Les fiançailles représentent traditionnellement la promesse des futurs époux de se marier entre eux ultérieurement. Ainsi,la tradition permet-elle aux futurs époux de se fiancer préalablement à leur mariage. Les fiançailles constituent une promesse réciproque de mariage ; en tant que fait juridique, elles emportent des conséquences notables. En effet, elles représentent une promesse synallagmatique, c’est-à-dire un échange réciproque de consentement à une union future.
Définition des fiançailles et statut des fiancés.
Les fiançailles ne constituent pas un contrat mais un simple fait juridique. Elles se matérialisent par :
- La déclaration mutuelle des futurs époux de leur intention de se marier
- La bague de fiançailles ;
- Dès lors, les futurs époux sont fiancés.
En tant que simple fait juridique, les fiançailles n’exigent aucune condition de validité : un mineur ou un majeur protégé peut se fiancer. En outre, elles ne sont soumises à aucune formalité particulière.
En contrepartie, les fiançailles ne produisent que peu d’effets. Ainsi, les actes passés par les fiancés pendant la période des fiançailles ne relèvent d’aucun régime particulier. De même, les fiancés ne bénéficient d’aucun avantage et ne sont soumis à aucune obligation, outre éventuellement les avantages et obligations liés au concubinage. Les fiançailles établissent néanmoins la volonté des fiancés de s’unir ; à ce titre, la loi permet au fiancé survivant d’obtenir des dommages et intérêts, auprès du responsable, en cas de décès de son fiancé. Malgré le peu d’effets attachés aux fiançailles, celles-ci peuvent emporter des conséquences non négligeables en cas de rupture.
Rupture des fiançailles.
Le principe de liberté du mariage permet aux fiancés de rompre librement leurs fiançailles. Toutefois, la rupture entraîne, dans certaines hypothèses, des conséquences non négligeables.
Principe de libre rupture
Le droit ivoirien pose le principe de la liberté du mariage : en vertu de ce principe, un des fiancés peut rompre les fiançailles, c’est-à-dire révoquer sa décision de se marier, sans aucune conséquence.
Rupture abusive des fiançailles
Dans certaines hypothèses, la rupture est considérée comme abusive ; elle peut donc être sanctionnée. Trois éléments conditionnent cette sanction :
- Le fiancé délaissé doit prouver, par tous les moyens, l’existence des fiançailles.
- Le fiancé à l’origine de la rupture doit avoir commis une faute.
- Le fiancé délaissé doit avoir souffert, matériellement ou moralement.
Exemple : la rupture opérée la veille du mariage, alors que des frais ont été engagés en vue de ce mariage, constitue une rupture abusive des fiançailles.
Dès lors, elle est sanctionnée par l’octroi, par le fiancé fautif, de dommages et intérêts au fiancé délaissé.
Sort des cadeaux de fiançailles en cas de rupture
Lorsque les fiancés se sont consentis des cadeaux pendant la période de fiançailles, chacun reste propriétaire de ces présents, même en cas de rupture abusive; des cadeaux d’une valeur importante, visiblement consentis en vue du mariage, doivent cependant être restitués. De même, la bague de fiançailles doit être restituée lorsqu’elle constitue un bijou de famille. Ces restitutions exceptionnelles ont lieu d’être, que la rupture des fiançailles soit abusive ou non.
Ainsi, la législation ivoirienne qualifie les fiançailles de simple fait juridique qui ne fait peser aucune obligation envers l’un ou l’autre des fiancés. Chacun des fiancés peut renoncer librement à son projet de mariage. Cependant, le fiancé qui estime avoir été abusé peut, sur la base de l’article 1382 du Code Civil demander réparation. Pour ce faire, la personne lésée par la rupture des fiançailles doit apporter les preuves :
1°) qu’il y a eu faute de la part de l’auteur de la rupture ;
2°) qu’elle a subi un préjudice du fait de la rupture ;
3°) qu’il existe un lien de causalité entre la faute et le préjudice.
Lorsque ces trois (3) éléments sont réunis, le juge apprécie la demande de la personne lésée du fait de la rupture.
Quelques exemples de jurisprudence en matière de rupture des fiançailles
Pas de restitution pour une bague assimilée à un cadeau d’usage (faible valeur)
La bague reste acquise, irrévocablement. Ce principe a été rappelé par la Cour de cassation française, dans un arrêt de la 1re chambre civile du 19 décembre 1979 (pourvoi 78-13.346) :« Justifie légalement sa décision rejetant la demande de restitution de la bague de fiançailles formée par le mari à la suite du divorce des époux la Cour d’appel qui, après avoir exclu le caractère de souvenir de famille du bijou litigieux, estime souverainement que la remise de la bague à la fiancée constituait en l’espèce, compte tenu des facultés respectives des époux et de leur famille, un présent d’usage, qui ne pouvait comme tel donner lieu à restitution. »Les juges doivent se baser sur la valeur du cadeau, les facultés financières respectives des époux et de leur famille… pour autoriser ou non la restitution.
Motifs de restitution de la bague de fiançailles
Différents motifs justifient la restitution de la bague de fiançailles :
- Lorsque la valeur est importante et disproportionnée eu égard au patrimoine de l’offrant : dans ces conditions, les juges du fond apprécient au cas par cas, au regard de la fortune du donateur et de son train de vie.
- En cas de rupture fautive des fiançailles : si l’initiative de la rupture fautive vient de la future épouse, elle doit restituer la bague qui lui a été offerte ; si au contraire la rupture émane du futur époux, il ne peut demander la
- Restitution de la bague que s’il s’agit d’un bijou de famille, et sous réserve que la fiancée y consente.
La jurisprudence affirme, de manière constante, que les souvenirs de famille doivent être restitués, quelles que soient les circonstances de la rupture. Ils doivent être conservés dans la famille, représentant une tradition qui se transmet de génération en génération.
Exemples : arrêt de la 1re chambre civile de la Cour de cassation du 30 octobre 2007 (pourvoi 05-14.258) : « indisponibilité des bijoux de famille, lesquels ne peuvent être donnés à un tiers (concubin, épouse, partenaire pacsé, ou fiancé) mais seulement remis à charge de restitution » ; cour d’appel de Versailles du 10 mars 2005 (pourvoi 04-1388) : dans le cadre d’une liquidation de régime matrimonial après divorce, « la cour observe que monsieur X… sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a ordonné la restitution de biens propres mobiliers lui appartenant sous astreinte en possession de madame Y…, à savoir une bague de fiançailles ».
La preuve de la qualification du bijou de famille peut se faire par tous les moyens : photographies de la bague portée dans une soirée de famille par un membre de famille, témoignages, facture détaillée d’achat au nom d’un membre de la famille ou facture de réparation.
Droit positif congolais (Brazzaville)
C’est l’article 337 du code de la famille congolais, qui énonce tacitement le fait juridique des fiançailles comme Promesses de mariage pendant que la jurisprudence parle de contrat de fiançailles bien que considérant les fiançailles comme un fait juridique.
Selon le droit coutumier congolais en ses articles 344 et 345, après rupture abusive des fiançailles, la restitution des cadeaux peut-être demandé par le fiancé ou la fiancé a subi un préjudice sauf si :
- Le tribunal estime que le plaignant est fautif et qu’il serait inéquitable de restituer les cadeaux.
- Si la coutume applicable ne permet pas la restitution des cadeaux ou de certains cadeaux.
Le délai de prescription de l’action fondée sur rupture des fiançailles est d’un an a compter du jour de la rupture.
Droit positif Marocain et Malien
Le Droit Marocain respecte les mêmes conditions que le Droit positif ivoirien concernant la rupture des fiançailles et le problème la restitution des cadeaux avec l’article 8 du code de la famille marocain du 5 Février 2004.
Il en est de même pour le Droit positif Malien avec l’article 278 du code des personnes et de la famille.
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