodiation doit être enregistré car, ceci n’est pas d’une moindre importance car il y va des intérêts de toute les parties qui peuvent se mettre en difficulté ou en surmonter en le faisant enregistré avec beaucoup de prudence et vigilance, autant plus que dans le monde des affaires les pertes liées à la mauvaise application ou pour violation des lois reste une préoccupation permanente  pour les parties au contrat d’amodiation.  

Dans chaque contrat, chaque partie a une portion des droits qui est même l’issue de cet engagement et  est toujours assujettie à un certain nombre d’obligations qu’elle doit satisfaire. Le manquement  à la satisfaction de ces obligations expose toujours la partie défaillante aux conséquences légalement prévues ou prévues par le contrat lui-même plus généralement au paiement des dommages et intérêts.

Le mot droit désigne deux notions distinctes. D’une part, le droit objectif  désigne un ensemble de règles juridiques qui régissent la vie en société. D’autre part, les droits subjectifs qui renvoient à un ensemble de prérogatives reconnues par le droit objectif à des individus pour la satisfaction de leurs intérêts. Cette dernière définition nous intéresse dans cette étude,  car  les droits conférés aux parties contractantes doivent être compris comme des prérogatives que la loi leur donne pour la protection de leurs intérêts. Ainsi nous allons tour à tour voir les droits d’amodiant et ceux de l’amodiataire.

L’amodiant comme titulaire du bien loué par l’amodiataire à un certain nombre des droits qu’il jouit vis-à-vis de l’amodiataire entre autre :

  • Le droit de percevoir le loyer ou rémunération :  au terme de l’article 177 alinéa premier du code minier congolais , l’amodiation consiste en un louage pour une durée fixe ou indéterminée, sans faculté de sous-louage, de tout ou partie d’un droit minier d’exploitation ou d’autorisation d’exploitation de carrières permanente, moyennant, une rémunération fixée par accord entre l’amodiation et l’amodiataire. Ainsi,  le contrat d’amodiation comme louage de titre minier détenu en  propriétaire de bien immobilier, par l’amodiant  donne lieu à ce droit,  c’est pourquoi  l’amodiant perçoit de l’amodiataire le montant du loyer à chaque échéance convenue entre eux dans le contrat ;
  • Le droit de visiter son périmètre soit par lui-même soit par son mandataire : ce droit est acquis par l’amodiant indépendamment de toute volonté des parties, c’est pourquoi le législateur congolais utilise le concept nonobstant toute clause contraire c’est-à-dire quel que soit l’attente  des parties à contourner cette clause l’amodiant ne peut nullement être dépourvu de son droit de visite ou d’inspection sur le périmètre qui demeure sa propriété. C’est ainsi qu’il est aussi noté que le contrat d’amodiation ne dépouille pas l’amodiant de tous les droits parce qu’il lui est reconnu un droit de regard sur les travaux qui s’effectuent dans le périmètre du droit minier.[21] ;
  • Le droit de recours contre l’amodiataire lorsqu’il paie la datte publique : il est vrai le code minier rend les deux parties au contrat d’amodiation solidaire aux dettes publiques c’est-à-dire vis-à-vis de l’Etat mais en réalité cette obligation de payé les impôts, droits et taxes est à la charge de l’amodiataire.

De la même façon que l’amodiant à un certain nombre des droits issus du contrat d’amodiant comme non seulement comme propriétaire mais aussi comme partie au contrat il est sans doute que l’amodiataire aussi non seulement à titre de locataire mais aussi comme partie au contrat a son tours un certain nombre des droits dans un contrat d’amodiation. Entre autre :

  • Le droit d’exploiter le périmètre minier conformément aux termes du contrat.

Lorsque l’amodiataire prend en louage le titre qui couvre le périmètre minier de l’amodiant ce n’est pas, pour garder comme si il s’agissait d’un contrat de dépôt non plus, c’est pourquoi du moment que leur contrat devient non seulement effectif maos aussi toute les formalités particulières légales sont accomplies, l’amodiataire est en droit d’exploiter ce périmètre ce, dans le respect  des clauses contractuelles et des dispositions légales impératives

  • Le droit de devenir propriétaire de titre loue :

Il peut arriver qu’en cours du contrat l’amodiant décide de céder totalement le titre, c’est-à-dire le vendre ; il peut dans ce cas le vendre l’amodiataire qui sera propriétaire jusqu’à l’échéance de sa validité. Notons que même ici la notion de la vigilance et de la prudence n’est pas moindre car, l’amodiataire ne peut pas acheter le titre de l’amodiant qui est devenu invalide par l’expiration de sa durée légale non plus, et aussi le titre dont la durée de validité est engloutie par le contrat d’amodiation en cours. Pareil agissement constituerait un manque à gagner dans le chef de l’amodiant.

Le mot obligation est au sens large   l’ensemble de tout ce que la loi ou même la morale commande à un individu de faire, sans que l’individu concerné n’en soit nécessairement tenu à l’égard d’une autre personne déterminée.[22] Au sens du droit des affaires l’obligation renvoie au titre négociable émise par une société, lorsqu’elle est émise  elle est constitutive   d’une créance de la société.[23] Au sens du droit civil ou contractuel, il relève que l’obligation autrement appelée droit de créance  renvoie à un lien de droit entre deux personnes en vertu duquel l’une d’elles, créancier, peut exiger de l’autre, le débiteur, une certaine prestation.[24] En l’espèce il convient de préciser que, le concept obligation doit être entendu comme l’ensemble de tous qu’une personne est tenu de donner  de faire ou de ne pas faire.

Ici, nous allons voir ce à quoi l’amodiant est tenu vis-à-vis de l’amodiataire en exécution du contrat qui le lie, nous avons entre autre :

  • L’obligation d’information sur le titre ou le périmètre minier objet du contrat

Parce que le contrat d’amodiation n’est pas celui d’adhésion ou la discussion sur l’objet et le prix importe peu, l’amodiant est dans l’obligation d’informer l’amodiataire sur toute question principale ou secondaire en rapport avec le titre.

  • Obligation de laisser l’exploitation du permettre à l’amodiataire selon les termes du contrat

Du moment que le contrat d’amodiation entre en vigueur l’amodiant ne peut venir exploiter tout ou partie du périmètre qui as fait objet d’amodiation comme si il superposer l’exploitation avec le même titre.

  • L’obligation  de payer les impôts droits et taxes due à l’état au cas où l’amodiataire ne paie

Devant la loi l’amodiant et l’amodiataire  sont solidaires des dettes publiques  il peut arriver, que l’amodiant paie ou que ces biens soient recouvrer de manière forcé par l’Etat congolais pour défaut de paiement des dettes fiscales par l’amodiataire. Dans ce cas,  l’amodiant ne devrait pas croiser ces bras après paiement de cette dette ;  sinon ça sera un appauvrissement sans cause dans son chef, il sera cette fois-là en droit de faire un recours contre le redevable réel de la datte publique qui est l’amodiataire afin que,   ce dernier lui restitue ce qu’il a pu dépenser. Techniquement ou juridiquement ce droit de recours qu’à l’amodiant contre l’amodiataire s’appelle l’action récursoire

Parce que   le législateur congolais a voulu que les deux parties n’aient pas l’occasion de se soustraire aux obligations vis-à-vis de l’État. Il peut recouvrer les sommes dues chez l’une ou l’autre partie, et ce, sans considération de la qualité de chacune. Aussi faudra noter que,  parce que le titre minier est loué à l’amodiataire, qui exploite le périmètre, il n’est pas plausible de rendre l’amodiant solidairement responsable des obligations découlant du contrat d’amodiation. Logiquement, seul l’amodiataire devrait répondre des obligations à l’égard de l’État, comme c’est le cas à l’égard des tiers, puisque c’est lui qui tire profit du fait de l’exploitation du périmètre.[25] 

Pour notre part, nous estimons que l’obligation solidaire à laquelle  l’amodiant et l’amodiataire sont tenus vis-à-vis de l’État est juste préventive de  l’évasion fiscale par l’amodiataire.

  • Obligation du dépôt de demande d’enregistrement

Pour obtenir l’enregistrement d’un contrat  d’amodiation, l’amodiant dépose la demande d’inscription d’un contrat d’amodiation au cadastre minier central ou provincial, en trois exemplaires.[26]  Parce que le contrat d’amodiation est soumis aux règles d’enregistrement en vue de son opposabilité aux tiers, il doit, à cet effet, faire l’objet du dépôt au cadastre minier à cette fin, ce, par l’amodiant.

Comme dans l’amodiant, l’amodiataire a aussi une portion des obligations qu’il a vis-à-vis de l’Etat et vis-à-vis de l’amodiant pour son titre qu’il va exploiter, entre autre :

  • L’obligation de payer le loyer a l’amodiant 

Celle-ci est la première obligation de l’amodiataire  vis-à-vis de l’amodiant ; il se dégage des termes de l’article 177 du code minier que l’amodiataire  loue le titre minier  auprès de  l’amodiant moyennant rémunération, cette dernière est le prix que l’amodiataire paie à l’amodiant dans le cadre du contrat. Parce qu’il s’agissant d’un contrat synallagmatique la clause résolutoire est toujours sous-entendue, comme tel si l’amodiataire n’exécute pas à son obligation principe de payer la rémunération pour son occupation et exploitation du périmètre le contrat peut être résolu pour défaut de son exécution.

  • Obligation vis-à-vis de l’état de payer les impôts taxes et redevances

Il est le redevable réel des dettes fiscales vis-à-vis de l’État  et comme tel, il doit payer ces dettes conformément à la loi fiscale en vigueur en RDC.

  • Obligation de rembourser le montant de la dette fiscale couverte par l’amodiant 

Il est d’une évidence irréfragable que, l’amodiant et l’amodiataire est solidairement responsable devant l’administration fiscale pour les dettes fiscales non aspirées, en réalité le paiement de ces dettes ne pas à partager entre les deux parties au contrat plutôt c’est l’amodiataire est le redevable réel. Au nom de cette solidarité, ces biens peuvent faire l’objet d’un redressement ou recouvrement fiscale selon que possible, dans pareille circonstance il sera en droit d’exiger le remboursement auprès de l’amodiataire et ce dernier, sera en obligation de lui restituer pour des raisons ci- haut invoquées.

  • L’obligation de laisser à l’amodiant exercer son droit d’inspection ou visite sur le périmètre

A ce sujet il est prévu que l’amodiant peut nonobstant toute clause contraire, exercer, soit personnellement soit par tout expert de son choix dument mandaté par lui, un droit de surveillance et d’inspection des travaux de l’amodiataire.[27] En vertu de ce droit reconnu à l’amodiant par la loi, l’amodiataire est dans l’affirmative soumis à l’obligation légale d’admettre à l’amodiant exercer son droit de visite et d’inspection sans qu’il ne l’empêche en rien pour des raisons de l’exploitation.

  • L’obligation de ne pas sous-loue en tout ou partie du périmètre dont il exploite ne vertu du contrat d’amodiation

Cette obligation de l’amodiataire relève toujours des termes de la loi ; le code précise que l’amodiation consiste en un louage pour une durée fixe ou indéterminée, sans faculté de sous-louage de tout ou partie d’un droit minier d’exploitation…. Cela veut dire que même si les parties conviennent dans le contrat que l’amodiataire peut sous-louer une ou tout du permettre en vertu du contrat qu’il détient, cette clause reste illégale et par voie de conséquence ne peut être invoquée devant les tiers, c’est-à-dire aucune des parties ne peut s’en prévaloir pour des raisons de son illicéité.

Le contrat d’amodiation est un contrat comme tout autre mais  présente  des particularités et des risques au cas où une erreur est commise par l’une ou l’autre partie pendant la phase de sa conclusion, de la formalisation ou de son exécution. Comme tel, il doit répondre aux conditions de validité prévues à l’article 8 du décret du 30 juillet 1888 portant des contrats et les obligations conventuelles le cas échéant, satisfaire à l’obligation de son enregistrement pour étendre son champ d’application ou son opposabilité.

Seul le propriétaire de permis d’exploitation, d’exploitation de rejets, d’exploitation des petites mines en cours de validité peut amodier et ce, à une personne répondant aux  critères d’éligibilité aux droits miniers. Exclusion légale et ferme faite pour le louage de permis de recherche. L’obligation pour les parties d’intégrer indépendamment de toute leurs volontés des certaines clauses dans le contrat sous peine des sanctions de la nullité, la responsabilité solidaire des parties vis-à-vis de l’État reste d’ordre public quel que soit le prescrit contraire du contrat relativement à ça.

Vu la complexité du secteur  et la rigueur  législatif que présente le  processus de conclusion du contrat d’amodiation, la  formalisation et son exécution relativement aux obligations légales des parties, il se laisse comprendre que le contrat d’amodiation doit être conclu non seulement avec souplesse, mais aussi avec prudence et vigilance, faute de quoi l’une des parties peut facilement se voir  perdre ses fonds. Or, dans la pratique entrepreneuriale, ce qu’il faut craindre, ce sont les pertes occasionnées non seulement par la mauvaise compréhension de la règle des droits mais,  aussi sa mauvaise prendre. C’est ainsi qu’il est indispensable pour les parties au contrat d’amodiation de se faire assister et guider  dans l’ensemble du processus de conclusion de leur contrat en vue de prévenir les risques et dangers que présente le secteur, bien qu’il présente plus d’intérêt au moment actuel en RDC pour les sociétés minières.


Par Me Bonheur MASANKA, Avocat au barreau du Kasaï-oriental en RDC au cabinet RMK et associés : bureau de Mbuji-mayi, spécialiste en droit des sociétés commerciales, droit du travail et droit minier.

Email : bmasanka85@gmail.com


[1] Article 50 de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018.

[2] Article 64 de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018

[3] Article 86 de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018.

[4]Article 1 du  Décret du 30 juillet 1888 portant des contrats et les obligations conventionnelles

[5] Article 1.4 de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018.

[6] GARRY SAKATA M.TAWAB, Code Minier Expliqué, Analyse systématique et croisée avec le règlement minier, éditions Academia, Kinshasa 2022 p. 232

[7] Article 1.53 de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018.

[8] CIM’S MULUNGULUNGU NACHINDA, Code minier commenté et annoté, Ed Academia, Kinshasa 2018, p.269

[9] Article 177alineà2  de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018

9 Article 1.2  de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018[10]

[11] Article 270 de l’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêts économiques.

[12]Article 293 de l’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêts économiques

[13] Article 309 de l’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêts économiques

[14] Article 385de l’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêts économiques

[15] Article 853-1 de l’acte uniforme relatif aux droits des sociétés commerciales et du groupement d’intérêts économique.

[16] Article 23 de l’acte uniforme relatif aux droits des sociétés commerciales et du groupement d’intérêts économique.

[17] Article 23  de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018

[18] KALONGO MBIKAYI. Droit civil : Les obligations, Ed universitaires africains, Tome1, Kinshasa 2012, p. 123

[19] Article 179  de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018

[20] CIM’S MULUNGULUNGU NACHINDA., Op.cit., p.274

[21]CIM’S MULUNGULUNGU NACHINDA., Op.cit., p  274

[22] KALONGO MBIKAYI, Op.cit., p.14

[23] HILARI ALAIN BITSAMANA, Dictionnaire en Droit Ohada,  Pointe-Noire, le 29 mai 2003.p147

[24] JULLIOT DE LA MORANDIERE (L), Précis de droit civil, Tome 2, troisièmes éditions, Dalloz, paris, 1964, p.256

[25] CIM’S MULUNGULUNGU NACHINDA., Op.cit., p. 271

[26] Article 369 Décret numéro 038/2003 du 23 mars 2003 portant règlement minier tel que modifié et complété par le décret numero18/024 du 08 juin 2018

[27] Article 180  de la loi numéro 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier tel que modifiée et complétée par la loi numéro 18/001 du 09 mars 2018

100 sujets de mémoire innovants en droit public

Le droit public couvre un spectre vaste où certaines branches restent peu explorées, bien qu’elles soient stratégiques pour la gouvernance, l’innovation publique, et la protection de l’intérêt général. Cet article propose 100 sujets originaux dans 10 matières rares du droit public, pour orienter les choix académiques et professionnels des étudiants, chercheurs et praticiens désireux de se démarquer.

  1. La régulation juridique des villes intelligentes
  2. Le droit de préemption urbain et la politique foncière
  3. La lutte contre l’habitat insalubre : responsabilités et sanctions
  4. La planification urbaine durable et le droit
  5. L’expropriation pour aménagement urbain : procédure et contentieux
  6. Les droits des populations déplacées par les projets urbains
  7. L’encadrement juridique de la mixité sociale dans les zones urbaines
  8. La participation citoyenne aux projets d’urbanisme
  9. Le permis de construire numérique : enjeux et limites
  10. La protection juridique des espaces verts urbains

  1. La souveraineté numérique des États africains
  2. La cybersécurité des infrastructures critiques publiques
  3. La protection des données personnelles face aux cyberattaques étatiques
  4. Le cadre juridique de la cyberdéfense nationale
  5. La coopération interétatique contre la cybercriminalité
  6. La régulation des fake news en matière de sécurité publique
  7. La responsabilité de l’État pour défaillance en cybersécurité
  8. La protection des systèmes électoraux contre le piratage
  9. La cybersurveillance publique et les libertés fondamentales
  10. Les cyberattaques comme menace à la sécurité nationale

  1. La déforestation illégale et la responsabilité de l’État
  2. La gestion participative des forêts communautaires
  3. Le régime juridique des forêts classées
  4. La protection juridique des forêts sacrées
  5. L’exploitation forestière durable et le droit
  6. La traçabilité du bois et la lutte contre le commerce illicite
  7. La fiscalité forestière et le développement local
  8. Les concessions forestières et le respect des droits coutumiers
  9. Le reboisement obligatoire : étude de la législation comparative
  10. La gouvernance forestière et la lutte contre la corruption

  1. La reconnaissance du droit à l’eau potable comme droit fondamental
  2. La gestion décentralisée des services d’eau et d’assainissement
  3. La tarification sociale de l’eau en milieu urbain
  4. La régulation juridique des eaux transfrontalières en Afrique
  5. La protection des ressources en eau face à l’urbanisation
  6. La gouvernance participative des projets hydrauliques
  7. Le contentieux de l’accès à l’eau potable
  8. Les partenariats public-privé dans le secteur de l’eau
  9. L’assainissement écologique et le droit public
  10. La prévention juridique de la pollution des eaux souterraines

  1. La protection des biens culturels en période de conflit armé
  2. L’application du droit international humanitaire aux groupes armés non étatiques
  3. La qualification des conflits armés non internationaux
  4. L’accès humanitaire et la souveraineté étatique
  5. La protection des travailleurs humanitaires en zones de conflit
  6. L’impact des nouvelles technologies sur le droit humanitaire
  7. Le droit humanitaire environnemental : concept émergent
  8. La responsabilité pénale individuelle pour crimes de guerre environnementaux
  9. La mise en œuvre du droit humanitaire par les juridictions nationales africaines
  10. Le droit à l’éducation en contexte humanitaire

  1. La responsabilité de l’État face aux catastrophes prévisibles
  2. Le droit à l’information des populations exposées
  3. La prévention juridique des risques sismiques
  4. La gouvernance publique des risques volcaniques
  5. L’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles
  6. La relocalisation des populations sinistrées : aspects juridiques
  7. La planification urbaine et la prévention des inondations
  8. Le rôle des collectivités territoriales dans la gestion des catastrophes
  9. L’alerte précoce et la responsabilité administrative
  10. Le cadre juridique international de la gestion des catastrophes

  1. La régulation des services de transport urbain collectif
  2. La sécurité juridique des passagers dans les transports interurbains
  3. Les partenariats public-privé dans le transport ferroviaire
  4. La modernisation des infrastructures de transport et le droit
  5. La tarification sociale et le service public de transport
  6. Le transport artisanal et la régulation publique
  7. L’accessibilité des personnes handicapées dans les transports publics
  8. La responsabilité administrative en cas d’accident collectif
  9. La mobilité durable et le cadre juridique
  10. La gouvernance métropolitaine des transports urbains

  1. La politique culturelle nationale et le cadre juridique
  2. La protection des expressions culturelles traditionnelles par le droit public
  3. La régulation des festivals et manifestations culturelles
  4. Le financement public de la création artistique
  5. La gouvernance publique des institutions culturelles
  6. La responsabilité publique pour dégradation du patrimoine culturel
  7. Les droits culturels comme droits fondamentaux
  8. La diplomatie culturelle et le droit international public
  9. La fiscalité culturelle et l’accès aux biens culturels
  10. La régulation des industries culturelles numériques

  1. La régulation des monopoles publics et la concurrence
  2. Le contrôle des concentrations dans les marchés publics
  3. Les aides d’État et le droit public économique
  4. La concurrence et la régulation des services publics marchands
  5. La lutte contre les ententes illicites dans les marchés publics
  6. L’application du droit de la concurrence aux entreprises publiques
  7. La régulation des tarifs administrés et la concurrence
  8. La concurrence et l’accès aux infrastructures essentielles
  9. La politique de concurrence régionale dans l’UEMOA
  10. La protection des consommateurs et le droit public de la concurrence

  1. Le régime disciplinaire des magistrats
  2. La procédure disciplinaire des fonctionnaires territoriaux
  3. La protection juridictionnelle des agents sanctionnés
  4. Le droit disciplinaire des enseignants du public
  5. La proportionnalité des sanctions disciplinaires
  6. Le cumul des sanctions disciplinaires et pénales
  7. La motivation des décisions disciplinaires
  8. Le contrôle du juge administratif sur la discipline publique
  9. La réforme des conseils de discipline en Afrique francophone
  10. Le droit disciplinaire et les libertés fondamentales

Ces 100 sujets explorent des matières rares et stratégiques du droit public, encore peu étudiées mais cruciales pour l’avenir de la gouvernance, de la sécurité publique, de la culture, et de l’innovation institutionnelle.


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Être jugé sur ses compétences, pas sur sa couleur, son sexe ou son origine : un droit, pas un privilège

La lutte contre les discriminations constitue aujourd’hui une pierre angulaire du droit du travail, tant au niveau national qu’international. Elle répond à une exigence universelle : assurer l’égalité de traitement entre travailleurs, indépendamment de caractéristiques personnelles étrangères à leur compétence ou à leur rendement. En droit ivoirien, cette exigence a été consacrée dans l’article 4 du Code du travail, lequel énumère une série de critères prohibés qui ne peuvent fonder les décisions de l’employeur en matière d’embauche, de formation, d’avancement, de rémunération ou de rupture du contrat de travail[1].

L’importance de cette disposition est double. D’une part, elle consacre une véritable limitation du pouvoir patronal, qui, malgré sa large marge de manœuvre dans la direction de l’entreprise, ne peut agir de manière arbitraire ou discriminatoire. Comme le soulignent Bergeron et Gaudu, « le droit du travail est, avant tout, un droit protecteur, forgé pour corriger l’inégalité structurelle existant entre employeur et salarié »[2]. D’autre part, elle inscrit le droit ivoirien dans une dynamique de convergence avec les standards internationaux, notamment ceux issus des conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT), ainsi qu’avec le droit français et européen, qui exercent une influence notable sur la législation ivoirienne[3].

L’article 4 du Code du travail ivoirien fixe une liste de critères précis que l’employeur ne peut prendre en considération pour justifier ses décisions en matière de gestion du personnel. Il s’agit du sexe, de l’âge, de l’ascendance nationale, de la race, de la religion, de l’opinion politique et religieuse, de l’origine sociale, de l’appartenance ou non-appartenance syndicale, de l’activité syndicale, de la séropositivité au VIH ou au Sida (avérés ou présumés), ainsi que du handicap[4].

Cette disposition est remarquable à plusieurs égards. Elle consacre une protection spécifique contre les discriminations liées au VIH et au Sida, un phénomène particulièrement sensible en Afrique subsaharienne où la prévalence de cette maladie et les stigmates sociaux qui l’accompagnent sont importants. Le législateur ivoirien a donc entendu aller au-delà des standards internationaux en ciblant un critère adapté au contexte local. Comme l’explique Manh, « la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH demeure un obstacle majeur à leur insertion professionnelle »[5].

Par ailleurs, la mention de l’ascendance nationale, plutôt que de la nationalité, vise à sanctionner des discriminations indirectes fondées sur les origines familiales ou ethniques, même lorsque le salarié possède la nationalité ivoirienne. Ce choix démontre une volonté de répondre à des réalités sociologiques propres au pays et s’inscrit dans la logique de la Convention n° 111 de l’OIT sur la discrimination en matière d’emploi et de profession[6].

Comparativement, le droit français, à travers l’article L. 1132-1 du Code du travail, offre une liste beaucoup plus large, incluant notamment l’orientation sexuelle, l’apparence physique ou encore les caractéristiques génétiques. Certains auteurs comme soulignent que l’élargissement excessif des critères peut entraîner une certaine insécurité juridique et diluer la portée de la norme[7]. À l’inverse, Alain Supiot considère que l’accumulation de critères traduit une volonté d’adapter la règle aux évolutions sociales, mais qu’elle nécessite une interprétation prudente par les juges[8].

Ainsi, la liste ivoirienne apparaît comme un compromis entre sobriété et efficacité : elle ne retient que les critères les plus sensibles et les plus pertinents au regard des réalités sociales et économiques locales, tout en intégrant une innovation majeure, celle de la protection spécifique des personnes vivant avec le VIH.

L’article 4 du Code du travail précise que l’interdiction de discrimination s’applique à un champ particulièrement vaste : l’embauche, la conduite et la répartition du travail, la formation professionnelle, l’avancement, la promotion, la rémunération, l’octroi d’avantages sociaux, la discipline et la rupture du contrat de travail[9]. Autrement dit, l’ensemble de la vie contractuelle du salarié est couvert par ce principe.

En matière d’embauche, il est ainsi interdit à un employeur de refuser l’engagement d’un candidat au motif de sa religion, de son sexe ou de son appartenance syndicale. En droit français, la jurisprudence a déjà condamné des refus d’embauche fondés sur la grossesse d’une candidate[10]. Il en irait de même en droit ivoirien, où une telle décision violerait frontalement l’article 4.

Pendant l’exécution du contrat, la protection joue également dans la répartition du travail, l’accès à la formation et les perspectives de promotion. Un employeur ne peut, par exemple, refuser d’envoyer un salarié en formation en raison de son orientation politique ou de son appartenance à un syndicat. De même, deux travailleurs effectuant un travail de valeur équivalente doivent bénéficier de la même rémunération, quelle que soit leur origine sociale ou leur religion.

Enfin, la rupture du contrat de travail est particulièrement encadrée par cette règle. Le licenciement fondé sur un critère discriminatoire est nul et ouvre droit à des dommages-intérêts au profit du salarié. Cette logique est conforme aux standards européens et internationaux, qui considèrent la non-discrimination comme un principe d’ordre public social[11].

Le dispositif ivoirien s’inscrit dans une logique d’alignement avec les normes internationales. La Convention n° 111 de l’OIT sur la discrimination en matière d’emploi et de profession (1958) prohibe toute distinction fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale[12]. La Convention n° 100 sur l’égalité de rémunération (1951) consacre, quant à elle, l’égalité de traitement entre hommes et femmes[13].

Le droit européen va encore plus loin. La directive 2000/78/CE interdit toute discrimination fondée sur la religion, le handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle[14]. Le droit français, influencé par ces normes, élargit considérablement la liste des critères. Toutefois, l’approche ivoirienne, plus restreinte mais plus ciblée, permet une meilleure lisibilité de la règle et une adaptation plus directe aux besoins locaux. Comme le souligne Jean-Philippe Lhernould, « la construction européenne a exercé un effet de cliquet, poussant les législations nationales à élargir toujours plus le champ des critères prohibés »[15].

Cette différence illustre deux philosophies juridiques. Le modèle européen vise l’exhaustivité, afin de couvrir toutes les formes possibles de discriminations, même les plus récentes. Le modèle ivoirien, quant à lui, choisit de cibler les critères les plus pertinents pour sa société, afin de renforcer l’efficacité de la norme.

L’application effective de ces règles pose toutefois plusieurs défis. Le premier est celui de la preuve. Comment un salarié peut-il démontrer qu’il a été discriminé ? La réponse se trouve dans la jurisprudence comparée. En France, la Cour de cassation a posé le principe de l’aménagement de la charge de la preuve : il suffit au salarié d’apporter des éléments laissant supposer une discrimination, et il appartient ensuite à l’employeur de prouver que sa décision repose sur des motifs objectifs étrangers à toute discrimination[16]. Une telle solution mériterait d’être consacrée par la jurisprudence ivoirienne afin de garantir l’efficacité de l’article 4.

Le second enjeu est celui des sanctions. La loi prévoit l’octroi de dommages-intérêts proportionnés au préjudice subi. Contrairement au système américain, qui autorise des dommages-intérêts punitifs, le droit ivoirien conserve une logique réparatrice. Toutefois, comme le relève Michel Despax, « une sanction seulement réparatrice risque de manquer d’effet dissuasif dans un contexte où les discriminations sont profondément enracinées »[17].

Enfin, l’absence de jurisprudence abondante en Côte d’Ivoire limite pour l’instant la portée pratique de la règle. Mais à mesure que les litiges se multiplieront, notamment avec la montée en puissance des revendications sociales et syndicales, il est probable que les juges ivoiriens développeront une jurisprudence protectrice, à l’image de leurs homologues français[18].

Le régime ivoirien de lutte contre les discriminations au travail, centré sur l’article 4 du Code du travail, illustre une volonté claire de concilier la protection de la dignité du salarié et la sécurité juridique des relations professionnelles. En adoptant une liste de critères adaptée à ses réalités sociales, le législateur ivoirien a su cibler les formes de discrimination les plus répandues et les plus dangereuses pour la cohésion sociale.

Toutefois, ce dispositif demeure perfectible. Il gagnerait à être complété par une jurisprudence plus abondante, par une meilleure sensibilisation des employeurs et par un renforcement des sanctions. L’expérience française et européenne, plus riche en contentieux, pourra servir de source d’inspiration pour l’avenir.

Ainsi, la lutte contre les discriminations en droit du travail ivoirien ne se réduit-il pas à une règle abstraite. Elle traduit un engagement profond en faveur des droits fondamentaux et une volonté de bâtir un marché du travail plus juste, plus équitable et plus respectueux de la dignité humaine.

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Me Luc KOUASSI

Juriste Consultant Polyglotte| Formateur | Spécialiste en rédaction de contrats, d’actes extrajudiciaires, d’articles juridiques et des questions relatives au droit du travail | Politiste | Bénévole humanitaire.

denisjunior690@gmail.com / +225 07 795 704 35 / +90 539 115 55 28


[1] Loi n° 2015-532 du 20 juillet 2015 portant code du travail ivoirien, art. 4.

[2] F. Bergeron & F. Gaudu, Droit du travail, Dalloz, 2024, p. 220.

[3] A. Supiot, Critique du droit du travail, PUF, 2015, p. 76.

[4] Ibid., art. 4.

[5] Y. B. Manh, La dignité du salarié en droit ivoirien du travail, Revista Estudios Jurídicos, Segunda Época, 2023, 39 p., e7887, https://doi.org/10.17561/rej.n23.7887

[6] OIT, Convention n° 111 sur la discrimination en matière d’emploi et de profession, 1958.

[7] Collectif, Droit du travail, emploi, entreprise, IRJS Editions, 2014, p. 277.

[8] A. Supiot, Op. cit., p. 81.

[9] Ibid., art. 4.

[10] Cass. soc., n° 00-45.135, 30 avr. 2003.

[11] OIT, Convention n° 111

[12] Ibid.

[13] OIT, Convention n° 100 sur l’égalité de rémunération, 1951.

[14] Directive 2000/78/CE du du 27 novembre 2000.

[15] J.-P. Lhernould, Droit du travail : Relations individuelles, Edito, 2003, p. 261.

[16] Cass. soc., n° 98-44.366, 17 oct. 2000.

[17] M. Despax, Droit du travail, PUF, 2001, 128 p.

[18] Cass. soc., n° 12-28.776, 15 janv. 2014.

Les principes en matière de gestion et de protection des ressources en eaux transfrontalières

La gestion durable des ressources en eau transfrontalières est devenue un enjeu central du droit international contemporain, particulièrement en Afrique où la majorité des bassins hydrologiques traversent plusieurs États souverains. Par exemple, la Convention sur la gestion durable du lac Tanganyika, signée en 1999, incarne une réponse juridique régionale à cette problématique complexe[1]. Les concepts clés abordés comprennent la notion de ressources en eau transfrontalières, la gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) et les principes directeurs qui régissent leur utilisation et protection collective. Les ressources en eau transfrontalières[2]. Ce sont les ressources en eau, notamment les fleuves, rivières, lacs, nappes phréatiques, qui traversent ou délimitent plusieurs États. Leur caractère transfrontalier implique que leur gestion, utilisation et protection nécessitent la coopération et la coordination entre les pays concernés afin d’assurer une exploitation équitable et durable, tout en préservant la qualité et la quantité de l’eau pour tous les utilisateurs. La GIRE est un processus de gestion coordonnée et durable des ressources en eau, pensé à l’échelle du bassin versant. Elle vise à intégrer tous les usages (domestiques, agricoles, industriels, environnementaux), les acteurs et les enjeux socio-économiques et environnementaux pour garantir l’équilibre entre l’offre et la demande en eau sans compromettre la pérennité des écosystèmes. Elle promeut une gouvernance participative impliquant toutes les parties prenantes et une coordination harmonieuse des politiques et pratiques de gestion de l’eau en tenant compte des interactions complexes entre les composantes naturelles et humaines. Les principes directeurs de l’utilisation et de la protection collective. Ces principes guident la gestion des ressources en eau transfrontalières pour assurer leur utilisation équitable, durable et pacifique. Ils comprennent notamment : l’équité dans l’accès à l’eau, la prévention des dommages significatifs à l’environnement, la coopération entre États dans le partage des informations et la gestion commune, la sauvegarde de la qualité de l’eau, et la participation effective des parties prenantes dans les décisions relatives à la ressource en eau. Ces principes sont souvent issus de conventions internationales et d’accords régionaux encadrant la gestion des eaux transfrontalières[3]. Ces concepts sont essentiels pour garantir une exploitation durable, équilibrée et harmonisée des ressources en eau partagées, particulièrement en zones transfrontalières[4] où les enjeux sont complexes et multidimensionnels. Historiquement, le droit international de l’eau s’est structuré autour d’instruments majeurs comme la Convention d’Helsinki de 1992 et la Convention de New York de 1997, complétés par une riche jurisprudence internationale qui clarifie l’application de ces normes. L’intérêt principal est de garantir un usage équilibré et durable de ces ressources, de prévenir les conflits et d’assurer la conservation des écosystèmes aquatiques. La question juridique posée est la suivante : quels sont les principes fondamentaux régissant la gestion et la protection des ressources en eau transfrontalières et comment s’appliquent-ils concrètement ? L’hypothèse formulée est que, si ces principes sont bien établis, leur mise en œuvre est confrontée à des défis croissants qui nécessitent une évolution adaptative du cadre juridique. L’objectif est de démontrer la pertinence de ces principes tout en analysant leurs limites et les voies d’amélioration. Cet article se développera en deux parties : la première exposera les principes fondamentaux du droit international des eaux transfrontalières, la seconde analysera leur mise en œuvre et les défis qu’ils rencontrent, notamment à travers l’exemple de la convention du lac Tanganyika[5].

Il convient tout d’abord d’examiner les principes directeurs qui régissent l’utilisation et la protection des ressources en eau partagées par plusieurs États (A), ensuite les règles fondamentales du droit se structurant autour de l’équité dans l’utilisation et de la prévention de tout dommage transfrontalier significatif (B).

Le principe d’utilisation équitable et raisonnable constitue la pierre angulaire du droit international des eaux transfrontalières. Il est expressément consacré à l’article 5 de la Convention de New York de 1997 qui stipule que « les États du cours d’eau utilisent sur leur territoire le cours d’eau international de manière équitable et raisonnable ». Ce principe implique une analyse casuistique tenant compte de facteurs hydrologiques, géographiques, socio-économiques et environnementaux. Les critères retenus comprennent la contribution hydrologique de chaque État au bassin, les besoins de la population, les effets des utilisations existantes ou prévues sur les autres États, ainsi que la disponibilité d’alternatives et la nécessité de conservation. La Commission du droit international a souligné son caractère évolutif, tenant compte des changements de circonstances. La Cour internationale de justice (CIJ), dans l’affaire du différend frontalier terrestre et maritime (Cameroun c. Nigeria, 2002), a réaffirmé l’importance de ce principe dans la gestion équilibrée des ressources naturelles transfrontalières. F. Francioni souligne que ce principe « impose une gestion équilibrée, où la souveraineté des États est limitée par les intérêts partagés et la nécessité de durabilité ».[6]

Le principe d’utilisation équitable et raisonnable constitue la pierre angulaire du droit international de l’eau. Consacré par l’article 5 de la Convention de New York et l’article 2.2(c) de la Convention d’Helsinki, ce principe établit que « les États du cours d’eau utilisent sur leur territoire le cours d’eau international de manière équitable et raisonnable ». L’évaluation du caractère équitable et raisonnable s’appuie sur des facteurs pertinents, notamment : facteurs géographiques et hydrographiques (étendue et contribution du bassin sur le territoire de chaque État, climat et conditions météorologiques et configuration géologique et géomorphologique), facteurs socio-économiques (besoins sociaux et économiques des États concernés, population dépendante du cours d’eau et effets de l’utilisation sur d’autres États), facteurs environnementaux (conservation, protection et mise en valeur des ressources, disponibilité d’alternatives et durabilité écologique des utilisations). Ce principe présente un caractère dynamique : ce qui est équitable et raisonnable à un moment donné peut évoluer en fonction des changements de circonstances, des besoins des populations ou des nouvelles connaissances scientifiques. Le principe d’utilisation équitable et raisonnable définit les conditions du partage des eaux, mais il doit impérativement être complété par une obligation de prévention afin d’éviter que les usages ne causent des dommages aux autres États riverains.

Complémentaire au principe d’utilisation équitable, l’obligation de prévention vise à empêcher que les activités menées dans un État causent des dommages graves à d’autres États ou à l’environnement commun. Article 7 de la Convention de New York oblige les États « à prendre toutes les mesures appropriées pour prévenir des dommages significatifs ». La CIJ, dans l’affaire des Papeteries de Pulp Mills (Argentine c. Uruguay, 2010), a détaillé cette obligation, affirmant que les États doivent s’abstenir d’activités dangereuses sans prendre de précautions indispensables, engageant une obligation de diligence[7]. La Commission du Bassin du Niger (CBN) illustre la coopération institutionnelle réussie en Afrique de l’Ouest, favorisant la gestion durable et la prévention des conflits liés aux usages multiples (agriculture, énergie, eau potable). La CIJ dans l’affaire du Nil (Éthiopie c. Égypte) a souligné l’importance de la coopération en bonne foi entre États en basant le règlement des différends sur le dialogue et la négociation. La Commission du droit international précise que cette obligation est une obligation de moyens (due diligence) et non de résultat et qu’elle comprend la mise en œuvre de mesures techniques, institutionnelles et législatives adaptées. S. Swain met en lumière la dualité entre les principes d’utilisation raisonnable et de prévention, insistant sur la nécessité d’arbitrer lorsqu’un usage peut causer un risque significatif.[8]

Le principe de prévention des dommages significatifs impose aux États l’obligation de « prendre toutes les mesures appropriées pour prévenir de causer un dommage significatif » aux autres États du cours d’eau, Article 7 de la Convention de New York. Cette obligation comprend : prévention primaire (éviter la survenance de dommages), prévention secondaire (minimiser les dommages en cas d’occurrence) et réparation (compenser les dommages causés malgré les précautions). L’obligation porte sur les moyens (obligation de comportement) plutôt que sur le résultat (obligation de résultat). Les États doivent faire preuve de « diligence due » en adoptant les mesures préventives appropriées selon les circonstances.

Après avoir exposé les principes fondamentaux qui régissent le droit international des ressources en eau transfrontalières, il convient à présent d’analyser les défis et mécanismes pratiques permettant leur mise en œuvre effective en contexte transfrontalier. Si les principes directeurs posent les bases juridiques essentielles, la réalité opérationnelle appelle à examiner les modalités concrètes de coopération et de résolution des différends.

Au-delà des principes théoriques, la mise en œuvre concrète de ce droit engage des mécanismes institutionnels et procéduraux indispensables pour assurer la coopération et résoudre les différends (A). Toutefois, la mise en place effective du droit international des eaux transfrontalières repose sur des outils de coopération et des procédures de notification et de règlement des conflits adaptés aux spécificités des bassins internationaux (B).

L’obligation de coopération figure à l’article 8 de la Convention de New York, qui dispose que « les États du cours d’eau coopèrent en toute bonne foi », ce qui implique la coordination des politiques, le partage des données hydrologiques et environnementales, la mise en place d’organismes communs et la gestion intégrée[9]. L’exemple de l’Autorité du Lac Tanganyika (ALT)[10], créée par la Convention de 1999, illustre cette coopération institutionnelle avec un comité de gestion régional et des mécanismes de coordination des plans de gestion des pêches ou de surveillance environnementale[11]. Cependant, la coopération souffre souvent de limites dues à des divergences d’intérêts, des ressources financières insuffisantes et un déficit de capacités techniques locales. Les pratiques des organismes tels que l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS)[12] montrent l’efficacité de la coopération formelle, tandis que la Commission internationale du bassin Congo-Oubangui-Sangha[13] (CICOS) illustre les obstacles liés à la taille et à la complexité du bassin. L’obligation de coopérer constitue le principe structurant de la gouvernance des eaux transfrontalières. Cette coopération se décline en plusieurs modalités : coopération institutionnelle (création d’organismes de bassin conjoints), mise en place de mécanismes de coordination, l’harmonisation des politiques nationales, la coopération informationnelle ( l’échange régulier de données et d’informations, le partage des connaissances scientifiques et techniques et la transparence dans les projets de développement), la coopération opérationnelle ( coordination des utilisations, gestion intégrée des ressources, actions communes de protection). L’Afrique offre plusieurs exemples remarquables d’application de ce principe : Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal (OMVS) : Créée en 1972 par le Mali, la Mauritanie et le Sénégal, elle constitue l’un des modèles les plus aboutis de coopération transfrontalière. La coopération institutionnelle représente ainsi le socle indispensable d’une gestion concertée des eaux transfrontalières, mais elle doit s’accompagner de procédures claires de notification, consultation et règlement des différends pour prévenir les tensions potentielles.

La notification préalable ancrée dans l’article 12 de la Convention de New York impose d’informer les autres États sur tout projet susceptible d’avoir un impact négatif important. Cette notification est suivie d’une consultation de bonne foi au moins six mois avant la mise en œuvre. L’évaluation d’impact environnementale transfrontalière est un instrument clé pour garantir la transparence et la prise en compte des effets cumulés[14]. La Convention de New York, articles 12 à 14, fixe l’obligation de notifier les États concernés en amont des projets hydrauliques pouvant affecter le bassin. Cette disposition a été appliquée par la Commission du Bassin du Fleuve Sénégal pour la construction de barrages. Le règlement des différends applique une hiérarchie graduée : négociation, médiation, arbitrage et, en dernier recours, la Cour internationale de justice. Cette approche est reprise par la Convention sur le lac Tanganyika (article 29), qui exclut la voie judiciaire comme première option.

L’affaire Nicaragua c. Costa Rica[15] (2015) illustre le rôle de la médiation dans le traitement des différends hydriques, tandis que l’affaire du Diffrend frontalier Cameroun/Nigeria[16] montre la saisine finale de la CIJ en cas d’échec des moyens pacifiques. A. Kindier insiste sur la nécessité d’adapter la procédure aux contextes politiques et culturels régionaux, insistant sur le rôle crucial des mécanismes diplomatiques.[17]L’évolution du droit international de l’eau s’oriente vers un « droit global de l’eau » intégrant : les droits humains à l’eau et à l’assainissement, la gouvernance globale des ressources hydriques, les standards environnementaux internationaux, la justice climatique hydrique, les innovations technologiques (intelligence artificielle, télédétection, blockchain) ouvrent de nouvelles perspectives pour le monitoring en temps réel des reressources. Les autres axes pourraient être la prédiction des conflits potentiels, la transparence dans la gouvernance, l’optimisation des allocations ainsi que l’évolution vers une coopération renforcée impliquant : l’intégration régionale approfondie, la solidarité hydrique inter-bassins, la gouvernance adaptative face aux incertitudes et la diplomatie de l’eau préventive.

Le principe de notification préalable impose aux États d’informer les autres États du bassin de tout projet susceptible d’avoir des « effets négatifs significatifs » sur les eaux transfrontalières, UNECE Guide pratique. Cette notification doit être préalable, suffisamment en amont pour permettre l’évaluation, détaillée, c’est-à-dire contenant les informations techniques nécessaires et accessible, dans une langue comprise par les États concernés. Suite à la notification, s’ouvre une période de consultation permettant : l’évaluation conjointe des impacts potentiels, l’identification de mesures d’atténuation, la négociation d’ajustements au projet et la recherche de solutions alternatives. Cette consultation doit se dérouler « de bonne foi » et dans un « délai raisonnable », généralement fixé à six mois par les conventions internationales. L’évaluation d’impact environnemental transfrontalière constitue un instrument essentiel de mise en œuvre des principes précédents. Elle comprend : l’évaluation scientifique, l’analyse des impacts hydrologiques, l’évaluation des effets écologiques, la participation publique, la consultation des populations affectées, la prise en compte des savoirs locaux, la transparence dans le processus décisionnel, le suivi et monitoring, la surveillance continue des impacts, l’ajustement des mesures correctives et la révision périodique des évaluations.

L’examen des principes en matière de gestion et de protection des ressources en eau transfrontalières met en évidence un corpus juridique solide, articulé autour de l’utilisation équitable, de la prévention des dommages, de la coopération et de mécanismes procéduraux encadrés. Les principes de gestion et de protection des ressources en eau transfrontalières constituent un corpus juridique[18] en constante évolution, adapté aux défis contemporains[19]. L’expérience du lac Tanganyika[20], analysée à travers le prisme de ces principes universels, démontre à la fois leur pertinence et les défis de leur mise en œuvre concrète. L’utilisation équitable et raisonnable, la prévention des dommages significatifs, l’obligation de coopération, les procédures de notification et de consultation, ainsi que les mécanismes de règlement des différends forment un ensemble cohérent qui guide la gouvernance des eaux partagées. L’adaptation de ces principes aux enjeux du XXIe siècle, changement climatique, croissance démographique, urbanisation, sécurité hydrique nécessite une évolution constante du droit international de l’eau. Les innovations institutionnelles développées dans les bassins africains, notamment, offrent des modèles inspirants pour une gouvernance hydrique plus inclusive[21], adaptative et durable. L’avenir de la coopération dans le domaine des eaux transfrontalières dépendra de notre capacité collective à concilier souveraineté étatique et solidarité hydrique, développement économique et préservation environnementale[22], besoins actuels et droits des générations futures. Les principes juridiques internationaux fournissent le cadre normatif nécessaire ; leur effectivité dépend de la volonté politique des États et de l’engagement des sociétés civiles. Dans cette perspective, la Convention sur la gestion durable du lac Tanganyika constitue un exemple concret d’application régionale de ces principes universels, avec ses succès et ses limitations, ses innovations et ses défis. Elle témoigne de la vitalité du droit international de l’eau et de sa capacité d’adaptation aux réalités locales tout en respectant les standards globaux de gouvernance hydrique. La Convention du lac Tanganyika est une illustration exemplaire d’application régionale de ces normes. L’hypothèse selon laquelle ces principes doivent s’adapter continuellement aux défis modernes, changement climatique, pression démographique, complexité géopolitique s’est confirmée. La réalisation de l’objectif général exige de renforcer les institutions comme l’ALT, de clarifier et de harmoniser les législations nationales, de mieux financer la coopération et d’intégrer la participation citoyenne. Les solutions[23] possibles comprennent le recours accru aux technologies de suivi, la formation technique des parties prenantes, ainsi qu’un dialogue politique renforcé. La gouvernance de l’eau doit conjuguer sécurité hydrique, développement durable et prévention des conflits. La perspective de création d’un droit global de l’eau, combinant justice climatique et droits humains, et fondée sur les principes déjà établis, apparaît comme une évolution nécessaire pour relever les défis du XXIe siècle.


Par Président OBAMBI Wilfrid Vivien

Magistrat et Conseiller à la Cour d’Appel de Dolisie (Congo). Ancien Juge au Tribunal de Grande Instance de Pointe-Noire, il a également exercé la fonction de Président du Tribunal du travail de Pointe-Noire.

Il est par ailleurs Secrétaire adjoint du Réseau Africain des Magistrats de Propriété Intellectuelle (RAMPI), ainsi que Secrétaire chargé des affaires administratives, juridiques et du contentieux du Réseau des Experts en Propriété Intellectuelle du Congo (REPIC).

Enfin, il figure sur la liste des médiateurs neutres de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).

Linkedin : https://linkedin.com/in/wilfrid-vivien-obambi


[1] A. Komlan, « Les eaux transfrontalières et le droit international de l’eau », Genève Water Hub, 2024, p. 5-18.

[2] K. Sangbana, « Les Principes du droit international de l’eau », Commission Économique des Nations Unies pour l’Afrique Centrale (CEEAC), 2017, p. 12-25.

[3] Analyse comparative de la « Convention sur la gestion durable du lac Tanganyika », texte officiel, 1999, et Convention ABAKIR, Esi Preprints, 2025, p. 33-45.

[4] Frédéric Julien (dir.), La gestion intégrée des ressources en eau en Afrique subsaharienne, Presses de l’Université du Québec, 2023, p. 101-130.

[5] « Convention sur la gestion durable du lac Tanganyika », texte officiel, Journal Officiel des États parties, 1999.

[6] F. Francioni, « Droit international de l’environnement », Dalloz, 2010, p. 134-135.

[7] CIJ, Affaire des Papeteries de Pulp Mills (Argentine c. Uruguay), 2010.

[8] S. Swain, « Prevention of significant harm and equitable utilization in international water law, » 2015.

[9] Convention sur la gestion durable du lac Tanganyika, art. 29.

[10] Rapport Comité de gestion ALT, 7sur7.cd, 2024.

[11] Autorité du Lac Tanganyika, Rapport annuel 2024.

[12] WWF, OMVS : un modèle de coopération, 2021 ; CICOS, Rapport 2023.

[13] Commission Économique des Nations Unies pour l’Afrique Centrale, « Progrès de la coopération dans les eaux transfrontalières en Afrique », Rapport 2022, p. 29-35.

[14] Guide UNECE sur l’évaluation impact environnemental transfrontalière, 2018.

[15] CIJ, Affaire Nicaragua c. Costa Rica, 2015.

[16] CIJ, Affaire du différend frontalier terrestre et maritime (Cameroun c. Nigeria), 2002.

[17] A. Kindier, « Le droit relatif aux utilisations des cours d’eau internationaux, » 2008.

[18] A., Poydenot  « Le régime juridique des ressources en eau internationales », Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 2008, p. 23-45.

[19] A., Komlan, « Les eaux transfrontalières et le droit international de l’eau », Genève Water Hub, 2024, p. 10-28.

[20] Convention sur la gestion durable du lac Tanganyika, 1999, Journal Officiel des États parties, Articles 4 à 10.

[21] Julien F. (dir.), La gestion intégrée des ressources en eau en Afrique subsaharienne, Presses de l’Université du Québec, 2023, p. 110-142.

[22] C.F Boisson de Chazournes., « Droit international de l’environnement et gestion des ressources en eau transfrontalières », Revue Juridique de l’Environnement, 2020, vol. 45, p. 52-70.

[23] International Water Law Project, « The Handbook for Integrated Water Resources Management in Transboundary Basins », GWP-INBO, 2012, p. 15-40.

Comment éviter que l’autre partie organise son insolvabilité ?

Face aux difficultés économiques, certains débiteurs, animés d’une volonté malicieuse ou simplement mus par la tentation d’échapper à leurs obligations, peuvent chercher à organiser leur insolvabilité. Cela signifie qu’ils mettent volontairement leur patrimoine à l’abri des poursuites, par exemple en transférant des biens à des proches, en procédant à des donations opportunes, en multipliant les dépenses injustifiées ou en créant artificiellement des dettes. Cette pratique, bien que réprouvée par le droit, demeure une réalité préoccupante pour les créanciers.

Le législateur et la jurisprudence ont donc mis en place un arsenal destiné à prévenir ou sanctionner ces comportements. En amont, le créancier peut recourir aux mesures conservatoires et au référé, qui visent à figer le patrimoine du débiteur avant qu’il ne disparaisse. En aval, si la fraude est déjà consommée, il dispose de l’action paulienne, qui permet de rendre inopposables les actes accomplis en fraude de ses droits. En droit OHADA, applicable en Côte d’Ivoire, cet ensemble est organisé par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution (AUPSRVE), qui consacre l’efficacité et la rapidité des mesures conservatoires[1]. Le droit français, quant à lui, prévoit des mécanismes proches dans le Code des procédures civiles d’exécution (CPCE) et dans le Code civil.

L’objet de cette étude est d’examiner les conditions dans lesquelles un créancier peut s’opposer à l’organisation frauduleuse de l’insolvabilité de son débiteur, en mettant en évidence les outils de prévention (I), les remèdes lorsque la fraude est déjà réalisée (II), et les enseignements d’un cas pratique illustratif (III).

La saisie conservatoire constitue l’arme principale du créancier soucieux de protéger ses droits. En droit français, l’article L. 511-1 CPCE autorise « toute personne dont la créance paraît fondée en son principe » à solliciter du juge une mesure conservatoire, à condition que des circonstances démontrent que le recouvrement est menacé[2]. La mesure peut prendre la forme d’une saisie conservatoire (sur comptes bancaires, créances, biens meubles) ou d’une sûreté judiciaire (inscription provisoire d’hypothèque). L’effet de la saisie est radical : les biens visés deviennent indisponibles, empêchant le débiteur de les aliéner au détriment du créancier.

En droit OHADA, l’AUPSRVE[3] reprend la même logique. Les articles relatifs aux saisies conservatoires exigent deux conditions : une créance paraissant fondée en son principe et un risque avéré de non-recouvrement. La jurisprudence régionale et nationale confirme que la simple défiance du créancier ne suffit pas : il faut démontrer, par des indices objectifs, que le débiteur cherche réellement à organiser son insolvabilité (par exemple des transferts suspects, des cessions anormales ou l’absence de contrepartie)[4].

Le créancier agit toutefois à ses risques et périls : si la saisie s’avère injustifiée, il peut être condamné à réparer le préjudice causé au débiteur. Cette responsabilité incite à documenter soigneusement le péril avant de solliciter une autorisation. En outre, l’article L. 511-4 CPCE[5], repris dans l’esprit par l’AUPSRVE, prévoit que la mesure conservatoire tombe en caducité si le créancier ne poursuit pas l’obtention d’un titre exécutoire dans un délai fixé[6].

Le juge des référés, saisi en urgence, peut ordonner toutes mesures conservatoires ou de remise en état pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite. En matière d’insolvabilité organisée, cette voie est essentielle pour empêcher la dissipation des actifs en cours. Le juge peut ainsi interdire certaines aliénations, ordonner la consignation de fonds ou encore accorder une provision lorsque l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

En droit OHADA, l’AUPSRVE s’articule avec les règles nationales de référé et favorise une approche pragmatique : la rapidité est considérée comme une condition de l’efficacité. L’anticipation et la célérité deviennent donc les maîtres mots de la stratégie contentieuse[7].

Lorsque la fraude est déjà consommée, l’action paulienne demeure le recours privilégié. En droit français, le Code civil prévoit que le créancier peut « faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits »[8]. En droit ivoirien, cette action est également reconnue, puisque le Code civil ivoirien (héritage direct du Code napoléonien) dispose que les créanciers peuvent attaquer les actes faits en fraude de leurs droits[9]. A cet effet, trois (3) conditions sont requises :

  • Une créance certaine en son principe, peu importe qu’elle ne soit pas liquide ou exigible au moment de l’acte.
  • Un appauvrissement du débiteur, qui réduit l’assiette du gage commun des créanciers (donation, vente à vil prix, renonciation à un droit, etc.).
  • La fraude, c’est-à-dire l’intention du débiteur de soustraire ses biens à ses créanciers. Pour les actes à titre onéreux, la complicité du tiers doit être démontrée. Pour les actes gratuits, elle est présumée.

L’effet de l’action paulienne est l’inopposabilité relative : l’acte subsiste entre le débiteur et le tiers, mais il est réputé inexistant vis-à-vis du créancier demandeur, qui retrouve ainsi la possibilité de poursuivre son exécution sur le bien[10].

En pratique, les contentieux liés à l’insolvabilité organisée suivent souvent une séquence tripartite :

  • Mesure conservatoire immédiate, pour figer les biens.
  • Procès au fond, pour obtenir un titre exécutoire.
  • Action paulienne, pour neutraliser les actes frauduleux déjà accomplis.

Cette articulation assure une protection efficace du créancier et une cohérence avec la philosophie de l’AUPSRVE[11].

  • Exposé du cas : M. PAFRAI est un vendeur professionnel de poissons et de crustacés. Il a cédé une importante quantité de marchandises à une filiale très prospère d’un groupe agroalimentaire qui s’est engagée à le payer dans un délai de deux semaines à compter de la livraison, qui vient d’avoir lieu. N’accordant aucune confiance aux responsables de ce groupe, M. PAFRAI envisage de faire procéder à une saisie conservatoire sur les comptes de l’acheteur afin d’être certain d’obtenir le paiement du prix de vente. À votre avis, cette démarche pourrait-elle sérieusement aboutir ?
  • Analyse juridique : Le Code des procédures civiles d’exécution permet à tout créancier de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur lorsque sa créance paraît fondée en son principe et que des circonstances démontrent que son recouvrement est menacé (autrement dit le créancier risque fortement de ne pas être payé). En l’espèce, c’est seulement le manque de confiance qui dicte de comportement de M. PAFRAI. D’ailleurs, aucun élément ne permet ici de croire que le paiement du prix de vente est compromis étant donné que son débiteur est « très prospère ». Au demeurant, sa créance n’est même pas encore exigible puisque l’acquéreur dispose de deux semaines pour exécuter son obligation, la livraison venant tout juste d’être faite. La démarche de M. PAFRAI n’est manifestement pas sérieuse et n’aura aucune chance d’aboutir.

Cette affaire illustre la nécessité de documenter objectivement le risque avant toute demande, et de privilégier, en amont, des mécanismes contractuels de protection (clause de réserve de propriété, garantie autonome, assurance-crédit, caution) pour éviter de se retrouver dans une telle insécurité.

Éviter que l’autre partie organise son insolvabilité suppose d’agir à la fois préventivement et curativement. Préventivement, par le recours aux saisies conservatoires et aux mesures de référé, qui permettent de geler le patrimoine menacé. Curativement, par l’action paulienne, qui permet de rendre inopposables les actes accomplis en fraude des droits des créanciers.

Le droit OHADA, applicable en Côte d’Ivoire, et le droit français partagent une même philosophie : garantir l’efficacité du gage commun des créanciers tout en préservant les droits de la défense. Toutefois, la charge de la preuve reste lourde : le créancier doit apporter des indices sérieux de fraude ou de péril. À défaut, il prend le risque d’engager sa responsabilité.

Derrière la technique contentieuse, un enseignement se dégage : la meilleure protection réside dans l’anticipation contractuelle. Par la mise en place de clauses de réserve de propriété, de garanties ou de sûretés, le créancier peut réduire les risques de fraude et s’assurer que son débiteur ne pourra pas aisément organiser son insolvabilité.

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Me Luc KOUASSI

Juriste Consultant Polyglotte| Formateur | Spécialiste en rédaction de contrats, d’actes extrajudiciaires, d’articles juridiques et des questions relatives au droit du travail | Politiste | Bénévole humanitaire.

denisjunior690@gmail.com / +225 07 795 704 35 / +90 539 115 55 28


[1] AUPSRVE, Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, adopté le 10 avril 1998, révisé en 2010, puis en Octobre 2023, art. 54 et s.

[2] Code des procédures civiles d’exécution (France), art. L. 511-1.

[3] AUPSRVE, précité, art. 54.

[4] Arrêt n° 005/2006, Affaire Louis Augustin KOKOU de CAMPOS c/ Port autonome de Cotonou.

[5] CPCE, art. L. 511-4.

[6] AUPSRVE, précité, art. 60.

[7] P. Malaurie, L. Aynès et P. Stoffel-Munck, Droit des obligations, LGDJ, 13e édition, 2024, p. 134.

[8] Code civil français, art. 1341-2.

[9] Code civil ivoirien, art. 1167, al. 1.

[10] Code civil français, art. 1341-2 ; Code civil ivoirien, art. 1167, al. 1.

[11] AUPSRVE, art. 62 et s.

Résumé du webinaire du 26 septembre 2025 sur le thème : « Se faire accompagner dans la rédaction de son mémoire sans perdre sa touche personnelle ».

Le Cabinet LDJ SARL a tenu un webinaire autour du thème : « Se faire accompagner dans la rédaction de son mémoire sans perdre sa touche personnelle », ce vendredi 26 septembre  2025 à 19h, via Google Meet. Cet événement a suscité un vif intérêt auprès des participants, surtout auprès des étudiants en fin de cycle qui sont en pleine rédaction de leur mémoire.

La présentation a été assurée par 4 intervenants à savoir : Me Luc KOUASSI, Juriste ivoirien, consultant polyglotte, fondateur du Cabinet LDJ SARL. Ensuite, Me Masanka TSHIMUANGA, Avocat au barreau du Kasaï-original en République Démocratique du Congo. Il y a également eu l’intervention de M. Christophe FODE, créateur de contenu juridique et par ailleurs président de la commission droit et justice du collectif indépendant des jeunes pour un meilleur avenir. Enfin, M. SOME KALITOU, juriste titulaire d’un master 2 en droit des affaires et fiscalité, formateur en droit numérique et protection des données à caractère personnel. Leurs différentes analyses ont permis d’éclairer les interactions sur l’utilisation de l’intelligence artificielle.

La session a été animée par Mlle Carmel N’DRY, stagiaire assistante juridique et administrative au sein du cabinet LDJ SARL. Elle a  favorisé un dialogue constructif et enrichissant entre les participants et les intervenants tout au long du webinaire.

Chaque intervenant de manière générale a parlé des avantages, des inconvénients et a terminé par donner des conseils sur l’utilisation structurée de l’IA pour avoir un résultat qui n’entrave pas nos recherches.

Pour nos intervenants, l’intelligence artificielle est un outil important voire même indispensable en ce qui concerne l’amélioration de notre productivité, dans l’automatisation des tâches et dans nos recherches pour la rédaction de mémoire. L’intelligence artificielle permet de :

  • Faciliter la revue documentaire
  • Gagner en temps et d’assurer une meilleure qualité de travail
  • Rendre le savoir plus accessible
  • Stimuler la recherche scientifique, la médecine, l’éducation, etc. 

Selon nos intervenants l’utilisation des IA est certes efficace mais elle présente des risques et des inconvénients à savoir :

  • Le risque d’obtenir des informations erroné
  • Risque de plagiat : l’IA donne souvent des informations sans citer précisément la source
  • Appauvrissement de la créativité et de l’intellect de l’utilisateur, en effet, l’utilisateur ne réfléchit plus par lui-même, il devient dépendant de l’IA et n’arrive plus ainsi à développer sa créativité.

Face à tous les risques et inconvénients liés à l’IA et à sa mauvaise utilisation, nos intervenants ont proposé des solutions pour une satisfaction dans les résultats de recherches de notre mémoire. En effet, il faut :

  • Former son intelligence artificielle
  • Utiliser son IA comme un outil d’assistance, il ne doit pas tout faire à notre place. Sur ces points, les intervenants ont insisté sur le fait de ne pas demander à l’IA de rédiger notre mémoire à notre place ou de nous trouver un plan pour nous on peut juste faire des recherches approfondies au préalable et lui demander de mieux structurer notre travail
  •  Toujours vérifier les informations obtenues car les informations de l’IA peuvent être erronées.
  • Délimiter notre thématique pour obtenir le meilleur résultat possible (savoir soumettre nos questions à l’IA).
  • Eviter de laisser l’IA produire nos bibliographies

La séance de questions-réponses fut particulièrement enrichissante. Les participants ont abordé plusieurs sujets pratiques, notamment :

Comment former son intelligence artificielle pour parfaire son travail ?  Quels sont les différentes IA qu’on peut utiliser pour nos recherches ? Est-ce que dans le cadre d’un mémoire on peut soumettre notre plan à l’IA pour le peaufiner ?

Des réponses claires et pertinentes ont été fournies à ces questions par nos intervenants, illustrant leur propos par des exemples concrets issus de leur savoir. Cette approche a permis de rendre plus accessibles des problématiques parfois complexes, tout en maintenant un vif intérêt chez les participants.

En définitive, nous pouvons dire que l’intelligence artificielle se révèle aujourd’hui comme un outil puissant capable de transformer positivement la société en améliorant la rapidité, la précision et la personnalisation dans le cadre de nos recherches de fin d’études. Toutefois, son utilisation n’est pas exempte de risque et doit donc être envisagée comme un assistant et pas comme un substitut à l’intelligence humaine.

Chaque intervenant a pris le soin de remercier l’ensemble des participants, en leur signifiant qu’ils restent à leur disposition pour toutes les autres questions.

Pour clore la session, Mlle N’DRY, en qualité de modératrice, a exprimé sa gratitude envers l’assemblée, tout en rappelant que le Cabinet LDJ SARL restait à la disposition des participants pour tout besoin d’assistance à la rédaction de mémoire ou de thèse ou de formation complémentaire sur le thème ou d’autres en contactant :

Ce mot de fin a permis de conclure le webinaire sur une note à la fois chaleureuse et enrichissante.

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